Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

La légende d’un symbole national : le camembert

-

C’est l’un de nos fromages les plus populaires et l’un des plus connus à l’étranger. On dit qu’une paysanne d’un petit village du pays d’Auge, nommé Camembert, aurait caché pendant la période révolution­naire un prêtre réfractair­e. Originaire de la Brie, ce dernier aurait appris à la jeune fermière à fabriquer un fromage à pâte molle et à croûte fleurie du type de celui produit dans sa région.

En réalité, Camembert était déjà connu pour des fromages similaires depuis la fin du XVIIe siècle. En 1702, Thomas Corneille, le frère du célèbre dramaturge, notait « qu’il se tient à Vimoutiers tous les lundis un gros marché où l’on apporte les excellents fromages du pays de Camembert ».

Napoléon III, un habitué

Selon une autre légende, Victor Paynel, le petit-fils de Marie Harel, aurait offert un camembert à Napoléon III. L’empereur était venu dans la région pour inaugurer la ligne de chemin de fer Paris- Granville. L’histoire dit que le souverain se serait régalé et qu’il aurait passé régulièrem­ent commande de camemberts, ce qui aurait assuré la promotion du produit dans tout le pays.

En revanche, ce qui ne relève pas de la fiction est le rôle majeur joué par

le chemin de fer dans le désenclave­ment de la région et l’essor de son économie agro-alimentair­e. Grâce au transport par train, les production­s fromagères du pays d’Auge et du

pays de Bray pouvaient parvenir rapidement à Paris et satisfaire une clientèle à la fois très nombreuse et exigeante sur la qualité des produits. À l’origine, le camembert faisait le voyage sur un lit de paille, mais dans les années précédant l’entrée dans le XXe siècle, on commença à utiliser la mythique boîte ronde en bois de peuplier.

Produit dans le monde

Pendant la Grande Guerre, le camembert contribua à nourrir les Poilus : le syndicat des producteur­s normands avait eu la bonne idée de proposer à l’armée des prix attractifs. Mais l’offre ne parvenant pas à satisfaire la demande, d’autres régions – la Bretagne puis le Centre et la Lorraine – se mirent, elles aussi, à fabriquer des camemberts. Après le conflit, le Canada, les États- Unis et d’autres pays étrangers se lancèrent dans la production. Non protégée, la dénominati­on camembert pouvait, et peut toujours, être utilisée dans le monde entier. Mais en 1983, la typicité du « camembert de Normandie » (qu’il ne faut pas confondre avec « fabriqué en Normandie ») a été reconnue par une AOP. Il doit être élaboré à partir de lait cru collecté dans une zone précisémen­t délimitée et être moulé à la louche manuelleme­nt (le caillé est déposé dans les moules en cinq couches successive­s). Avec 6 000 tonnes en 2021, cette AOP représenta­it toutefois moins de 5 % de la production française de camemberts.

 ?? | PHOTO : COLLECTION PARTICULIÈ­RE. ?? Une étiquette de l’emblématiq­ue fromage normand.
| PHOTO : COLLECTION PARTICULIÈ­RE. Une étiquette de l’emblématiq­ue fromage normand.

Newspapers in French

Newspapers from France