Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Le père de Juliette Armanet sur les pas de sa fille
Il l’a initiée à la musique et en retour, elle l’a poussé à enfin sortir du bois. Son premier album, « Nuages », est une histoire de famille, dont certains chapitres s’écrivent dans le Trégor.
Au bout d’une petite allée caillouteuse, à Lannion, vit la famille Armanet. Celle de la désormais célèbre Juliette, qui s’est depuis quelques années hissée au top du classement des musiciens francophones.
Ce n’est pourtant pas sa présence qui nous y conduit, le vendredi 5 janvier, mais celle de son père, JeanPierre, qui sort ce même jour l’album Nuages. Son tout premier.
Amoureux de la Bretagne
Jean- Pierre Armanet a toujours été « enthousiasmé » par la Bretagne. Depuis des vacances, tout jeune, à Saint- Cast- Le- Guildo. Au point d’en tomber « amoureux ». Et d’acquérir cette propriété à Lannion, à seulement 500 mètres de celle d’un ami qu’il avait l’habitude de louer. « C’est une région de rêves, de fantasmes. C’est La Nuit des temps. » Trente ans après, la longère trégorroise est devenue « la maison de famille ».
Mais avant de se ramifier dans l’ouest des Côtes- d’Armor, l’histoire familiale, elle, prend racine au Pecq, dans les Yvelines. Jean-Pierre Armanet est d’abord professeur de français et de latin, puis un temps libraire dans le Nord, un « sacerdoce ».
« Au milieu de [sa] vie », le Francilien se voit confier, par la Direction des affaires culturelles de Bretagne (Drac), la réalisation d’un documentaire sur les jardins de la Roche- Jagu. Puis la commande s’élargit à douze autres productions. Jean- Pierre Armanet s’installe donc plusieurs années dans le pied-à-terre breton : « J’ai basculé assez logiquement dans un métier qui en embrassait d’autres », retrace- t-il.
D’autres, dont celui de compositeur : « Pour habiller les documentaires, on achetait ce qu’on appelle de la musique au mètre, avec des schémas types ; de la musique d’ascenseur, raconte le musicien. Je me suis dit : je vais la composer moi-même cette musique. Cela m’a vraiment incité. »
La quête de légitimité
Composer, Jean-Pierre Armanet l’a toujours fait « en parallèle » de ses différents métiers. Il aurait même pu ajouter celui de producteur à son CV. Mais « quand on n’a pas fait de conservatoire, on hésite à s’engager, estime l’artiste. C’est un obstacle psychologique, dans un milieu qui reste élitiste et résistant aux transgressions. » Le « succès inimaginable » rencontré par sa fille est parvenu à le soigner du syndrome de l’imposteur et l’a décidé à franchir le cap : « Petite, au lieu de dormir, elle descendait jouer au piano avec moi. Elle aimait ça. C’est elle qui m’a désinhibé. Elle m’a énormément poussé. C’est un retour touchant. »
Nuages, ce sont ceux « qui passent », narrés par Baudelaire dans L’Étranger, ou ceux des ciels bretons, « pas le grand bleu de la Côte d’Azur où il ne se passe rien ». Un florilège de ses compositions récentes, résolument classiques, de temps à autre jazzy, ponctuées ici et là par la voix cristalline de Juliette Armanet. Comme dans Sauver ma vie, « une ballade que je lui jouais il y a trente ans pour l’endormir et qu’elle a reprise dans un titre ».
La star de la pop l’accompagnera sur deux dates, le jeudi 25 janvier, à la salle Gaveau de Paris, et le jeudi 21 mars, au théâtre Alexandre- Dumas de Saint- Germain- en-Laye, aux côtés des pianistes Dana Ciocarlie et Guilhem Fabre, de la percussionniste Adélaïde Ferrière, des violoncellistes du Duo Brady et des cantatrices Élodie Kimmel et Aurore Ugolin.