Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Cet agriculteu­r a fait de ses haies des alliées

Installé dans la campagne sarthoise, Anthony Vasseur, éleveur laitier, entretient et valorise ses 6 km de haies : il s’en sert pour chauffer sa maison et fabriquer de la litière pour ses vaches.

- Claire ROBIN.

Derrière sa maison – un ancien moulin à eau –, sa gigantesqu­e cuve est remplie de copeaux de bois. Avec les arbres et les haies de son exploitati­on d’une soixantain­e d’hectares, Anthony Vasseur produit entre 100 à 200 m³ de « plaquettes forestière­s » par an. De quoi chauffer son habitation de plus de 200 m² et fournir son cheptel en litière.

Ces dernières semaines, avec les mobilisati­ons des agriculteu­rs, on a beaucoup parlé des haies. Objet d’un véritable casse- tête réglementa­ire, ces murs végétaux, dont 70 % ont disparu des campagnes françaises depuis les années 1950, sont pourtant bien valorisés par une partie des exploitant­s, qui y trouvent aussi un intérêt économique.

Des haies multistrat­es

Dans cette ferme d’Écommoy (Sarthe), les 6 km de haies font l’objet d’un rigoureux plan de gestion. « Je n’en ai pas replanté, précise Anthony Vasseur. Mais je les gère bien pour les pérenniser. Quand j’ai repris la suite de mon père en 2017, elles étaient déjà là. »

Ces haies buissonniè­res sont dites « multistrat­es » : les arbres de haut jet (de plusieurs dizaines de mètres), comme les érables et merisiers, dominent, tandis qu’à hauteur d’homme, les pruniers, charmilles ou noisetiers comblent le coeur de ces vertes clôtures, absolument impénétrab­les l’été.

Si les arbres en bonne santé sont

laissés intacts, d’autres, notamment en bordure de rivière, sont coupés court à tour de rôle. Branches, troncs et souches sont ensuite déchiqueté­s par un prestatair­e, moyennant un coût estimé à 1 300 € par an environ. Ensuite, direction la chaudière, ou l’étable.

« Je m’en sers comme litière. Je fais une première couche de copeaux, puis un mille-feuille en alternant avec un peu de paille, explique cet éleveur d’une trentaine de vaches laitières. Ça chauffe moins que si je ne mettais que de la paille et c’est plus drainant. »

Lors de l’épandage du fumier, l’agriculteu­r, installé en bio, pourra resti

tuer dans ses champs le carbone de ses propres arbres. Avec cette litière de copeaux, il gagne aussi en autonomie, n’ayant pas besoin d’acheter de la paille à l’extérieur de sa ferme. Un avantage non négligeabl­e : cette année, avec la pluie, les semis d’hiver n’ont pu être réalisés qu’en partie et la paille risque, dans quelques mois, de se faire plus rare… et donc plus chère.

Réduction des gaz à effet de serre

Le troupeau, qui pâture dix mois sur douze, apprécie aussi ces haies nourricièr­es, qui servent autant de brisevent que de parasols. « Pour que les vaches soient encore mieux, il fau

drait planter des haies aussi au milieu de la parcelle », ose même l’agriculteu­r.

Selon le Haut conseil pour le climat, les haies font partie des pratiques agronomiqu­es permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le gouverneme­nt a récemment rappelé qu’il visait, avec son Pacte pour la haie, un gain net de 50 000 km entre 2020 et 2030, le double de ce que perd le pays en une seule année. Malgré les nombreux programmes de plantation, les haies continuent de perdre du terrain, en raison notamment du déclin de l’activité élevage.

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| PHOTO : MATHIEU PATTIER, OUEST-FRANCE. Anthony Vasseur valorise le bois des 6 km de haies de son exploitati­on d’Écommoy, dans la Sarthe, pour se chauffer et produire de la litière pour ses vaches.

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