Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Sept questions sur « l’horloge biologique »
1 Comment fonctionne la fertilité ?
Pour tomber enceinte, il faut qu’un ovocyte (ou ovule), la cellule reproductrice de la femme, soit fécondé par un spermatozoïde, la cellule reproductrice de l’homme. « La femme a environ un million d’ovocytes à la naissance, expose Nathalie Massin, cheffe du service d’aide médicale à la procréation au CHI de Créteil. Il en reste 400 000 à la puberté, zéro à la ménopause. Entre 12 et 50 ans, une femme va avoir besoin de 400 à 500 ovules pour avoir des règles. Plus on a d’ovocytes, plus on est fertile. Mais il n’y a pas que la quantité : il y a aussi la qualité. Or, en vieillissant, ces cellules perdent en qualité. »
2 À quel âge est- ce compliqué de tomber enceinte ?
« Vers 37, 38 ans, les chances de tomber enceinte sont d’une sur douze à chaque cycle, détaille Nathalie Massin. À 40 ans, c’est une sur quinze. Une femme qui commence son projet d’enfant à 35 ans a environ 15 % de risque de ne pas y arriver, mais ça veut dire 85 % de chance que cela marche ! Et à 40 ans, deux femmes sur trois arrivent à avoir un bébé. »
3 Quand parle-t- on de grossesse tardive ?
« Beaucoup de femmes de 40 ans accouchent pour la première fois, explique Nathalie Massin. Il n’y a pas de limite franche à partir de laquelle les risques obstétricaux sont nettement plus importants. C’est un continuum, comme la baisse de fertilité. » Ce que constatent les médecins, c’est une augmentation de certains risques lors des grossesses après 40 ou 42 ans (fausse couche, trisomie 21 chez l’enfant…).
4 Quel est le rôle des hommes dans la fertilité ?
La fertilité d’une femme dépend aussi de la fertilité de son partenaire. « Il y a un déclin modéré de la qualité du sperme chez les hommes au fil du temps, explique le professeur Michaël Grynberg, chef du service de médecine de la reproduction et préservation de la fertilité à l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart, qui exerce aussi à l’hôpital Jean-Verdier de Bondy. Pourtant, beaucoup d’hommes avec des spermogrammes loin d’être parfaits arrivent à avoir des enfants. »
L’explication ? « La femme est capable de compenser les « faiblesses » de l’homme. Le problème, c’est que plus elles avancent en âge, moins c’est vrai », poursuit le chercheur. Autrement dit, une femme de 40 ans aura plus de chances de tomber enceinte si l’homme a 30 ans que s’il en a 50.
5 Que peut la médecine face au déclin de la fertilité ? Plusieurs options peuvent être envisagées. La stimulation hormonale dans un premier temps, puis la fécondation in vitro (FIV) et, enfin, l’aide médicale à la procréation (AMP ou PMA). « Mais ce n’est pas le remède miracle, insiste Michaël Grynberg. Le taux de réussite de la PMA en France, tous âges confondus, est de 20 à 25 % seulement. »
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La congélation d’ovocytes
change-t- elle la donne ?
Oui et non. Depuis 2021, il est possible de congeler ses ovocytes ou son sperme sans motif médical. La congélation de sperme est ouverte aux hommes de 29 à 45 ans et la congélation d’ovocytes aux femmes de 29 à 37 ans. Les femmes pourront utiliser ces gamètes jusqu’à l’âge de 45 ans et les hommes jusqu’à 60 ans. « Mais congeler les ovules n’arrête pas la baisse de fertilité, car l’utérus est moins compétent à 42 ou 43 ans qu’à 32 ans », met en garde Michaël Grynberg. Ces ovocytes pourront être utilisés dans le cadre d’une aide médicale à la procréation. Sans garantie de succès.
7 Ces âges limites n’augmentent-ils pas la pression sur les femmes ?
« Bien sûr que cela va à contre- courant de la société, mais il faut avoir conscience de la réalité », souligne Michaël Grynberg. C’est tout le travail des spécialistes en fertilité : sensibiliser à l’inexorable sans brusquer. « Les femmes doivent être libres de faire leur choix, mais un choix éclairé, à la lumière de ce qui va se passer physiologiquement et de ce que peut, mais surtout de ce que ne peut pas, leur apporter la médecine. »