Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Entre la Normandie et les Pays de la L
Les deux régions possèdent une belle variété de production légumière. Entre les carottes de Créances et les échalotes d’Anjou, il y en a pour toutes les fourchettes.
En 2020, les terres consacrées à la production de légumes en Normandie ne représentaient que 2 % de la surface légumière de la France. Mais sur quatre poireaux produits dans notre pays, un était normand ! Même si ses surfaces ont beaucoup diminué, la carotte représentait encore 13 % de la production française, et la proportion était identique pour le navet. Les autres légumes phares de la région sont les choux, les salades, les oignons et échalotes, les betteraves potagères. Le climat doux permet de produire la plupart d’entre eux pendant l’automne et l’hiver. Deux légumes normands sur trois sont cultivés dans le Cotentin ainsi que dans la région de la baie du Mont- Saint- Michel.
À Créances, carottes des sables et poireaux
La carotte des sables de Créances est cultivée sur le littoral occidental du Cotentin, dans des terres sablonneuses situées en bord de mer, les « mielles ». Ce sol meuble très filtrant (il n’est jamais gorgé d’eau) ne crée aucun obstacle pour les racines, ce qui explique que la carotte soit aussi droite et lisse. Outre la terre, le climat doux, les vents du large chargés d’embruns et les amendements de varech confèrent aux carottes leur caractère particulier : un goût fin et sucré, l’absence de coeur fibreux, une texture croquante et fondante. Cette excellence a été reconnue dès 1967 par l’attribution d’un Label rouge. Le cahier des charges de ce signe officiel de qualité a été rénové en 2022 de façon à lui ajouter une composante environnementale.
La production culmine dans les années 1950
La carotte des sables de Créances peut être conservée dans le sol pendant tout l’hiver : en novembre, afin de protéger les racines du froid et du gel, les parcelles sont recouvertes d’une couche de paille. Cette protection permet de récolter, à la main, des carottes fraîches au jour le jour et évite, de ce fait, de devoir les stocker en chambre froide.
Le développement de la carotte de Créances et des autres légumes cultivés localement date du début du XXe siècle : c’est en 1919 qu’ont été initiées les premières expéditions vers les Halles de Paris. La production a culminé dans les années 1950 avec 6 000 ha de culture, mais, aujourd’hui, ce chiffre est tombé à 1 000 ha.
Les producteurs de légumes de la région de Créances cultivent également le poireau. Au XIIIe siècle, ce légume était déjà un produit local réputé, aux côtés des carottes, navets, oignons et aulx. Détenteur d’une IGP (Identification géographique protégée), le « poireau de Créances » se caractérise par sa grande taille et, surtout, par ses qualités gustatives reconnues ( tendreté, goût de noisette légèrement sucré). Celles- ci sont attribuées, comme pour les carottes, aux sols sableux, aux embruns marins et au fait que, grâce au climat suffisamment doux, le poireau puisse demeurer en pleine terre. En dehors de ses usages traditionnels (poireau vinaigrette, soupe, quiche, pot- au- feu, etc.) , il est souvent proposé comme accompagnement des coquilles Saint- Jacques ou du saumon.
Parmi les variétés anciennes de poireaux cultivées en Normandie, on trouve dans l’édition 1883 des Plantes potagères de Vilmorin-Andrieux la mention du « très gros de Rouen » qui se distingue par son fût « court et très gros » ainsi que le « poireau monstrueux de Carentan » (sud- est du Cotentin) dont le pied est encore plus spectaculaire (jusqu’à 8 cm de diamètre) et dont les qualités gustatives sont appréciées.