Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

« La partie la plus délicate et la plus grasse du lait »

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Une passion normande

Depuis des siècles, ce n’est pas la forte consommati­on locale de beurre qui frappe les personnes visitant la Normandie, mais celle de la crème. Au XVIIe siècle, L’École des ragoûts indique déjà que « les Normands mettent de la crème dans la plupart de leurs sauces ; par exemple dans la morue et dans des pruneaux. » À cette époque, une des plus recherchée­s est celle de Sotteville, près de Rouen. Un ouvrage de 1855 signale que « la crème de ce charmant pays est supérieure et jouit d’une réputation européenne. Les Rouennais en jouissent de première main. » En 1828, Masson de SaintAmand, Préfet du départemen­t de l’Eure, note que « la sauce du pays la plus ordinaire pour le poisson est de la crème cuite ».

La crème, de quoi s’agit-il ?

« La partie la plus délicate et la plus grasse du lait » nous dit, au XVIIIe siècle, L’Encyclopéd­ie de Diderot et d’Alembert. Aujourd’hui, La crème est définie comme « une émulsion dans l’eau de la matière grasse du lait ». Elle est constituée d’environ 65 % d’eau et d’au moins 30 % de matières grasses. Elle renferme également une petite quantité de glucides et de protéines. La crème fleurette, une crème liquide obtenue après pasteurisa­tion, est appréciée pour sa capacité à foisonner. Pour donner à la crème une texture épaisse, on l’ensemence avec des ferments lactiques. Cette phase dite de maturation permet également à la crème de développer d’autres arômes.

La crème des crèmes

Deux crèmes bénéficien­t d’une AOP. La plus ancienne est celle d’Isigny, produite sur une partie du Cotentin et dans le Bessin. La seconde est la crème fraîche de Bresse (la zone couvre une partie de l’Ain, de la Saône- et-Loire et du Jura). Toutes deux ont une teneur en matière grasse supérieure à 35 %. Il existe également une crème IGP : la crème fraîche fluide d’Alsace. Ces trois produits répondent à un cahier des charges qui exclut l’emploi d’additifs. Les autres crèmes industriel­les peuvent en effet avoir recours à des stabilisan­ts, des épaississa­nts ou des émulsifian­ts. Dans les crèmes « légères », par exemple, ils permettent de compenser le manque de matières grasses et la perte d’onctuosité qui en résulte.

La crème d’Isigny AOP : un terroir privilégié et des savoir-faire ancestraux

Le lait doit provenir d’un troupeau comportant au moins 30 % de vaches

Normandes et pâturant au moins sept mois de l’année. Il est versé dans une écrémeuse- centrifuge­use qui permet de séparer les matières grasses et d’obtenir la crème. À celle- ci peuvent alors être ajoutés des ferments lactiques. La crème « mature » pendant 16 à 18 heures entre 18 °C et 22 °C, ce qui lui donne son onctuosité et ses arô

mes. Cette crème pasteurisé­e doit être conservée au frais. Elle se distingue de la crème « crue » (non pasteurisé­e) et de la crème « longue conservati­on » obtenue après chauffage à haute températur­e. Ce dernier procédé permet de détruire la totalité des micro- organismes présents mais altère la qualité nutritionn­elle et gustative du produit.

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| PHOTO : AKG-IMAGES / PAUL ALMASY Crèmerie à Camembert (Normandie) en 1952.

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