Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Antonin Carême, véritable artiste des fourneaux
Antonin Carême, « prince des cuisiniers et cuisinier des princes » Le petit Marie-Antoine naît à Paris à la veille de la Révolution. Très pauvres, ses parents l’abandonnent à l’âge de 10 ans. Recueilli par le tenancier d’une gargote, il apprend les rudiments de la cuisine. Adolescent, il confectionne de somptueuses pièces montées : il s’est pris de passion pour l’architecture et s’inspire des estampes de la Bibliothèque impériale qui représentent les plus beaux monuments d’Europe. Pendant douze années, Carême dirige les cuisines de Talleyrand. Puis il entre au service du Prince de Galles et du tsar Alexandre Ier. Ses ouvrages présentent ses inventions : le boudoir, le volau-vent, de nombreuses sauces et potages… ainsi que les dessins des nouvelles formes qu’il a données à certains ustensiles et aux bonnets des cuisiniers et pâtissiers.
Des frais de bouche considérables
Si Napoléon Ier mange « avec une rapidité qui passe toute imagination », les achats de denrées destinées à le nourrir, lui et ses invités, atteignent en 1812 le million de francs. Autant que le budget affecté au ministère de la Marine pour régler les frais de son administration centrale ! D’énormes quantités d’aliments sont nécessaires car « une fois au travail, on ne savait jamais quand il le quitterait ; aussi, on mettait pour lui des poulets à la broche de demiheure en demi-heure ; et l’on en a vu rôtir des douzaines avant d’atteindre celui qui lui a été présenté ». Par ailleurs, l’Empereur tient à ce que les poissons et fruits de mer les plus luxueux, comme les vins les plus précieux, figurent à sa table.
Les produits et cuisines des provinces deviennent à la mode
Le redécoupage administratif de la France par les autorités révolutionnaires attire l’attention sur les singularités culinaires des différentes provinces et « pays ». Dès la fin du XVIIIe siècle sont publiés les premiers livres de recettes régionales (La Cuisinière du Haut- Rhin, Le Cuisinier méridional…). Certains produits ou mets locaux étaient toutefois réputés depuis le
XIIIe siècle : les chapons de Loudun, les échalotes d’Etampes, les pâtés de Paris, le fromage de Brie, la moutarde de Dijon, la sauce poitevine, le brouet de Savoie… Au XVIe siècle, on mentionne déjà la qualité des fromages d’Auvergne, des chapons du Mans, du beurre d’Isigny, des cardes de Lyon, des fruits de Provence et des pommes de Normandie.
La viande de cheval triomphe… pour peu de temps
Jusqu’en 1811, la vente de viande de cheval était interdite par la loi, car elle était jugée dangereuse pour la santé. La première boucherie hippophagique de Paris ouvre seulement en 1866. Mais au lendemain de la guerre de 1870, la consommation explose : lors du conflit, des millions de chevaux ont péri et leur chair a sauvé un grand nombre de Français. Peu coûteuse, la viande de cheval reçoit l’aval des médecins qui la jugent désormais tout à fait saine. Ils la conseillent aux travailleurs de force, aux adolescents, aux femmes enceintes, aux personnes âgées et aux convalescents. Mais à partir du milieu du XXe siècle, la production chute : les chevaux sont remplacés par des tracteurs et, dans les villes, par des véhicules motorisés.