Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Paris assiégé meurt de faim
Après la déroute de Napoléon III à Sedan, Paris est assiégé par les armées prussiennes du chancelier Bismarck à partir du 19 septembre 1870. À l’intérieur de la capitale, se trouvent 2 millions de civils et 200 000 gardes nationaux. Dans les jours qui précèdent le début du siège, des réserves alimentaires sont constituées dans l’urgence : le bois de Boulogne et le jardin du Luxembourg hébergent des milliers de moutons, de cochons, de vaches, d’ânes et de chevaux. On stocke aussi de grandes quantités de pommes de terre, de riz, de farine, de maïs, de fromage, de vin, etc.
70 000 cheveux abattus
Mais ces réserves s’épuisent rapidement et les autorités doivent appliquer un rationnement sévère. Les Parisiens se mettent à pêcher des poissons dans la Seine, la Marne et le lac du bois de Boulogne. On abat les 70 000 chevaux présents dans la capitale, avant de s’attaquer aux moineaux, aux chiens et aux chats. Début décembre, l’Académie des Sciences se réunit pour une dégustation « à l’aveugle ». Après avoir goûté du cheval, du chien, du chat et du rat, ses membres élisent à l’unanimité ce dernier comme ayant la chair la plus fine et la plus goûteuse ! Face à la pénurie, les prix s’envolent et un marché noir se met en place. Un poulet qui, en temps normal, coûte entre 6 et 8 francs, vaut le double dix jours seulement après le début du siège. En décembre, il faut compter 2 francs pour un oeuf, 5 francs pour une boîte de sardines. Un rat coûte 3 francs et un chat 10 francs…
Rationnement de pain
Les classes les plus aisées peuvent néanmoins s’offrir une nourriture moins rebutante. Le chef Alexandre Choron propose un repas de Noël « exceptionnel ». Au menu : potage de consommé d’éléphant, tête d’âne farcie, filet de lama, côtelettes de tigre, chameau rôti à l’anglaise, civet de kangourou, côtes d’ours rôties sauce poivrade. Ainsi que du cuissot de loup sauce chevreuil, du foie d’autruche truffé, du chat flanqué de rats, de la terrine d’antilope aux truffes… Toute la ménagerie du Jardin des Plantes et celle du parc zoologique de Paris sont passées à la casserole ! Le 29 et 30 décembre, Castor et Pollux, les deux éléphants du jardin d’acclimatation sont abattus et leur carcasse vendue.
En janvier 1871, après cent trente jours de siège, le gouvernement est contraint de rationner le pain, l’un des derniers aliments encore accessibles. Officiellement, il ne doit contenir que du blé, du riz ou de l’avoine, mais il est principalement composé de paille moisie hachée. Face au désastre imminent - la famine et les maladies font des hécatombes - Paris capitule le 28 janvier 1871.