Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Le grand ciel bleu blanc rouge de Cécilia Berder
Championnats de France, à Nantes. Dans la foulée de sa médaille internationale, la Finistérienne a décroché un cinquième sacre sur la piste de Mangin-Beaulieu. Un bonheur partagé en famille.
En se faufilant dans le vestiaire, une poignée de minutes après son sacre, Cécilia Berder a le visage encore rougi par l’effort mais sourit à s’en décrocher la mâchoire. « Je profite de l’instant. C’est une clé que l’on s’est fixée », glisse- t- elle.
Si la Finistérienne savoure à plein, c’est qu’elle a choisi la semaine idoine pour regoûter à l’ivresse du succès. Déjà présents à Orléans la semaine passée pour sa première breloque internationale depuis deux ans, son compagnon et sa fille d’un an et demi la couvaient encore des yeux en bord de piste, hier après-midi, à Mangin-Beaulieu. « On essaie de la suivre quand c’est possible, confie Philippe, qui partage la vie de la Finistérienne. On va essayer de l’accompagner à Tunis (12 au 14 janvier). Je suis très fier d’elle. Pas seulement parce qu’elle gagne aujourd’hui (hier) mais parce que je sais tout le travail de l’ombre qu’elle a effectué. »
« Dur de redonner un sens à l’escrime »
Le labeur a été autant physique que mental. La Morlaisienne a eu besoin de retrouver ce supplément d’âme lorsque l’issue se dessine. Ce qu’elle a d’abord peiné à faire. « Je ne suis plus la même qu’avant, constate-t- elle. J’ai connu la plus grande joie en devenant maman mais j’ai également perdu ma mère. Quand on se
confronte en si peu de temps à la mort et à la vie, c’est dur de redonner un sens à l’escrime. »
Alors il a fallu cravacher. Repasser par les circuits nationaux et les tableaux de qualification. Un long chemin, que la médaillée d’argent par équipes aux Jeux de Tokyo a emprunté, sans amertume. « C’est la
règle du jeu en arrêtant plusieurs mois la compétition. »
Accepter l’équation afin de retirer le costume maternel en enfilant le masque. « On fait un gros travail avec mes préparatrices mentales là- dessus. Être douce dans la vie mais animale sur la piste. Il faut activer les bonnes choses, travailler ma routine pour récupérer ce surplus d’énergie viscérale quand la tension augmente. À 10-10, au moment où les jambes tremblent, je me dis une seule chose : “Je suis un félin et je vais te bouffer.” »
À cinq touches du sacre, elle a malgré tout jeté un regard vers son clan, alertée par les pleurs de sa fille. « En un coup d’oeil, mon compagnon m’a fait signe que tout allait bien. Je me suis remis dedans avec le bon état d’esprit. » Pour aller empocher un cinquième titre de championne de France en individuel, son premier depuis 2015. « Ça représente beaucoup. D’abord car je passe devant Carole Vergne au palmarès. Mais aussi parce que c’est de l’expérience en barre. Avant le début de la finale, j’attendais derrière le rideau, il y avait la pression et les larmes qui montaient parce que tu repenses à tout ce que tu as traversé. Forcément, c’est puissant. » Et à sept mois des Jeux, le meilleur reste peut- être à venir.
Le palmarès complet
Sabre dames : Berder bat Vongsavady ; sabre hommes : Pianfetti bat Bibi ; épée dames : Mallo-Breton bat Rembi ; épée hommes : Allègre bat Fava ; fleuret dames : Ranvier bat Patru ; fleuret hommes : Savin bat Ediri.