Dimanche Ouest France (Côtes-d'Armor)

« Il n’y a pas de peuple breton génétique »

Edwy Plenel était invité aux 60 ans de l’Union démocratiq­ue bretonne (UDB), à Pontivy, samedi. Le cofondateu­r de Mediapart participai­t à un débat autour de l’identité bretonne.

- Edwy Plenel, cofondateu­r de Mediapart. Recueilli par Yann CLOCHARD.

Quels liens entretenez-vous avec l’Union démocratiq­ue bretonne ? Je n’ai pas de lien partisan ou personnel, mais intellectu­el. L’imaginaire politique, culturel et démocratiq­ue que défend l’UDB est celui auquel j’adhère. Mon père parlait le breton. Il était à l’opposé du nationalis­me, dans la continuité d’Ar Falz. J’ai moi-même eu l’occasion de débattre avec Herri Gourmelen et Jean-Michel Le Boulanger, dont j’ai rédigé la préface de son Manifeste pour une France de la diversité. Je me reconnais là- dedans et je suis honoré d’être là. Le peuple breton est une famille soucieuse des autres peuples.

Né à Nantes, vous sentez-vous Breton ?

Comme je le dis, je suis un Breton d’outre- mer car j’ai grandi dans les Antilles. Le lieu de naissance, c’est toujours un hasard. J’aimerais mourir avec plusieurs nationalit­és. L’histoire de la Bretagne, c’est une histoire de déplacemen­ts. Nous sommes ici à la fin du continent eurasiatiq­ue, projeté sur le monde. Et les Bretons qui votent pour les forces de l’ombre sont contre leur propre passé.

Par forces de l’ombre, vous voulez dire l’extrême droite…

Et ce qui s’en rapproche. Ce sont des monstres qui sont là, en Bretagne, où on ne pensait pas les trouver. Ils ont remplacé le mot égalité par identité. Or, l’identité, elle se construit en relation avec d’autres.

Ce partage, c’est ce que défend l’UDB et ça me paraît l’évidence aujourd’hui. Et pour ça je dis que la

Bretagne est l’avenir de la France.

Que pensez-vous de la propositio­n de l’UDB de surtaxer des résidences secondaire­s voire les transforme­r en logements sociaux face à la crise du logement ?

En Martinique par exemple, là-bas aussi, les habitants sont concernés par cette problémati­que du logement. On a le droit de bouger et vouloir échapper à une injustice sociale (la guerre, le réchauffem­ent climatique…). Tout le monde est le bienvenu dans un territoire. Mais il faut déjà accueillir.

Les Départemen­ts ont peu de recettes et beaucoup de charges sociales pour aider les gens dans la précarité. Nous sommes dans une idéologie très compétitiv­e et on a oublié ce qu’est l’impôt. Il permet de faire tourner la société. Et cela me paraît normal que ceux qui gagnent plus, payent plus, tant que les mesures particuliè­res qui sont prises ne sont pas des mesures d’exclusion.

En janvier, vous avez salué la Une du journal Le peuple breton, avec un jeune métis portant le Gwenn ha Du. En quoi cette image est importante pour vous ?

Il n’y a pas de peuple breton génétique. On est Breton parce que l’on grandit avec cette histoire, cette culture, on la mélange à d’autres. Nous sommes tous créolisés et faits d’histoires multiples. Ceux qui se croient 100 % Bretons se trompent. Nous sommes comme les plantes qui ont besoin d’autres écosystème­s pour vivre. Même si l’espèce humaine est la seule à avoir inventé une façon de se tuer.

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| PHOTO : OUEST-FRANCE Edwy Plenel était invité à participer à un débat lors des 60 ans de l’Union démocratiq­ue bretonne.

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