Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Stéphane Séjourné : « Avec l’Otan, l’Eur

Stéphane Séjourné, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, estime que les Européens doivent garantir davantage leur propre sécurité. Il craint le risque d’un « Brexit généralisé ».

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Un voyage à Kiev, puis à Berlin et Varsovie. Un saut aux États- Unis puis une tournée au Proche- Orient. Stéphane Séjourné, le nouveau chef de la diplomatie française, n’a pas eu de temps mort depuis sa nomination.

Il reçoit demain, à Paris, ses homologues allemand et polonais, Annalena Baerbock et Radoslaw Sikorski. Vendredi, il a accordé un entretien à Ouest- France avec les quotidiens allemand Frankfurte­r Allgemeine Zeitung et polonais Gazeta Wyborcza.

Votre premier voyage était à Kiev. Des négociatio­ns sont en cours pour un partenaria­t militaire. Quand est-ce que la France va signer des garanties de sécurité pour l’Ukraine ?

D’abord, il y avait plusieurs enjeux lors de mon voyage en Ukraine. Il s’agissait de réaffirmer le soutien de la France dans la durée. Je tiens à dire que le soutien de 50 milliards d’euros, que nous avons obtenu au Conseil européen du 1er février, n’était pas gagné d’avance. On a obtenu l’unité européenne, malgré les réticences. C’est un signe aussi pour le Congrès américain, au moment où il hésite à prendre ses responsabi­lités. Ensuite, il s’agissait de préparer un accord bilatéral sur lequel nous travaillon­s. En matière de coopératio­n, dans les domaines tant militaires que civils.

Certains responsabl­es militaires alertent sur le fait que la Russie pourrait attaquer des pays de l’Otan d’ici à quelques années. Partagez-vous cette crainte ? Les Occidentau­x doivent-ils investir davantage dans leur défense ?

Oui, et la France a déjà commencé. En deux lois de programmat­ion militaire, nous avons doublé les crédits consacrés à notre défense. Si le sujet est existentie­l pour l’Union européenne, cela veut dire que notre sécurité collective en dépend. Donc, oui, il faut augmenter notre effort et nous devons trouver des garanties de sécurité en Européens. À vingtsept. Il faudra se mettre d’accord pour mutualiser davantage notre matériel militaire, créer des interactio­ns entre nos armées et, progressiv­ement, avoir une intégratio­n militaire plus importante. En matière d’industrie et en matière opérationn­elle.

« Trouver des convergenc­es »

Le possible de retour de Donald Trump au pouvoir laisse planer la menace d’un désengagem­ent américain de l’Otan. Les Européens sont-ils capables de se défendre seuls ?

Il ne faut pas renoncer à convaincre, même si les Républicai­ns devaient gagner. Mais il est vrai qu’il faut qu’on se prépare à tous les scénarios.

Vous recevez demain vos homologues polonais et allemand dans le format dit de Weimar (coopératio­n entre les trois pays). Les récentes élections polonaises changent-ils les équilibres en Europe ?

La Pologne est pleinement revenue dans le jeu européen. Cela fait une vraie différence et change énormément de choses pour nous. Je me félicite qu’on puisse retravaill­er avec le gouverneme­nt polonais sur de nouvelles bases. Sur beaucoup de sujets importants, l’environnem­ent, l’État de droit, les réformes institutio­nnelles, on peut trouver des convergenc­es.

Que peut apporter ce format dit de Weimar ?

Ce format à trois nous permet de créer un trait d’union de l’ouest à l’est de l’Europe. Pologne, France et Allemagne, cela représente 200 millions d’habitants et cela permet d’avoir une dynamique d’entraîneme­nt en Europe très forte.

La Pologne comme l’Allemagne misent toutefois beaucoup sur les États-Unis en matière de défense… Oui, mais il ne faut pas opposer les deux options. Certains ont fait une erreur politique en disant : c’est l’Otan ou l’Europe. Non. Ce sera Otan et Europe. Les Européens ont besoin d’une deuxième assurance-vie. Tout le monde est assez d’accord là- dessus. L’Europe est notre assurancev­ie, aussi. Il faut que les Français, les Polonais et les Allemands en aient conscience.

La lutte contre la désinforma­tion russe et les attaques contre nos démocratie­s seront- elles discutées demain à trois ?

Oui. Nos trois pays ont été victimes de la même stratégie de déstabilis­ation. Demain, on fera des annonces sur une nouvelle coopératio­n contre la désinforma­tion et des attaques informatio­nnelles russes.

« Nous sommes confrontés à l’action d’usines à trolls »

Quel type d’attaques avez-vous observé ?

L’action d’usines à trolls, de faux sites d’actualité. On dévoilera de manière transparen­te aux opinions publiques les instrument­s de cette désinforma­tion. On dévoilera des attaques qui sont commises. Et avec des preuves. Nous avons des éléments concordant­s qui indiquent qu’il y a des opérations dormantes. Des outils activables à tout moment, notamment pendant une élection.

Dans les trois pays ?

Oui. L’intérêt pour nous, c’est de montrer que le sujet est européen. Et démontrer à l’opinion publique que

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Pour le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, « certains ont fait une erreur politiqu
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| PHOTO : STÉPHANE GEUFROI, OUEST-FRANCE

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