Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Russie, liberté pour les prisonniers politiques
Un simulacre d’élection se déroule en Russie. En effet, M. Poutine a éliminé ses opposants sérieux. Même Alexeï Navalny a été tué en détention, voici un mois, après des années d’atroces tortures. Le courage et la détermination tranquille de la foule se pressant pour lui rendre hommage lors de ses obsèques ont surpris et émerveillé le monde entier. Par milliers, ils ont envoyé ce précieux message : une autre Russie est possible. Si les larmes exprimaient leur peine, les fleurs manifestaient leur espoir.
Ils savaient qu’ils seraient fichés par les services secrets. Beaucoup ont déjà reçu l’ordre de mobilisation : ils sont envoyés à la mort. Certains ont été arrêtés, d’autres le seront peut- être. Tous n’iront sans doute pas en prison, mais ils seront surveillés. Aux uns, il sera refusé un travail. Aux autres, une promotion. Les portes des universités risquent d’être fermées pour leurs enfants.
Malgré cela, ils ont surmonté la peur comme Navalny. Au lieu de rester en exil, il est rentré dans son pays. Il a affronté la tyrannie avec la seule arme de la vérité et son sourire d’homme libre. Ce chrétien a offert sa vie en sachant le martyr qui l’attendait : « S’ils décident de me tuer, cela signifie que nous sommes incroyablement forts. La seule chose nécessaire au triomphe du mal est que les gens de bien ne fassent rien. Ne soyez pas passifs. »
Cet appel s’adressait aux Russes. Mais il retentit aujourd’hui dans nos consciences d’Européens. Où ira notre soutien ? À la tyrannie du régime de Poutine en reconnaissant le résultat de cette fausse élection ? Ou aux Russes oeuvrant au péril de leur vie pour une Russie libre et respectueuse du droit international ?
Ils sont plus nombreux qu’on ne le croit : « Si la grande majorité des Russes soutenait la guerre pourquoi a-t- on besoin de recourir aux répressions ? […] C’est plutôt un signe de faiblesse », a déclaré l’économiste Sergueï Guriev, sur France Culture.
N’abandonnons pas les prisonniers politiques. Ils sont en grand danger. Liberté pour Vladimir KaraMurza, condamné à vingt-cinq ans de prison, malade et privé de médicaments. Liberté pour Ilia Iachine, huit ans de prison pour avoir dénoncé les crimes de guerre de Boutcha. Liberté pour Alexeï Gorinov et les dizaines de milliers d’autres. Tous, emprisonnés pour s’être opposés aux mensonges d’État sur la guerre de la Russie contre l’Ukraine. Le prix
Nobel de la paix, Dmitri Mouratov, appelle à recourir à la Croix-Rouge qui ne leur « accorde pas la moindre attention », comme il le dit sur rts.ch. Cette mascarade électorale annonce l’intensification de la répression et de la guerre. Elle montre l’ignominie d’un régime criminel violant les frontières, tuant les civils, forçant les Ukrainiens occupés à voter pour la main qui les broie. Elle vise à légitimer M. Poutine alors qu’il est sous le coup d’un mandat d’arrêt international pour la déportation d’enfants ukrainiens.
Les démocraties ne sauraient donc reconnaître l’élection truquée de Poutine sans ruiner en plus la confiance que tant de peuples asservis mettent en elles. Mais elles doivent travailler à la libération des prisonniers politiques, seul espoir d’une Russie de liberté et de paix.