Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Ces médaillés oubliés des Jeux olympiques
Le moment d’histoire. L’auteur Stéphane Gachet est parvenu à compiler les biographies des 1 266 champions olympiques français, de 1886 à nos jours. Dont celle des onze médaillés costarmoricains.
En 2005, Stéphane Gachet a « mis le doigt dans l’engrenage ». Cette année-là, ce professionnel de l’événementiel sportif apprend qu’un de ses homonymes a été médaillé d’argent en boxe, aux Jeux olympiques d’Anvers, en 1920. Il se découvre alors une âme d’historien.
Stéphane Gachet parvient à retracer la vie de Jean Gachet et se dit qu’il serait « injuste de ne pas le faire pour les autres ».
Six ans plus tard, il publie sa première bible des JO, avant une version plus aboutie, JO d’été : tous les médaillés français, de 1896 à nos jours, en novembre 2023.
Un travail « colossal », dans lequel il revient notamment sur les exploits de onze champions olympiques liés, de près ou de loin, aux Côtes- d’Armor. Extraits.
Pierre Salins, oublié de tous L’histoire est « totalement inédite », assure Stéphane Gachet. Au début du XXe siècle, Pierre Guyot d’Asnières de Salins suit une carrière militaire, de brigadier à capitaine. Membre du célèbre Cadre noir, de Saumur (Maine- et- Loire), il devient directeur de l’école de dressage équestre de Nantes, pendant la Première Guerre mondiale.
Il recevra la Légion d’honneur, en 1931, mais tout le monde a oublié que onze ans plus tôt, le Breton avait été sacré vice- champion de voltige équestre, aux JO d’Anvers (seule une partie de son nom de famille figure dans les bases de données les plus à jour).
Les communes de Saint-Avé, où l’homme est né (et où siège encore le château familial de Beauregard), et de Trébédan, où il est inhumé, « n’étaient pas du tout au courant, partage Stéphane Gachet. J’ai même appris à ses descendants qu’il avait été médaillé ».
« La plupart des fédérations n’existaient pas au début des JO, tente d’expliquer l’auteur. La mémoire du sport reposait sur les clubs et leurs
bénévoles, mais ceux- ci n’avaient pas forcément le souci des archives. »
Henry Peslier, le doyen des médaillés costarmoricains Henry Peslier est né à Uzel, en 1880. Fils de négociants en vins, il rejoint, très jeune, la capitale, où il intègre la Libellule de Paris. Le club de waterpolo (toujours en activité) est choisi pour représenter la délégation française aux JO de Paris, en 1900, lors desquelles il se hisse sur la troisième marche du podium. Henry Peslier est décédé en 1912, à seulement 32 ans.
Émile Poilvé, en or aux Jeux d’Hitler
Né à Mégrit et mort à Jugon-les-Lacs, Émile Poilvé est un pur produit breton. Formé au gouren, le Costarmoricain atteint le plus haut niveau en lut
te. Douze fois champion de France, il concourt à trois reprises aux Jeux olympiques, en 1928, 1932 et 1936. C’est lors de sa dernière participation, à Berlin, que le lutteur parvient à décrocher l’or.
« La légende raconte que les officiels nazis ont fait hisser le drapeau turc et jouer l’hymne égyptien, lors de la remise des médailles », révèle Stéphane Gachet.
Émile Poilvé est déclaré « Gloire du sport français », en 2000, par la Fédération des internationaux du sport français (FISF).
Trois Trébeurdinais d’adoption s’illustrent aux JO de Paris
L’un avait acquis le château de KerNelly. L’autre avait fait construire une demeure, près de Pors-Termen. Le troisième était propriétaire du manoir de Lan-Kerellec. Henri Mialaret, Félix Marcotte et Pierre Gervais avaient en
commun cette attache à Trébeurden et la passion de la voile. Une passion qui les mènera à une médaille (chacun dans une équipe différente), aux JO de Paris, en 1900.
« Ces Jeux ont été couplés avec l’Exposition universelle de Paris, ils sont passés inaperçus au niveau de la voile, note Stéphane Gachet. Les médailles ont été attribuées longtemps après, dans une quasi-indifférence. Il est très probable que les trois résidents trébeurdinais n’aient jamais su qu’ils avaient gagné. »
JO d’été : tous les médaillés Français de 1896 à nos jours, de Stéphane Gachet (Édition Talent Sport). L’auteur animera une conférence sur les médaillés olympiques bretons, à la mairie de Trébeurden, samedi 23 mars, à 20 h.