Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Le match d’avant, mais pas le moins important
Le Stade Rennais promet qu’il ne songe pas déjà à son barrage aller de Ligue Europa à Milan, jeudi. Il a tout intérêt, car un cinquième succès de rang en Ligue 1 serait tout bonus au classement…
Regarder Le Havre sans apercevoir Milan, ou parler du pain quotidien sans évoquer le gala, a été un exercice aussi difficile qu’amusant, vendredi en conférence de presse.
Pour les acteurs aussi, d’ailleurs, même si la gymnastique de communication a été bien orchestrée par Julien Stéphan et Arthur Theate, qui se sont succédé face aux micros. C’est le jeu, aussi, quand l’odeur des grands matches européens arrive : le Stade Rennais ne le découvre pas non plus.
« Est- ce qu’on a déjà discuté du Milan ? Pas du tout ! », ont donc répondu en choeur l’entraîneur et le défenseur belge. Stéphan : « On a fait un retour du match de Sochaux vendredi matin, en se projetant sur Le Havre, et uniquement dessus. Chaque chose en son temps. On prend très au sérieux cette équipe, et on a suffisamment de travail pour l’instant dans la préparation de ce match… »
Même pas une petite pensée parasite, qui viendrait perturber la concentration du jour, ou amènerait à se dire que là, vraiment, comme pour Le Fée, ce n’est vraiment pas le moment de se blesser ? « Honnêtement, non, insiste Theate. On est 100 % focus sur Le Havre, on sait à quel point ce match-là est important. »
Il l’est, effectivement. Parce que déjà, un succès permettrait dans l’immédiat de doubler un OM dans le dur, peut- être même aussi Reims (selon son résultat à Lorient), pour se hisser à cette 7e place possiblement qualificative pour l’Europe (on y revient toujours) en fin de saison.
Joue-la comme l’Inter, Arsenal et City !
Une victoire donnerait une portée supplémentaire à l’idée de « Rennesmontada ». Elle renforcerait la dynamique collective avant l’Italie, et entretiendrait l’espérance d’un printemps qui n’aurait même pas besoin d’un exploit contre Milan pour devenir haletant.
Stéphan l’a d’ailleurs un peu dit, d’une autre façon : « Les joueurs ont bien conscience de la nécessité de poursuivre notre dynamique, et il n’y a pas de hiérarchie dans les compétitions, on ne priorise absolument pas le match de Milan sur celui du Havre. »
Jouer cette après-midi sans arrièrepensée ressemble de toute façon à une quasi- obligation pour le Stade Rennais, vu le piège qui menace (lire ci- dessous) et le peu de marge de cette équipe aussi, en dépit de tout ce qu’elle a fait de bien depuis janvier.
Invaincus depuis le 14 décembre et la venue de Villarreal en Ligue Europa, campés sur une série de cinq victoires (dont quatre à la suite en L1) et deux nuls (on compte comme tel le match de l’OM en Coupe de France), les Bretons doivent bichonner ces instants précieux pour qu’ils perdurent. En Europe, seuls l’Inter Milan, Arsenal, Manchester City… et Rennes ont remporté tous leurs matches de championnat cette année.
Bon, le record historique de 2006 (10 victoires de rang) sera difficile à aller chercher, mais la fortune sourit davantage aux audacieux qu’aux timorés. « Il y a de la satisfaction par rapport à ces résultats, mais aussi de l’alerte, car plus la série s’allonge, plus il y a le risque de tomber dans une forme d’autosatisfaction qui pourrait être dangereuse, dit le toujours tempéré Julien Stéphan. Je n’ai pas eu à lutter contre ça pour l’instant, car le groupe est lucide par rapport à la situation, aux données du moment. Et je l’ai déjà dit, car il y a une farouche volonté chez les joueurs de se rattraper de la première partie de saison. »
Le goût de la revanche peut être un moteur puissant dans le sport. Puisse-t-il se ressentir encore aujourd’hui, et se prolonger après Milan aussi…