Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Allan Petre, un Français à l’assaut de la Nasa
À 24 ans, le jeune homme s’apprête à rejoindre les rangs de la célèbre agence spatiale, aux États-Unis. Un rêve d’enfant, devenu réalité pour ce garçon de banlieue parisienne au parcours singulier.
« Peu de stress, beaucoup d’excitation. » À un mois de s’envoler pour réaliser « son rêve d’enfant », les mots d’Allan Petre, 24 ans, sont une preuve – s’il en faut encore – de sa motivation sans faille. En janvier, ce Francilien de Villemomble (SeineSaint- Denis) ralliera les États- Unis et le centre de recherche spatiale de la Nasa, situé à Pasadena, dans la banlieue est de Los Angeles (Californie). « Un immense accomplissement, dans une agence spatiale mythique, qui représente énormément pour moi, depuis tout petit, mesure l’ingénieur en aérospatial, qui a découvert sa vocation à l’enfance, au cours d’une sortie scolaire dédiée à l’astronomie. J’ai été passionné depuis ce jour- là. Ensuite, je me suis documenté, j’ai regardé des reportages, lu des livres. Aujourd’hui, intégrer la Nasa, c’est le résultat de cette passion. »
« Quitte à rater, autant que j’essaie »
Depuis l’école primaire, le projet du jeune homme a eu le temps de mûrir, d’être méprisé « par certains professeurs qui n’y ont pas cru », de disparaître même.
À 18 ans, il se lance dans un DUT GEA (Gestion des entreprises et administrations), un parcours commun au sortir d’un bac scientifique. « Je ne me sentais pas à ma place, je n’aimais pas ça. Un jour, je me suis vraiment demandé ce que je faisais ici. J’ai mis plusieurs mois à le comprendre, mais au final, ma passion pour l’astronomie l’a emporté. C’était ça ou rien. » Retour à la case départ. Il choisit alors un autre DUT, cette fois- ci dans son domaine de prédilection, en génie thermique et énergétique.
La charge de travail et les deux heures de trajet matin et soir n’auront pas raison de sa détermination. Il doit réussir. Et toute autre issue laisserait un goût amer au jeune homme, dont la mère est agente de restauration
scolaire et le père technicien informatique. « Je partais à 6 h du matin et rentrais à 21 h le soir. Le week- end, je travaillais pour payer mes études, car mes parents ne pouvaient pas m’aider financièrement. »
Finalement, les efforts paient. Premier succès notable : pour sa formation en école d’ingénieur, il décroche une alternance au sein de l’entreprise Ariane. Un fabricant de fusée, « hyper réputé à l’international, s’enorgueillit- il. C’est un immense atout. Même si, à la Nasa, ils ne me l’ont
pas dit explicitement, je sais que ça a joué dans leur décision. Aux ÉtatsUnis, ils ne connaissent pas trop l’alternance. Ils ont vu que j’étais déjà formé, prêt à travailler pour eux. »
Cette expérience lui donne des ailes et l’envie de viser encore plus haut. Cet été, il décide d’envoyer « au culot » son CV au géant américain. « De toute façon, je risquais quoi ? Recevoir une réponse négative ? Je voulais intégrer la Nasa depuis petit, alors autant tenter ma chance, plutôt qu’avoir à regretter plus tard. »
Et après une batterie de tests, de sélections et d’entretiens, Allan Petre a finalement reçu, il y a quelques semaines, son affectation, par « un simple mail de la part de la NASA ». « Les enfants doivent comprendre qu’il faut être fier d’avoir des rêves et qu’il faut s’y accrocher coûte que coûte. Tout cela passe par des sacrifices, beaucoup de travail, mais ça vaut la peine », assure-t-il.
« Je serais fier de réprésenter l’Europe dans l’espace »
L’ingénieur en aérospatial s’apprête maintenant à rejoindre la mini diaspora d’une « vingtaine de Français parmi les 17 000 employés de la Nasa ». Il devra d’abord se contenter d’un contrat de six mois, pendant lequel il travaillera sur deux missions – Davinci et Veritas – destinées à explorer Vénus, en 2029 et 2031. « C’est un contrat prolongeable, en fonction des besoins et de ma volonté. »
Avant, peut- être, de retourner sur le Vieux continent et travailler pour l’Agence spatiale européenne (Esa), où évolue Thomas Pesquet. « Je suis français. Je serais fier, un jour, de représenter l’Europe dans l’espace. » Rendez-vous est pris dans dix ans, lors du prochain appel à candidatures pour les astronautes de l’Esa. En attendant, le jeune homme compte bien s’entraîner. « Je vais commencer dès demain pour être prêt », conclut- il en rigolant. « Les histoires d’émancipation sont toujours belles. Et j’ai beaucoup d’admiration pour les gens qui regardent les étoiles. Ça appelle au rêve, à l’enfance, à l’infini, à ce qui nous dépasse… Et j’aime à y penser le plus possible, pour m’extraire un peu de notre condition. »