Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Que moi » : les écarts d’âge au travail

- Marie TOUMIT. Bernard CAMPAN.

respect mutuel énorme. » Une quinzaine de personnes travaille dans cette agence postale. Une situation étrange ? « Non, il est là parce qu’il a fait une grande école. Moi, j’ai une expérience de trente ans, mais une expérience de La Poste d’il y a trente ans aussi », estime- t- elle.

Elle vouvoie son jeune directeur, qui a le même âge que son fils. « Comme je l’ai toujours fait avec mes chefs. C’est une question de respect et cela permet de garder une certaine distance. Lui m’a demandé s’il pouvait me tutoyer. J’ai accepté. »

Cela n’empêche pas les échanges informels et plus conviviaux à la pause déjeuner. « Parfois, on fait référence à des films ou de la musique qu’il ne connaît pas. On le traite de « petit jeune ». On devient aussi un peu les mamans quand il nous consulte sur ses achats ou sur des recettes de cuisine, glisse Muriel. Mais à 14 h, quand le bureau rouvre, il redevient le directeur. »

« Pour mon premier poste, j’ai rejoint une unité où mon adjoint avait l’âge de mon père », raconte Romain, 42 ans, officier de gendarmeri­e. Il avait 26 ans et sortait de sa formation avec le grade de lieutenant. « Dans un système militaire, le piège est de dire « puisque je suis le chef, c’est comme ça ». Mais comme ailleurs, le savoir- être est très important. »

Il a longtemps été l’un des plus jeunes des unités qu’il dirigeait. D’autant que les officiers sont mutés régulièrem­ent et commandent des équipes où d’autres sont en poste depuis des années. « Quand tu arrives, tu ne connais pas la moitié de ton métier. Si tu as envie de réussir, tu t’appuies sur les sous- officiers plus anciens. Ils ont plus de légitimité que toi par rapport à la troupe, relève Romain. C’est un équilibre à trouver : je leur fais confiance et j’écoute, mais je porte la décision et je l’assume, y compris quand elle ne va pas dans leur sens. »

Est- ce difficile de commander en étant le plus jeune ? « Un chef jeune amène du dynamisme et de la fraîcheur. Son regard neuf interroge les process, qui peuvent être là pour de bonnes raisons ou installés par la force de l’habitude ou le confort. Les plus anciens apportent expérience, connaissan­ces et réseaux. »

L’officier met aussi en avant l’exemplarit­é : « Il ne faut pas exiger de tes subordonné­s des choses que tu ne fais pas toi- même. Il faut travailler et être un moteur. »

« J’écoute, mais je porte la décision »

(1) Tous les prénoms ont été changés.

« Quand on vieillit, on se voit vieillir (rires). Avant, j’avais l’impression que les élus politiques, les avocats ou encore les notaires étaient forcément des gens plus vieux que moi. Et en grandissan­t, j’ai constaté qu’ils pouvaient non seulement avoir le même âge mais carrément être plus jeunes. Ça m’a fait bizarre autour de la cinquantai­ne, mais maintenant – j’ai 65 ans – je ne suis plus étonné. Au contraire, je trouve ça rassurant. »

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| PHOTO : DIANE DUCHÊNE, OUEST-FRANCE lorsque l’écart d’âge est important entre chefs et subordonné­s.
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