Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Face au cancer, elles ripostent grâce à l’escrime

Le programme Solution Riposte a été lancé en octobre à Matignon. Cette pratique sécurisée de l’escrime permet aux femmes touchées par le cancer du sein de dépasser la maladie. Et bien plus.

- Thibault BURBAN.

« En garde ! » Dans la salle des TerreNeuva­s de Matignon, Thierry Le Prisé mène la danse, ce mercredi après-midi. Face au maître d’armes, six escrimeuse­s suivent avec attention les consignes, comme chaque semaine. « Ce n’est qu’après la parade que vous pourrez riposter. »

Sous les masques, un mix de concentrat­ion et de sourires se lit sur les visages. Depuis octobre, le club Matignon – Saint- Cast-Le- Guildo escrime propose des cours adaptés aux femmes souffrant d’un cancer du sein, dans le cadre du programme développé par l’associatio­n Solution Riposte.

« Au départ de cette aventure, il y a plus de dix ans, c’est Dominique Hornus, anesthésis­te et escrimeuse, qui a décidé de développer, avec l’aide de la faculté de médecine de Toulouse, un programme d’accompagne­ment thérapeuti­que », rembobine Thierry Le Prisé, qui se trouvait à la tête de la Ligue de Bretagne quand les ateliers ont démarré. Comme lui, ils sont désormais près de 300 maîtres d’armes à avoir suivi la formation dispensée en Haute- Garonne.

Mobilité, coordinati­on, concentrat­ion…

« C’est super d’avoir ce type de propositio­n près de chez nous, soulève Brigitte, 68 ans, de Saint- Cast- LeGuildo. Parce qu’aller jusqu’à Dinan, avec la route… » Opérée en 2021, cette « riposteuse » a eu vent de cet atelier via la Ligue contre le cancer. « Je n’aurais jamais choisi ce sport à la base mais c’est très convivial, souligne- t- elle. L’escrime mérite d’être connue. On ne s’imagine pas aux Jeux olympiques mais cela fait

appel à la mémoire, à la coordinati­on et idéalement à la rapidité (rires) ! »

Cet atelier a vu le jour après la demande de Claire Presset, membre du groupe Octobre rose à Saint- CastLe- Guildo. La première année est gratuite pour les pratiquant­es.

Les entraîneme­nts sont élaborés en prenant en compte les limites dues à la chirurgie et les effets secondaire­s des traitement­s médicaux. « On pratique le sabre, on touche uniquement avec la lame, détaille Thierry Le Prisé. Pour se protéger, on fait de grands gestes. Cela mobilise le bras et l’épaule. Le but est d’améliorer la mobilité du côté opéré, afin que la vie quotidienn­e soit ensuite plus facile. »

Maryse, Castine de 64 ans, opine, tout en manipulant son arme en plas

tique : « Cela nous oblige à bouger. J’ai eu une ablation totale. Mon bras restera toujours un peu lourd. Mais quand je suis ici, j’oublie que j’ai un handicap. »

« On oublie les douleurs et les tracas »

Étirements, rappel des apprentiss­ages précédents, petits jeux… L’heure et demie file à toute allure. Le groupe en est déjà à sa vingtième séance. Des complicité­s ont vu le jour.

« Au début, j’étais un petit peu frileuse parce que je pensais que ce n’était pas fait pour moi, glisse Maryse. Finalement, ça fait du bien dans tous les sens, moralement comme physiqueme­nt. » Après l’échauffeme­nt, les escrimeuse­s se parent de la tenue d’escrime, identique pour toutes, couvrant l’ensemble du buste.

« Dès le départ, il y a eu une bonne ambiance, poursuit Brigitte, de Matignon, opérée fin juin 2023. Le fait de faire ensemble, on oublie la douleur et les tracas qui l’accompagne­nt. C’est rare qu’on parle de la maladie. On forme une vraie équipe. »

« L’escrime reste un sport de combat, observe Thierry Le Prisé, maître d’armes depuis 1982. Derrière, il y a l’idée de se battre contre le cancer. » Et contre le repli sur soi qui va trop souvent de pair avec la maladie.

En venant dans la salle, les « riposteuse­s » s’offrent une bulle d’air. « Cela m’apporte un peu de soleil, confirme Maryse, toujours en traitement, qui a mis du temps à accepter son nouveau corps. Je fais en sorte de ne louper aucune séance ! »

 ?? | PHOTO : OUEST-FRANCE ?? Animées par l’expériment­é maître d’armes Thierry Le Prisé, les séances d’entraîneme­nts ont été pensées pour répondre aux besoins des femmes ayant eu un cancer du sein.
| PHOTO : OUEST-FRANCE Animées par l’expériment­é maître d’armes Thierry Le Prisé, les séances d’entraîneme­nts ont été pensées pour répondre aux besoins des femmes ayant eu un cancer du sein.

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