Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
La Semaine sainte, marathon du père Jégonday
Dimanche des Rameaux, messe chrismale, Chemin de croix, veillée pascale… Pour Pierrick Jégonday, prêtre en Bretagne et marathonien, la semaine avant Pâques relève de la « course de fond ».
En ce Jeudi saint, quand le père Pierrick Jégonday ouvre la porte de son presbytère, l’air venté de la tempête Nelson s’engouffre dans le bâtiment. « Un temps de Toussaint », plaisante le curé des paroisses de Saint- Brieuc et Ploufragan, dans les Côtesd’Armor.
« Aujourd’hui, c’est la fête des prêtres, glisse celui qui est aussi vicaire épiscopal. Ce matin, j’ai participé au conseil épiscopal. » Deux heures plus tard, il assiste à une célébration présidée par l’évêque, Denis Moutel, en la cathédrale forteresse SaintÉtienne, à Saint- Brieuc. Une cérémonie où s’accomplissent deux gestes rituels : le lavement des pieds, « qui exprime la figure du Christ comme serviteur », et l’Eucharistie, symbole du sacrifice du Christ. « Elle se termine par le temps de l’adoration (prière). J’en ressors vers 22 h. »
Grand ménage à la cathédrale
Une journée très rythmée. Mais c’est toute la Semaine sainte, celle qui précède les fêtes de Pâques, qui s’avère « intense en célébrations ». Le coup d’envoi a été donné il y a une semaine, le 24 mars, avec le dimanche des Rameaux. Mardi 26, « journée fraternelle », s’est tenue la messe chrismale : « L’évêque a béni les huiles saintes et quatre-vingts prêtres et diacres ont renouvelé leurs voeux. »
Mercredi après-midi, changement de registre avec le « grand ménage » de printemps à la cathédrale : « On y était avec des têtes- de- loup (balais arrondis télescopiques), détaille le père Pierrick Jégonday. On a fini par un goûter avec les enfants ! »
Pour le Vendredi saint (avant- hier), plusieurs temps sont organisés pour célébrer le Chemin de croix. « On chemine autour de la cathédrale. Le matin, c’est pour les enfants, le midi, pour les actifs, et le soir, on s’adresse à tous les âges et toutes les réalités. » Une « course de fond » que le prêtre de 55 ans accomplit au
tempo d’un marathon, en sportif habitué à relever des défis. Justement, son dernier marathon, c’était celui de Rome, mi-mars. « Je cours 10 à 15 km, deux à trois fois par semaine. » C’est son rythme de croisière. Une respiration indispensable. Il a même appris à nager pour participer à un triathlon à l’aube de la cinquantaine…
« Un besoin de spirituel »
Hier, dans les Côtes- d’Armor, durant la veillée pascale, soixante- dix- sept personnes ont été baptisées, dont une majorité de jeunes. « C’est l’apothéose. Dans le coeur de notre foi, c’est le plus grand moment », confie le prêtre. Il repense avec émotion à ce premier dimanche de Carême, le 18 février, où ces catéchumènes ont célébré l’appel décisif, dernière étape avant le baptême. Pendant le Carême, « on a le temps de cheminer, on fait un itinéraire avec le
Christ », rappelle le prêtre briochin, comparant ce temps à celui de l’Avent.
Le nombre de baptêmes célébrés en ce week- end pascal le marque : c’est la première fois que le diocèse de Saint- Brieuc en compte autant. Une tendance nationale, selon la dernière enquête de la Conférence des évêques de France : 7 135 adultes devaient être baptisés hier, soit un nombre en augmentation de 31 % par rapport à 2023, ainsi que 5 025 adolescents (une hausse estimée à 50 %). « Dans un monde en difficulté, le besoin du spirituel et du religieux grandit. Les gens recherchent plus d’intériorité, de simplicité et de sobriété », décrypte le curé.
Dès la semaine prochaine, le prêtre, « heureux, en conversation avec le monde », repartira, accompagné des bénévoles de la paroisse, « payer le café aux sans- abri » dans les rues de Saint- Brieuc. Avec un
thermos dans le sac à dos, comme il le fait « toute l’année ». Sauf durant la Semaine sainte qui passe à cent à l’heure et l’accapare à cent pour cent. « J’ai été baptisé catholique mais je me considère avant tout comme chrétien. C’est une direction, une boussole qui compte dans ma vie. La fête de Pâques a une importance toute particulière pour moi, même si je ne vais pas à la messe ce jour-là. C’est, notamment, un souvenir d’enfance, celui de mon père nous jetant des oeufs en chocolat depuis la fenêtre, comme s’ils tombaient par magie du ciel. »