Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Moteur électrique, puissance… on a piloté la DS

Formule E. Confiée à Stoffel Vandoorne et Jean-Éric Vergne, la DS de Formule E évolue en mondial, cette saison. Nous en avons pris le volant, sur le circuit de Varano, en Italie.

- Guillaume NÉDÉLEC.

Le cockpit d’une voiture de course est d’une riche austérité. Un étroit cocon de carbone où l’espace est compté. Un pilote, avec tout son équipement y entre à peine. Devant, un volant aux nombreux boutons, au centre duquel brille un écran. Et le halo couvert de dorures, indispensa­ble arceau de sécurité, pour compléter le tout. Jusqu’ici, rien de différent avec une voiture de course traditionn­elle. C’est derrière, et un peu devant, aussi que cela se passe. Car nous sommes ici au volant de la DS de Formule E, la génération 3, qui a succédé à la 2, que nous avions essayée en 2020. Cette génération 3 se veut bien différente de sa grande soeur. Techniquem­ent, la voiture de Jean-Éric Vergne et Stoffel Vandoorne est un sacré pas en avant.

Plus légère de 60 kg, plus rapide également, avec une vitesse maximale de 280 km/h, elle se veut beaucoup plus efficace, avec plus de 40 % de l’énergie utilisée durant une course provenant de la régénérati­on au freinage. Le tout, avec une puissance sérieuseme­nt augmentée, de 470 chevaux (350 kw). Un petit concentré de technologi­e qui coûte quelques euros aux constructe­urs.

Casqué, sanglé, serré par les mécanicien­s, Franck et Victor, deux Sarthois, je me retrouve à l’étroit dans cette DS. Ces chiffres trottent, alors que j’attends de m’élancer. Qu’on le veuille ou non, tout esprit raisonnabl­e y pense. Le risque, l’enjeu, l’inconnu. C’est pour cela d’ailleurs qu’il y a des pilotes de course. Non pas qu’ils ne soient pas raisonnabl­es. Mais eux ne conduisent pas. Ils pilotent. Là est la différence entre eux et nous.

Pneus et températur­e

« Tu m’entends ? » La voix de Quentin Avenel, mon ingénieur, crépite. Je le distingue, sur ma droite. Petite moustache, lunettes, il me fait un signe d’approbatio­n. « Tu vas pouvoir t’élancer. Attention aux pneus. Il faut les mettre en températur­e avant de rouler plus fort. » Mode 2 enclenché (l’équivalent du Drive, sur nos voitures automatiqu­es), volant braqué à fond vers la droite, je m’élance.

En cet automne italien, le circuit de Varano brille sous un soleil rasant. Le circuit offre tout un ensemble de virages plus ou moins rapides, quelques lignes droites. Dans un sifflement strident, la DS s’ébroue, prend de la vitesse. Puis le premier virage saute à la figure. 100 m avant, je saute sur le frein. Avec une drôle de sensation.

Sur cette DS, c’est le « Brake by wire » qui est en action. Pas de pédale sous mon pied gauche, mais un bouton qui mesure la puissance de mon freinage. « En fait, la voiture ne freine pas, m’a expliqué Quentin, plus tôt. Ta pression enclenche les moteurs électrique­s, qui récupèrent l’énergie. Si défaillanc­e, il y a un frein de secours, mais il n’est quasiment jamais actionné. »

Conscienci­eux, je multiplie les freinages, les coups de volant, pour comprendre la machine. Je sais aussi que cela fait chauffer mes pneus. Et que je pourrai mettre plus de rythme, dès mon tour suivant. Un tour plus tard, et les inquiétude­s d’avant le roulage disparaiss­ent. Soudain, la radio grésille. « Tu t’arrêteras avant la ligne de départ, me dit Quentin. Tu vas tester une procédure de départ. » Quentin m’attend, au lieu de rendez-vous. « C’est très simple, tu enclenches ce bouton, tu restes appuyé dessus, tu mets pied au plancher, sans tourner le volant. Et quand tu lâches, la voiture va partir. »

Plus vive, plus joueuse, presque plus facile que celle de 2020, je m’attends, vu son potentiel, à décoller. Je ne suis pas déçu. La DS me catapulte à tel point que l’avant semble se cabrer, la direction devient très légère, comme si les roues se levaient. Surtout, le potentiel d’accélérati­on semble ne jamais se tarir.

Mille choses à faire

Panneau 100 m, je tape dans les freins, la voiture s’insère parfaiteme­nt. En sortie, je remets un poil trop de gaz, et voici que la voiture m’échappe. Pneus trop froids ? Adrénaline ? Trop plein de confiance ? Je rattrape la glissade d’un petit contre-braquage. « J’ai vu », s’amuse Quentin à la radio. « J’ai été surpris par les pneus et la puissance », m’excuse-je.

Hélas, la séance touche à sa fin. À temps peut- être, car la fatigue commence à se faire sentir. Dans le cou, à chaque freinage, et dans les bras, car la voiture est dépourvue de direction assistée. Mais je ne peux m’empêcher de penser aux pilotes, qui eux ne se contentent pas de conduire : « Ils ont beaucoup de messages codés à nous faire passer, explique Quentin.

Et tu ajoutes les rails du côté de la piste, les autres concurrent­s, la stratégie à gérer… Tu comprends vite pourquoi la discipline est si difficile. » Ce qu’ont réalisé 22 pilotes, ce samedi sur le circuit de Mexico. Mais pas pour essayer. Pour gagner.

La saison 2024 de Formule E a débuté hier à Mexico. L’Allemand Pascal Wehrlein l’a emporté. Jean-Eric Vergne, premier Français, a terminé à la 6e place. La prochaine étape du championna­t aura lieu les 26 et 27 janvier à Dariya en Arabie saoudite. La saison s’achèvera à Londres les 20 et 21 juillet.

 ?? | PHOTO : DS PERFORMANC­E ?? Équipée de moteurs électrique­s développan­t au total 470 chevaux, la DS de Formule E est aussi puissante que difficile à maîtriser. Mais quelle sensation d’efficacité !
| PHOTO : DS PERFORMANC­E Équipée de moteurs électrique­s développan­t au total 470 chevaux, la DS de Formule E est aussi puissante que difficile à maîtriser. Mais quelle sensation d’efficacité !
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France