Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Le lait, un aliment apprécié, recomman
Le lait animal a intégré notre alimentation il y a « seulement » 10 000 ans. Le Grand Ouest a su s’approprier le breuvage, créant ses races, ses produits, ses usages.
En France, trois régions détiennent à elles seules plus de la moitié des vaches laitières du pays : la Bretagne, la Normandie et les Pays de la Loire. Le climat tempéré, doux et humide du Grand Ouest et la nature des terres y favorisent la pousse de l’herbe et l’élevage bovin laitier.
Le lait, l’aliment primordial
L’importance du lait dans la vie des hommes vient du fait qu’il constitue l’unique aliment du nouveau-né. Réalité souvent ignorée : la consommation par le nourrisson d’un lait autre que celui de sa mère (ou d’une nourrice) est très récente dans l’histoire de l’humanité. Alors que les premiers représentants du genre Homo sont apparus il y a (au moins) 2,4 millions d’années, cela fait seulement 10 000 ans que des êtres humains ont commencé à boire du lait d’origine animale.
En effet, cela n’a été possible qu’à partir du moment où des hommes ont, pour la première fois, réussi à domestiquer certaines espèces de mammifères sauvages. Ce processus a été initié au Proche- Orient avec les chèvres, les mouflons et les aurochs. Trois millénaires plus tard, l’élevage des chèvres, des brebis et des vaches parvenait sur le territoire de la France actuelle.
Dans nos imaginaires, le lait renvoie à la naissance et à l’enfance. C’est un symbole de fécondité et de vie, d’abondance et de richesse, de pureté (en raison de sa couleur blanche). Le lait est omniprésent dans les mythes et les religions des premières civilisations… Dans la Bible, Moïse promet aux Hébreux de les conduire jusqu’à un pays « où ruissellent le lait et le miel ».
Les mythologies abondent de récits dans lesquels de jeunes enfants promis à un destin exceptionnel sont allaités par des animaux. C’est le cas de Zeus, nourri par la chèvre Amalthée, et des jumeaux Remus et Romulus, les futurs fondateurs de Rome, sauvés de la mort grâce au lait d’une louve. Un mythe grec relate qu’un jour le jeune Héraclès se jeta avec une telle voracité sur le sein de sa mère qu’une giclée de lait en jaillit et traversa le ciel pour former la Voie lactée, notre galaxie, du grec gala qui signifie « lait ».
Un breuvage jadis méprisé par les élites
Pour les Grecs et les Romains de l’Antiquité, le lait était l’aliment des « barbares ». En revanche, le fromage symbolisait la civilisation car il était issu du lait « transformé » par le génie de l’homme.
Durant tout le Moyen Âge et jusqu’au XVIIIe siècle, les classes aisées ont dénigré le lait. Il était vu comme l’aliment du pauvre, du paysan et de l’enfant, des êtres jugés inférieurs.
Les médecins affirmaient de leur côté que les hommes sains risquaient de s’affaiblir s’ils buvaient du lait et ils l’accusaient de provoquer des caries, voire la lèpre. L’Église, elle aussi, s’en méfiait : à l’instar de la viande qui « échauffait les sens », les laitages étaient interdits lors des nombreux jours maigres.
Au XVIIIe siècle, la vision devint un peu moins négative : c’est l’époque où Rousseau faisait l’éloge du « retour à la nature » et du « bon sauvage ».
Au fil du temps, l’image du lait a fini par s’améliorer. Mais si les ruraux pouvaient aisément s’approvisionner dans les fermes, il demeurait coûteux pour les citadins.
À partir de 1850, des « vacheries » furent installées à proximité des villes : chaque jour, des ramasseurs collectaient les grands bidons de lait qu’ils livraient, avec leur charrette à cheval, chez les crémiers où les urbains se rendaient munis de leur petit pot à lait en aluminium.