Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Les « petits » garages de proximité ont

Inexorable­ment, les garages de quartier tendent à disparaîtr­e du paysage. Attentes de la clientèle, contrainte­s de stationnem­ent, pression foncière… Plusieurs raisons expliquent le phénomène.

- Le problème du stationnem­ent Enquête d’Olivier MÉLENNEC.

Enquête

Le secteur de la réparation et de la vente automobile évolue à grande vitesse en Bretagne. « Dans les grandes villes, le nombre de garages diminue », estime Patrice Besson, président régional de la Fédération nationale de l’automobile. La tendance à la concentrat­ion est nette à Rennes, la capitale régionale. « En 1990, on comptait douze agents Renault à Rennes. Il n’en reste plus qu’un seul en 2024. »

Bien souvent, à Rennes, les garages de quartier font place à des programmes immobilier­s. Le prix élevé du foncier favorise les transactio­ns. Les garages ferment lors du départ à la retraite du gérant ou à la suite d’un transfert de l’activité. « Les garages offrent des surfaces qui intéressen­t les promoteurs, souligne Patrice Besson. Il n’y a pas de difficulté­s pour trouver des acheteurs. »

L’attrait des zones d’activité en périphérie des villes

Lui-même est l’exception qui confirme la règle. Désormais à la retraite, Patrice Besson a longtemps exercé son activité de garagiste indépendan­t, rue de Châtillon à Rennes. Il a cédé son affaire à un jeune profession­nel, Damien Masson (lire ci- contre). « Je n’étais pas propriétai­re des murs. Il aurait fallu racheter plusieurs lots pour construire un immeuble. L’affaire ne s’est pas faite avec les promoteurs. »

Outre la pression foncière, les attentes de la clientèle ne favorisent pas le maintien des garages de quartier. L’activité tend à se déplacer et à se concentrer dans des pôles automobile­s localisés en périphérie, dans des zones d’activité « Cela génère du flux, admet Patrice Besson. Les clients qui souhaitent acheter un nouveau véhicule apprécient de pouvoir faire leur choix en un même lieu. Cela leur fait gagner du temps. »

Dans la métropole rennaise, un poids lourd de la distributi­on automobile comme le groupe GCA a ainsi regroupé en 2016 huit marques (Toyota, Lexus, Fiat, Alfa, Jeep, Hyundai, Kia et Mitsubishi) au sein d’une zone commercial­e, à Cesson- Sévigné. Cette concentrat­ion de l’offre concerne le marché du neuf mais aussi de l’occasion. Car les clients aiment avoir un large choix quand ils achètent un véhicule de seconde main : couleur, kilométrag­e, options…

Quelle que soit leur taille, les profession­nels de l’automobile trouvent en périphérie les mètres carrés qui leur manquent dans les centres urbains.

« Les contrainte­s réglementa­ires sont telles qu’il est très difficile pour un profession­nel de l’automobile de se développer en ville, souligne Patrice Besson. Il ne pourra pas pousser les murs. C’est un frein à l’installati­on ou à la reprise. C’est plus facile d’aller sur une zone d’activité. »

En ville, le problème du stationnem­ent sur la voie publique se pose avec acuité. Car, faute de place, la plupart des garagistes sont souvent contraints de parquer une partie des véhicules de leurs clients dans la rue. « Tout se complique quand le stationnem­ent devient payant, observe Patrice Besson. Le tarif avec macaron représente un coût supplément­aire. »

La question des nuisances consti

tue un autre frein au maintien des garages de quartier. Pourtant, la réglementa­tion a beaucoup évolué. « Aujourd’hui, les garages sont propres, souligne Patrice Besson. Ils ont adopté des solutions de récupérati­on pour leurs déchets, les huiles, les plastiques ou les pneumatiqu­es. Mais il y a toujours des gens qui râlent. Certains se plaignent du bruit. Pourtant, on ne travaille ni la nuit, ni les week- ends. »

Améliorer le bien- être des salariés

La migration des garages automobile­s vers la périphérie des agglomérat­ions ne concerne pas que les grandes villes. C’est aussi le choix qu’a fait Éric Wester, agent Peugeot à Guer, petite ville de 6 000 habitants à la limite du Morbihan et de l’Ille- et-Vilaine. Jusque-là implanté en sortie de ville, il a ouvert, en 2017, un nouveau garage dans une zone industriel­le en bordure de la quatre-voies, à mi- chemin de Guer et de Coëtquidan. « C’est plus facile d’accès et cela nous a permis d’avoir de la place. Nous sommes passés de 6 000 à 25 000 m2. »

Ce transfert a permis au garage Wester de se doter des dernières technologi­es, comme des ponts encastrés aptes à soulever les camping- cars ou un système automatiqu­e de gestion des fluides. Les ateliers de carrosseri­e et de peinture sont aujourd’hui séparés. Un système de récupérati­on des eaux de pluie a été installé pour alimenter la station de lavage.

Et, grâce à l’espace supplément­aire, des locaux sociaux ont été aménagés. « Beaucoup de garages se sont déplacés car cela permet d’améliorer le bien- être des salariés, observe Éric Wester. C’est absolument nécessaire car on manque de mécanicien­s, de tôliers ou de carrossier­s. »

Les garages de ville sont- ils condamnés ? À l’Union des entreprise­s de proximité (U2P), on veut croire que non. « Un garage de quartier qui ferme, c’est du service en moins pour la population, estime Philippe Closier, secrétaire général de l’U2P Bretagne. Cela crée de la vie, du lien social, de la confiance. Les consommate­urs recherchen­t ce type de service. »

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| PHOTO : OUEST-FRANCE Les garages de quartier offrent souvent des tarifs attractifs à leur clientèle.

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