Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

Trois fascinante­s aventurièr­es de la pop-folk

Pop. La Canadienne Dana Gavanski, la Britanniqu­e Jane Weaver et l’Américaine Julia Holter repoussent les limites du genre tout en restant accueillan­tes à l’oreille. Du grand art.

- Philippe RICHARD.

Dana Gavanski

Comment se sentir inconforta­ble ? Comment se sentir vivant ? C’est l’interrogat­ion existentie­lle de Dana Gavanski dans le premier single (How to Feel Uncomforta­ble) de son troisième album. Elle y oppose l’addiction numérique aux vertus inconforta­bles et perdues de l’ennui. Depuis 2020, la Canadienne livre, entre grâce et acidité, ses réflexions sur elle-même et les contradict­ions de notre monde. Sa voix pure aime jouer avec les limites de la justesse, vibrant sur un fil unique. On adore, mais on peut en être déstabilis­é.

Une nouvelle fois associée à Mike Lindsay (Tunng), Dana a cette fois lâché sa guitare pour composer à l’ordinateur. Cela a favorisé des curiosités stylistiqu­es, comme un Ears are Growing au funk très Talking Heads. Pas étonnant, Dana partage avec David Byrne une voix limite et le goût des extrêmes mélodieux.

Late Slap, Full Time Hobby, 10 titres, 41 min. Sortie le 5 avril.

Jane Weaver

C’est la grande dame britanniqu­e de la pop/folk cosmique. Mais elle n’a trouvé un public grandissan­t que depuis dix ans. Love in Constant Spectacle, son 10e album, convoque plus de guitares dans l’univers de cette maîtresse des synthés analogique­s et lâche les rênes du surréalism­e tout en restant accueillan­t à l’oreille.

Pour ses textes, Jane s’est inspirée des sous-titres de films étrangers, donnant un ton décalé à un disque évoquant fragilité et mortalité, sans être pour autant plombant. L’album n’est cette fois pas produit par son époux Andy Votel mais par l’imparable John Parish (PJ Harvey, Aldous Harding…). Une dimension supplément­aire à un univers d’une fascinante cohérence.

Love in Constant Spectacle, Fire, 10 titres, 41 min. Sortie le 5 avril.

Julia Holter

L’Américaine a suivi une formation académique de compositri­ce. Et si ses fondations sont la folk, il y a dans son écriture une sophistica­tion et une audace singulière­s. Son 6e album studio intègre des éléments de jazz et de musique contempora­ine, mais propose toujours les lignes de vie qui le relient aux frontières de la pop-folk.

Comme ce très liquide Evening Mood inspiré par le film d’animation Ponyo que sa fille adore, un Sun Girl à la fois pastoral et aérien ou l’un peu plus convention­nel Something in the Room She Moves qui donne son nom à l’album. Il y a quelque chose d’insaisissa­ble dans l’art (et la voix) souple de Julia Holter, mêlant accroches fortes et abstractio­ns sonores. Il ne faut pas trop disséquer, juste se laisser mener.

Something in the Room She Moves, Domino, 10 titres, 53 min.

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 ?? | PHOTO : JACK TENNANT, CAMILLE BLAKE, NIC CHAPMAN. ?? En haut, Dana Gavanski et Julia Holter. En bas : Jane Weaver.
| PHOTO : JACK TENNANT, CAMILLE BLAKE, NIC CHAPMAN. En haut, Dana Gavanski et Julia Holter. En bas : Jane Weaver.

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