Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
Le homard, un crustacé solitaire et un
Les côtes de l’Atlantique et de la Manche sont riches en poissons, en coquillages et en crustacés. Parmi ces derniers, le homard est sans conteste le plus noble.
À partir de la fin du XIXe siècle, les touristes aisés dégustent le homard dans les hôtels- restaurants haut de gamme qui, presque tous, possèdent un réservoir à homards. Pourtant, quelques décennies plus tôt, sa chair était décrite comme « compacte, dure, coriace et indigeste » !
Le cardinal des mers
Le homard vit dans les eaux froides de l’Atlantique Nord : son nom vient de hummar, un mot norrois, une des langues autrefois parlées en Scandinavie. Dans l’Atlantique est, on pêche le homard « européen » : en France, il est souvent dénommé homard « breton » sur les étals, alors qu’il vient tout aussi souvent de Normandie, voire du Royaume- Uni ! Dans la partie ouest de l’océan, il s’agit du homard « américain », également appelé « canadien ». Ce sont deux espèces proches mais biologiquement différentes : le homard européen possède une carapace bleu violet avec des taches claires, tandis que son cousin d’Amérique a une couleur vert sombre, qui tire sur le marron. Ce dernier est aussi plus grand et plus commun que l’Européen, mais sa saveur est moins délicate
Le homard vit sur les fonds rocheux et sableux. Animal solitaire, il ne sort que la nuit, pour chercher sa nourriture. Carnivore, il se nourrit principalement d’animaux vivants ou morts (crabes, crevettes, coquillages, vers, oursins, étoiles de mer, petits poissons…). Il les saisit avec beaucoup d’habileté à l’aide de ses deux pinces très puissantes : la pince « ciseau » lui sert à couper, tandis que la pince « marteau » est utilisée pour broyer. Pendant la journée, le homard reste caché dans les fentes des rochers ou à l’intérieur du terrier qu’il a creusé dans le sable ou la vase et qu’il passe beaucoup de temps à entretenir.
Le homard mue tout au long de sa vie, chaque fois que sa carapace devient trop petite. Pendant sa première année d’existence, il mue une dizaine de fois. Avant d’atteindre l’âge adulte, vers 4 ou 5 ans, le jeune homard subit au total une vingtaine de mues. Puis il continue de grandir et de muer une fois par an ou tous les deux ans. À chaque mue, il mange la carapace dont il s’est débarrassé : elle lui fournit le calcium nécessaire pour en reconstituer une nouvelle.
L’autotomie, la capacité à s’amputer d’un membre
Les homards peuvent vivre très longtemps : l’espèce européenne peut atteindre l’âge vénérable de 50 ans ! Par ailleurs, le homard est, comme le lézard, doté d’une faculté singulière : l’autotomie. Cela signifie qu’il peut volontairement s’amputer d’un membre lorsque celui- ci est saisi par un prédateur. Il sauve ainsi sa vie en payant le prix d’une pince ou d’une patte ! Le flux de sang qui alimentait le membre est stoppé et une membrane se forme à l’endroit de l’amputation. Le membre perdu repousse ensuite au cours des mues.
Sa chair utilisée à des fins médicinales
Dès l’Antiquité, le homard était présent sur les tables des banquets des riches : il s’agissait déjà d’une nourriture de luxe, à la fois rare et très recherchée. Au Moyen Âge et à la Renaissance, il a surtout été utilisé à des fins médicinales : on faisait griller sa chair puis on la réduisait en une poudre que l’on dissolvait dans du vin. Elle était réputée bénéfique contre les maladies urinaires et les calculs rénaux. Sa chair, consommée sous forme de bouillon, était elle aussi considérée comme diurétique. Mais son statut gastronomique demeura modeste jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.