Dimanche Ouest France (Finistere)

Histoire d’un rendez-vous manqué avec la Ligue 2

Avant-derniers et renvoyés au National, les Thoniers imaginaien­t cette première en Ligue 2 autrement. Retour sur cette longue et usante saison où le plaisir n’aura été que peu présent.

- L’USC a cru au maintien Dylan LE MÉE.

L’histoire avait tout pour être belle. Pour la première fois de son histoire, l’US Concarneau accédait à la Ligue 2. Même dans ses rêves les plus fous en reprenant, dix ans après son père Guy en 2003, la présidence du club, alors en CFA, Jacques Piriou n’y songeait guère. « Je ne peux pas dire qu’on pensait au monde profession­nel, nous racontait le président des Thoniers. Déjà, c’était d’ancrer le club dans le territoire. »

L’USC avait les atouts pour faire tomber sous son charme la Ligue 2 : une identité bretonne ancrée, un public de passionnés et un petit stade « à l’anglaise » quand la mode est à la modernisat­ion et aux grosses enceintes.

Si la Ligue 2 était prête à l’accueillir, l’US Concarneau ne l’était pas. En tête de ces infrastruc­tures obsolètes, le stade Guy-Piriou n’était pas aux normes. Sentant la bonne saison se rapprocher, le club voulait l’anticiper depuis quelques années. Pas la mairie. Où jouerait l’USC ? Une folle course contre la montre se lançait avec le couperet de se voir refuser la montée. C’eut été une catastroph­e pour le club. Sur le gong (à 18 h 30 le 30 juin pour minuit), les Thoniers se mettaient en conformité avec la Ligue de football profession­nel. L’US Concarneau devrait jouer ses rencontres à domicile au Roudourou (Guingamp), au Moustoir (Lorient) et à Francis-Le Blé (Brest) auxquels s’ajouteront Michel-d’Ornano (Caen) et le Roazhon Park (Rennes).

Cette bonne nouvelle arrivait deux jours après la reprise de l’entraîneme­nt à laquelle seulement seize joueurs participai­ent, dont une seule recrue (Matondo) et avec Stéphane Le Mignan aux commandes. Le technicien breton avait laissé planer le doute sur son avenir quelques jours après le titre de National. Des clubs de Ligue 2 toquaient à la porte alors que le technicien breton craignait le contexte et réclamait une restructur­ation de l’organigram­me avec la création d’un poste de responsabl­e du recrutemen­t pour le soulager. L’ancien Caennais et Angevin Philippe Leclerc était nommé durant l’été. Les Thoniers n’avaient pas imaginé la montée ainsi. « J’ai vécu dans une machine à laver », avouait Jacques Piriou.

Mais cette problémati­que du stade était devenue la seule préoccupat­ion et faisait prendre un retard considérab­le à l’US Concarneau pour préparer ce qui devait être une saison de fête, la plus belle de son histoire.

Avec le plus petit budget de Ligue 2 (6,5 millions d’euros amputés de 800 000 € de location de stade), la reconstruc­tion était délicate et la situation extra-sportive effrayait plus d’un joueur. Malgré la montée, l’US

Concarneau restait toujours en concurrenc­e avec les grosses écuries de National et devait se contenter des fonds de tiroir, tenter des coups ou en relancer d’autres pour construire un effectif en capacité de se maintenir après le départ de cadres de la montée qu’ont été Traoré, Boutrah, Mannai et Rabillard.

Après une moitié d’été à parler de tout, sauf du sportif, l’US Concarneau – dont le recrutemen­t était encore loin d’être terminé, et elle allait le ressentir – lançait enfin sa saison. Le 5 août 2023, l’USC concédait le nul (0-0) contre Bastia dans un stade du Roudourou qui, à l’image du reste de la saison, sonnait creux (1 875 spectateur­s alors que le stade Guy-Piriou avait accueilli plus de 3 000 spectateur­s de moyenne la saison précédente).

Surtout, les problèmes s’accumulaie­nt avec la perte de son meilleur buteur Fahd El Khoumisti (ligament croisé), puis quelques semaines plus tard du défenseur Mamadou Sylla (ménisque) au coeur d’un long mois d’août où l’USC ne parvenait pas à faire trembler les filets. L’apprentiss­age de la Ligue 2 était rude (1 point en quatre matches).

Après 461 minutes de disette, Yanis Merdji, arrivé deux semaines plus tôt, libérait l’US Concarneau et inscrivait le premier but de l’histoire du club en Ligue 2 contre Annecy (1-1). Ce but ne sera pas prémonitoi­re d’une nouvelle idylle pour l’ancien Niortais. Stéphane Le Mignan décidera de ne plus compter sur l’attaquant à compter de janvier.

L’entraîneur à la tête de l’US Concarneau depuis 2020 n’est pas exempt de toute responsabi­lité dans

la relégation, en dépit de tous les boulets accrochés aux pieds des Thoniers les ayant tirés vers les profondeur­s du classement.

Le côté jusqu’au-boutiste de Stéphane Le Mignan lui jouait des tours. Car oui, l’US Concarneau a compté jusqu’à sept points d’avance sur le premier relégable Dunkerque (le 10 février à la faveur de la victoire 3-0 à Annecy) et se voyait déjà accueillir en août 2024 un match de Ligue 2 à Guy-Piriou dont le projet de modernisat­ion et de mise aux normes était validé en avril. Quelques rêveries de barrages, qui n’étaient qu’à 5 points, faisaient même leur apparition dans la tête de certains dans le vestiaire.

Un miracle permanent alors qu’une saison galère était prédite aux Thoniers qui avaient lancé leur saison à la faveur de prestation­s pas encore abouties, mais prometteus­es (QRM, Dunkerque, Laval). Petit à petit, l’US Concarneau prenait la mesure de la Ligue 2. Mais la chute ne fut que plus lourde. Alors comment a-t-elle pu gâcher une telle avance ?

Stéphane Le Mignan comptait bien prendre le contrepied d’un championna­t réputé plus athlétique en confortant des principes de jeu qui ont fait sa marque de fabrique depuis son arrivée dans la ville close. Exceptées les quatre premières journées, lors desquelles à peine 50 % des recrues étaient arrivées, l’USC prenait 21 points en 15 rencontres grâce à une animation offensive régulée autour des deux pointes Ba et Ndombasi. Avec peu de moyens, « SLM » était en passe de réussir l’impossible.

Mais au retour des vacances de Noël, l’US Concarneau, au style déjà bien académique, était en plus devenue trop lisible pour ses adversaire­s. Déjà avant la trêve, les premiers signes d’essoufflem­ents apparaissa­ient,

consécutif­s à la perte du détonateur Nassim Chadli.

Surtout, Stéphane Le Mignan changeait le visage d’une attaque qui lui avait permis d’être dans les clous à mi-saison. Ndombasi (110 minutes sur la phase retour) sortait de l’équipe, comme les arrières gauches Sans et Wahib, retenus au mercato hivernal (86 minutes à eux deux), qui voyait Georgen et Etuin, pas spécialist­es du poste, leur être préférés alors même qu’un Julien Faussurier tirait la langue de l’autre côté.

Cette gestion se mêlait avec des choix pour le moins étonnants qui ne rendaient service à personne (Paro arrière droit contre Angers, Rodrigues encore trop tendre pour assumer seul une attaque de Ligue 2). Au contraire, avec ces choix délibérés, « SLM » se coupait de forces vives alors que l’usure mentale et physique d’une saison compliquée finissait de tirer sur un groupe déjà en souffrance. Si encore les résultats lui avaient donné raison… Jamais, pendant la série de douze matches sans victoire (4 points sur 36 possibles), Stéphane Le Mignan ne parvenait à inverser le cours de l’histoire. Jamais un élan de révolte ne traversait les rangs concarnois.

Au lieu de ça, Stéphane Le Mignan s’enfermait dans ses idées, quitte à laisser sur le banc son meilleur buteur Pape Ibnou Ba plusieurs rencontres, finissant d’entamer la confiance d’un homme qui marche à celle-ci et qui a longtemps permis à toute une ville d’y croire.

Il fallait un Bordeaux malade et déjà la tête aux vacances (4-2, le 10 mai) pour offrir aux supporters concarnois, au Moustoir, un maigre lot de consolatio­n pour la der’ à domicile. Mais il était déjà trop tard.

 ?? | PHOTO : THIERRY CREUX / OUEST-FRANCE ?? Comme ici au Moustoir après la victoire (4-2) face à Bordeaux, les Thoniers remercient leurs supporters qui les ont suivis partout malgré leur statut de nomade.
| PHOTO : THIERRY CREUX / OUEST-FRANCE Comme ici au Moustoir après la victoire (4-2) face à Bordeaux, les Thoniers remercient leurs supporters qui les ont suivis partout malgré leur statut de nomade.

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