Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Le trésor des Templiers repose-t-il dans la Sarthe ?

Légendes et fantômes de l’Ouest. Disparue depuis des siècles, la richesse amassée par l’ordre du Temple pourrait se trouver dans les ruines du château de Juillé, à quelques kilomètres du Mans.

- Françoise SURCOUF.

Le 18 mars 1314, Jacques de Molay, dernier grand maître de l’ordre du Temple, et Geoffroy de Charnay, précepteur de Normandie, sont arrachés des cellules où ils croupissen­t et jetés dans une charrette.

Traînés à Paris sur l’île aux Juifs, ils y seront condamnés au bûcher. L’événement marque la fin de sept ans de procédures et de tortures qui ont opposé, dans un bras de fer ignominieu­x, le roi Philippe IV le Bel aux puissants chevaliers de l’ordre des Templiers. Peu de temps auparavant, les moines guerriers prenaient place parmi les princes de sang. Soudain, ils sont accusés d’hérésie, de sacrilège et de sodomie.

La chute du Temple

Quelques années plus tôt, le vendredi 13 octobre 1307, cette mystérieus­e et fascinante organisati­on s’écroulait tel un château de cartes. Avec cette disparitio­n, s’envole aussi le secret de leur inestimabl­e trésor. Les Templiers étaient, en effet, riches. Très riches.

Héritier des sciences orientales découverte­s durant son long séjour en Terre sainte, l’ordre a accumulé une fortune considérab­le, notamment par la voie de ses opérations bancaires particuliè­rement novatrices. Leurs commanderi­es servent de coffresfor­ts et de lieu de dépôt. Ils recouvrent également les dettes, assurent les transports de fonds et diffusent les chèques sous forme de « lettre de change ». Une première.

Au fil du temps, les Templiers sont devenus les plus importants bailleurs de fonds du roi Philippe qui, un jour, décide de jeter sur eux ses filets afin de ne pas avoir à les rembourser. Comme il craint que la rumeur ne les avertisse de ses intentions, il inaugure la première « opération de police » de l’histoire de France en les faisant tous arrêter le même jour. C’est lui, en personne, à la tête de ses hommes d’armes, qui investit le Temple de Paris.

Hélas, la forteresse de la finance lui réserve une amère désillusio­n. Armoires et coffres jonchent les salles dévastées, mais d’un éventuel trésor, il n’y a pas la moindre trace.

Aujourd’hui, non loin du Mans (Sarthe), dans la commune de Juillé, une

vieille tour se dresse près d’un château en ruine. La légende raconte que, dans les souterrain­s du donjon, un caveau s’ouvre aux douze coups de minuit, le jour de Noël. Il permet d’accéder à une sorte de grotte où seraient entreposée­s les richesses de l’ordre des Templiers.

Un secret de famille

Au XVIIe siècle, Jean de Faudoas, nobliau ruiné, eut vent d’un secret gardé dans sa famille. L’un de ses ancêtres, Hubert, était intendant du grand maître du Temple, tué lors du siège de Saint- Jean- d’Acre (Israël actuel) en 1291, Guillaume de Beaujeu.

Avant de rendre l’âme, ce dernier aurait demandé à ses compagnons de prendre sous leur aile celui qu’il considérai­t comme son fils et d’en faire un chevalier. Hubert de Faudoas, devenu l’un des leurs, fut chargé de la garde du trésor de l’ordre.

De retour en France, alors que la tension montait autour des Templiers et que les attaques du roi contre eux se faisaient de plus en plus précises, il aurait

dissimulé l’or amassé et ramené depuis l’îlot forteresse d’Arwad, en Syrie, afin de le soustraire aux prétention­s royales.

Mais, avant de gravir lui-même les marches du bûcher, il aurait eu le temps de confier son secret à l’un de ses descendant­s : les richesses templières seraient cachées dans les souterrain­s du château de Juillé. Depuis, de génération en génération, les fils aînés se transmetta­ient la confidence sans qu’aucun n’ait jamais tenté cette aventure jugée risquée.

La nuit de Noël

En effet, la légende racontait qu’Hubert de Faudoas lui avait ramené de Terre sainte un magicien arménien, qui possédait le pouvoir de faire ouvrir et fermer les portes uniquement par la vibration d’une cloche.

Il lui avait demandé d’utiliser ce procédé magique pour ouvrir et clore le caveau secret qu’il avait fait aménager dans le château de Juillé. La paroi s’ouvrant ainsi au son du bourdon de l’église voisine une seule fois dans l’année, à minuit, le jour de Noël. Mais l’ouverture ne durait que le temps de la résonance…

À la fin du XVIe siècle, Henri IV fit détruire le château de la famille de Faudoas, accusée de conspirati­on. Le donjon fut cependant épargné. Plus d’un siècle après cette démolition, Jean de Faudoas, descendant d’Hubert, était donc dépositair­e du fameux secret de cette famille, tombée dans l’extrême pauvreté. Bien que connaissan­t le risque de rester enfermé dans la cave du trésor, il décida d’aller, lors d’une nuit de Noël, récupérer une partie du trésor du Temple afin de pouvoir nourrir les siens.

Ne pouvant partager son secret, il demanda à André, son plus proche ami, de venir voir, en cas de disparitio­n le lendemain de Noël, s’il avait laissé une trace de son passage dans le vieux donjon. À l’heure dite, Jean ne réapparut pas. Fidèle à sa promesse, André gagna discrèteme­nt le vieux donjon et descendit dans les caves. Luttant contre sa peur, il pénétra dans le caveau vide qu’il entreprit d’explorer.

Horreur ! Au pied de la paroi qui présentait une fissure, se trouvaient des doigts sectionnés net à hauteur de la première phalange et, tout à côté, un calice rutilant de tous feux. Paniqué, il s’en empara, remonta et fila sans demander son reste. Terrifié à l’idée de posséder un objet potentiell­ement ensorcelé, il fit don du ciboire au curé du village.

Ce dernier le remit à l’évêque du Mans qui le fit expertiser par des orfèvres. L’objet était façonné en moldavite, une pierre précieuse ayant servi à tailler le Saint Graal, vase sacré qui aurait recueilli le sang du Christ. Ne sachant que faire, l’évêque du Mans envoya le précieux calice au Pape… Aujourd’hui, le mystère du trésor du Temple est-il toujours enfoui sous les ruines du vieux château ?

 ?? | PHOTO : OLDLION, CC BY-SA 4.0 ?? L’édifice gallo-romain heptagonal de Juillé (Sarthe), où se trouve la mairie.
| PHOTO : OLDLION, CC BY-SA 4.0 L’édifice gallo-romain heptagonal de Juillé (Sarthe), où se trouve la mairie.
 ?? | PHOTO : ARCHIVES OUEST-FRANCE ?? Derrière la tour à sept pans, une mystérieus­e porte d’entrée.
| PHOTO : ARCHIVES OUEST-FRANCE Derrière la tour à sept pans, une mystérieus­e porte d’entrée.

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