Dimanche Ouest France (Finistere)
Une manifestation annoncée pour samedi à Brest
Un arrêté a interdit leur manifestation pour « une paix juste au Proche-Orient », hier. Les militants du collectif brestois vont porter plainte et annoncent un nouveau rassemblement samedi prochain.
Un « choc », une « colère noire »
devant un « document éminemment politique, à charge, absolument pas neutre » : voilà ce que disent ressentir les militants du collectif de soutien aux victimes civiles du conflit israélopalestinien. Constitué, à Brest, à l’initiative de France Palestine Solidarité, ce collectif (1) rassemble une vingtaine d’associations, partis de gauche et syndicats. Qui « se sent obligé à la solidarité devant la tragédie, la catastrophe humanitaire », alors que le conflit armé entre le Hamas et Israël ne faiblit pas. Et qui « revendique également la liberté d’expression et de manifestation pour la Palestine. »
Dans son arrêté du 20 octobre 2023, le préfet Alain Espinasse a en effet justifié, en onze points, les arguments qui l’ont conduit à interdire la manifestation prévue hier. Une décision préfectorale motivée par « le risque élevé des troubles graves à l‘ordre public dans le contexte du conflit entre le Hamas et Israël ».
Que viennent accentuer « les précédents troubles à l’ordre public commis lors de manifestations placées sous la responsabilité de certains des déclarants. »
« Atteinte grave et inacceptable »
« Jusqu’à présent, le ton était resté civil, a commenté Claude Léostic, présidente depuis près de vingt ans, de l’Association France Palestine Solidarité du Finistère-nord. Aujourd’hui, tout a changé : nous considérons que nous sommes là devant une atteinte aussi grave qu’inacceptable à nos libertés, à notre droit d’expression, collectif et individuel, à notre droit de manifester. »
En réunion hier après-midi dans un local minuscule du port de commerce, surpris par ce « revirement scandaleux », le collectif a expliqué n’avoir pas eu « le temps de réagir ». Via par exemple, un « référé liberté », comme au Havre, à Metz, Rouen, et Montpellier, où les manifestations interdites ont finalement été autorisées.
« Le pire serait que cet arrêté du préfet fasse jurisprudence, il s’appuie sur un soit-disant déficit des forces de l’ordre pour justifier l’interdiction d’une manifestation, a rajouté Rolland de Penanros pour l’Université européenne de la paix.
C’est une notion nouvelle à laquelle il faut s’opposer. »
L’allusion préfectorale aux heurts entre les forces de l’ordre et une trentaine de manifestants rassemblés place de la Liberté le samedi 12 octobre malgré la première interdiction, est considérée par le collectif comme un « mensonge » : « N’ayant pas reçu la nouvelle de l’annulation, certains se sont rendus au rendez-vous, ont réalisé la situation sur place et ont juste discuté quelques minutes avant de s’en aller », a retracé l’Union Pirate.
Mail interne
L’arrêté du Préfet est particulièrement détaillé quant à l’attitude reprochée à l’Association France Palestine, pour avoir, le jour de l’attaque initiale du Hamas, « témoigné d’un soutien sans ambiguïté à ces actions auxquelles ont participé des organisations reconnues comme terroristes par l’Union européenne ».
Sa présidente est elle aussi visée : le 10 octobre, elle écrivait, dans un
« mail interne », envoyé aux adhérents de l’AFL inscrits dans la même liste de diffusion, son ressenti face aux drames. Dans ce mail, elle qualifiait les attaques terroristes perpétrées par le Hamas « d’actes de résistance qui, même armée, est inscrite dans le droit international ». Ses propos ont été retenus par le préfet qui en a déduit que la manifestation visait « à provoquer et légitimer des actions de nature terroriste ».
« De la diffamation pure et simple,
résume Claude Léostic. De plus, depuis des décennies, absolument aucun incident ne s’est produit lors de manifestation de soutien à la Palestine.
Le collectif réitère sa demande de rendez-vous avec le sous-préfet JeanPhilippe Setbon. Il compte également porter plainte sur le contenu de l’arrêté du préfet. Et il annonce un nouveau « rassemblement pour une paix juste au Proche-Orient » pour le samedi 28 octobre, à 14 h 30, place de la Liberté, à Brest.
(1) Amnesty international, France Palestine solidarité, CGT, LFI, Gauche éco-socialiste, la Ligue des droits de l’Homme, le Nouveau Parti anticapitaliste, le PCF, les Jeune Communistes, Solidaires 29, l’Union communiste libertaire, l’Union démocratique bretonne, l’Union Pirate et l’Université européenne de la paix, le Mouvement de la paix, la Fédération Syndicale Unitaire.