Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Il veut rendre hommage au compositeur méconnu
L’initiative. Mélomane et mécène, Michel Léger s’est fixé pour objectif de faire sortir de l’ombre le musicien Eugène Anthiome (1836-1916), dont il a racheté la maison d’Étables-sur-Mer.
Pourquoi Michel Léger s’intéresse-t-il à Eugène Anthiome ?
Parce que cet ancien chef d’entreprise habite, depuis vingt ans, la demeure du compositeur, à Étables-sur-Mer. « La maison était dans la famille Anthiome depuis 1907, date de sa construction, précise- t- il. Je l’ai achetée à une de ses arrière-petitesfilles, restée sans descendance. »
Dans la cave de la villa, il a trouvé un grand nombre de cartons qui contenaient des partitions signées du musicien. « Certaines sont manuscrites, d’autres éditées. Il y a 150 oeuvres environ. » La découverte de ce trésor musical a conduit Michel Léger à s’intéresser à Anthiome et à entreprendre des recherches sur lui.
Qui était Eugène Anthiome ?
C’est un compositeur tombé dans l’oubli. Il est né en 1836 à Lorient (Morbihan) et est mort en 1916 à Étables- sur- Mer. Succincte, sa biographie sur Wikipédia précise qu’« en 1861, il remporte le Second Grand prix de Rome avec sa cantate Atala » et qu’à partir de 1863, il enseigne au conservatoire de Paris. Maurice Ravel a été un de ses élèves. Eugène Anthiome a eu deux filles, dont une pianiste, à qui il a dédié plusieurs oeuvres, et un fils, artiste peintre à Montmartre.
Comment le compositeur est-il arrivé à Étables ?
La famille Anthiome vivait à Versailles.
Le musicien fréquentait l’industriel Oscar Legris, lui-même versaillais et créateur de la station balnéaire d’Étables. Legris l’a convaincu de venir lui aussi en villégiature en Bretagne et c’est ainsi qu’Anthiome a fait construire une belle demeure, sur les hauts des Godelins. Ker Jeannick est devenue sa résidence de vacances familiale jusqu’à son décès. Eugène Anthiome est enterré à Versailles.
Musicalement, où se situe-t-il ?
« On peut le ranger dans la catégorie des musiciens français de la fin du romantisme, de la grande époque des Saint- Saens, Fauré, Gounod, Massenet ; avant Debussy et Ravel », détaille Michel Léger. Très prolixe, il a produit beaucoup de mélodies de musique de salon, deux opéras. « Le reproche qui est fait à sa musique est d’être bien faite, mais de manquer de souffle. Cependant, il a écrit des mélodies superbes. »
Comment le compositeur est-il sorti de l’ombre ?
L’enthousiasme de Michel Léger pour Anthiome l’incite à réunir des amis musiciens professionnels lors de week- ends de déchiffrage des partitions exhumées. Puis, en 2019, il organise avec eux une série de concerts, à Étables, mais aussi aux Folles journées de Nantes, à Paris (SaintLouis des Invalides et la Sorbonne), à Venise au Centre de musique romantique française Palazzetto Bru Zane… Des lieux prestigieux, afin de rendre hommage à l’artiste breton oublié. « À chaque fois, l’accueil par le public a été très bon. »
Michel Léger produit également un disque : dix pièces de musique de chambre et vocale d’Eugène Anthiome, interprétées par l’Ensemble Contraste. Mais le Covid vient briser l’élan.
Quels sont les projets ?
Michel Léger envisage maintenant de rééditer la méthode de piano écrite par Eugène Anthiome, L’Art du piano, méthode pour les commençants, parue en 1880. Il travaille aussi à la rédaction d’une biographie du compositeur et espère que le festival des Musicales de Blanchardeau, qui se déroule autour de Pléguien, le mettra au programme de son édition 2025. Il souhaite également qu’une voie de Binic-Étables-sur-Mer soit nommée Eugène-Anthiome. « Nous guettons toutes les opportunités pour lui donner la place qui lui revient. »