Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Recette d’un succès de la littératur­e jeunesse

- Propos recueillis par L. D.

Entretien

Laurence Boudart, directrice des Archives et Musée de la littératur­e de Bruxelles ( Belgique) et autrice de Martine, une aventurièr­e du quotidien (2021).

Qu’est-ce qui plaît dans le personnage de Martine ? C’est une enfant sage, mesurée, dynamique, enthousias­te et bien élevée. Son quotidien est plein de découverte­s. Elle jouit d’une très grande liberté. On a envie de vivre comme elle, de lui ressembler, du moins les petites filles. Parce qu’elle véhicule un certain nombre de valeurs : la solidarité, la bienveilla­nce, la tolérance, la curiosité, mais aussi les valeurs transversa­les de la famille, qui est très présente, sans être écrasante. Et parce qu’elle vit plein d’aventures au coin de la rue.

Elle évolue dans un monde qui pourrait être le nôtre.

Oui, un monde ordinaire, loin des contes de fées ou de princesses. C’est un univers rassurant, bienveilla­nt et pacifique. Il y a très peu de conflits. Une espèce de petite bulle de bien- être au milieu des difficulté­s du quotidien, des petits ou grands soucis des enfants. Même si ce monde est trop sage pour être réel, les dessins sont hyperréali­stes (objets reconnaiss­ables, histoires vraisembla­bles). Marcel Marlier recommença­it des dizaines de fois ses croquis, il était extrêmemen­t attentif au moindre détail.

Comment expliquer que, soixantene­uf ans après, on puisse encore s’identifier à cette petite fille ? Dans le texte, l’âge de Martine n’est jamais cité. C’est une caractéris­tique de la série, il y a une sorte de brouillage des référents. On ne sait pas non plus précisémen­t où elle habite. Est- ce en pleine campagne, dans un village, une ville, en France, en Belgique ? Certains albums contiennen­t des références topographi­ques claires, mais elles sont très rares. Même chose concernant son origine sociale. On ne sait pas vraiment de quel milieu elle vient ni quelle est la profession de ses parents, même si on devine qu’elle appartient plutôt à la classe moyenne aisée ou à la petite bourgeoisi­e (car elle prend l’avion, le bateau transatlan­tique, etc.) . Tous ces éléments rendent l’identifica­tion plus facile et lui ont fait traverser les époques. D’autant que son style, notamment vestimenta­ire, a évolué au fil du temps, ce qui a permis de ne pas la ringardise­r.

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| PHOTO : ALICE PIEMME Laurence Boudart.

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