Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Trésor du breton écrit
Richesse de la langue bretonne, tous ces mots spécifiques qui caractérisent les nuages.
Je suis tombé des nues ! J’apprends que le mot nuage (collectif de nue) n’est utilisé que depuis le XIXe siècle. De plus il n’y a qu’un mot en français pour désigner ces amas de gouttelettes volantes qui affectionnent la Bretagne. En breton, nous avons dix mots pour caractériser les nuages ! Une richesse qui mérite d’être mise en avant.
Le mot le plus courant est koumoul, qu’on connaît depuis 1530. C’est le même en gallois, il est lié à komol qui signifie obscurité. Pa doull ar c’houmoul d’ar sav-heol e vezont o c’houl glav (Quand les nuages se déchirent à l’aube c’est qu’ils annoncent la pluie) dit la sagesse populaire.
Le mot koabrenn est lui noté dès 1499 et il a un sens général, on peut comme en français lui ajouter des adjectifs : koabrenn wenn, zu, dev, teñval… (Nuage blanc, noir, épais, sombre). Certains les désignaient comme duadennoù, gwennadennoù, teñvaladennoù (les noirauds, les blanchots, les sombreurs).
Pour distinguer les nuages, le britannique Howard a inventé les mots cirrus, stratus, cumulus, nimbus en 1802. Mais le breton avait déjà tout ce qu’il faut ! Stratus, ces nuages fins d’altitude qui voilent le soleil, se dit lizenn, ce mot est employé au figuré dans cette très belle expression War e spered en em skigne ul lizenn a velkoni (Un voile de mélancolie embuait son esprit).
Le nimbus, nuage sombre et épais se dit malkenn. En général il n’annonce rien de bon comme l’indique le dicton : Malkenn ruz diouzh ar mintin, kurun d’abardaez (Nimbus rouge le matin, tonnerre l’après- midi). D’autres nuages sont plus sympathiques : Koc’henn désigne les nuages grisâtres du matin : Pa vez koc’henn rouz diouzh ar mintin e vez brav an deiz ( Quand il y a des nuages rougeâtres le matin c’est qu’il va faire beau). Kaouled désigne des cirrocumulus plus connu sous le nom de deñvedigoù ou deñved bihan (petits moutons).
Et les traînées dans le ciel, les cirrus, sont désignées comme des queues de chats (lostoù-kizhier) ou encore flipoù-avel (chiffons de vents) et ces impressionnants cumulo-nimbus en forme d’enclume qui nous donnent les giboulées de mars, se nomment Kastell (château).
Je terminerai par cette belle expression C’hoarzhadenn ar Werc’hez (sourire de la Vierge) traduite par « éclaircie du temps le samedi aprèsmidi du pardon ». Qu’on n’aille pas nous dire que le breton n’est pas une belle langue !