Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)
« On avait oublié de raconter de belles histoires »
Après un hiver compliqué et douloureux, Tanguy Le Turquais (Team Lazare) a retrouvé son élément en baie de Quiberon. Avec son équipe et avec le sourire. Pour le plaisir.
Le fil vert sur le bouton vert… Ce jourlà il s’agissait d’une bouée au vent verte. Et pas blanche. Un avenant, « pas ou mal lu », ajouté aux instructions de course la veille de la première manche, le doute qui s’installe, une erreur de parcours, et la manche plutôt bien engagée s’est achevée vendredi à la 27e place. « On était un peu devant et on est les seuls à être partis sur une bouée blanche. On s’est cru plus malin que les autres. »
Qu’importe ! Tanguy Le Turquais (34 ans) positive : « Les problèmes de communication qu’on peut avoir à terre, on les retrouve aussi à bord, donc ça permet de régler des sujets, c’est intéressant. »
Le skipper du Grand Surprise Team Lazare ascenseur avait annoncé venir sur le Spi pour s’amuser et performer. Surtout pour s’amuser « car on n’est pas au boulot. On sort de trois mois de chantier et ça fait du bien de retourner sur l’eau, on a eu des conditions exceptionnelles. Aujourd’hui (vendredi), on s’est régalé, on a fait des grosses boulettes mais ce n’est pas grave, c’est rigolo. »
« Décompresser avant la saison en Imoca »
Tanguy aspirait à un peu mieux mais l’objectif est ailleurs : faire naviguer toute son équipe et pas que les navigants. « Il y a les techniciens, les gens de la com. C’est comme les entreprises qui viennent faire un team building (renforcer des liens entre salariés autour d’un objectif commun) en Grand Surprise et nous, on fait pareil. »
Pour l’ouverture du Spi, tous les corps de métier étaient ainsi à bord : la stratification (Nolwenn Cazé), l’électronique-mécanique-hydrauli
que (Mathilde Tavernier), le gréement (Axel Nicoleau), la direction technique (Félix De Navacelle), l’image embarquée (Coline Béal). Johanna Derennes (communication), Léna Le Turquais (logistique et… baby- sitter), Paul Gauchet (strate) et Eudes Libaudière (assistant- chef de projet) devraient grimper à bord au fil du week- end.
« On navigue tous pour un peu décompresser avant d’attaquer la saison en Imoca », une saison dont le point d’orgue sera le Vendée Globe, ce tour du monde en solitaire que Tanguy Le Turquais disputera pour la première fois.
Habituellement, il venait au Spi comme skipper pour des entreprises et pour apprendre à des gens à faire de la régate. Cette année, la tentation aurait pu se poser de composer un équipage mixte avec des « colocs », des sans-abris à qui il veut faire découvrir la mer et qu’il veut embarquer autour du monde, via l’association Lazare dont il porte les couleurs et le message. « Ils sont presque tous venus naviguer sur l’Imoca et j’en ai vu aujourd’hui sur un semi-rigide. »
Mais Tanguy voulait faire un beau cadeau à sa jeune équipe après un hiver très compliqué : « Il a été terrible pour tout le monde. Moi, j’étais en première ligne donc forcément cela a été un cauchemar, eux aussi l’ont pris de plein fouet. »
« Ça fait juste du bien… »
Soupçonné d’avoir communiqué des informations météos à Clarisse Crémer, sa compagne, lors du dernier Vendée Globe (2020-2021), le couple a été blanchi trois semaines plus tard par un jury international (4 mars). « Alors, ça fait juste du bien d’aller simplement faire du bateau, parce que cette histoire a dépassé le bateau, et de retrouver du plaisir à 100 %. On avait juste un peu oublié qu’on était là pour faire du bateau et raconter de belles histoires. »
L’Imoca Team Lazare est sorti récemment d’un long chantier hivernal à Hennebont. La première navigation est programmée quelques jours après la fin du Spi. « On n’aura pas beaucoup de temps avant la Transat CIC (entre Lorient et New York, départ le 28 avril), donc je profite des weekends pour aller faire de longues navigations, afin de tout valider et tout tester en mer. » Tanguy Le Turquais a retrouvé le sourire : « Je ne l’avais jamais perdu mais ce n’était pas drôle ! »