Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)

1945-2022, de la paix retrouvée à la paix menacée

- par Jeanne Emmanuelle Hutin

Soixante- dix- sept ans après la défaite du nazisme, la guerre resurgit sur notre continent. Marioupol en concentre l’horreur et la menace : « Le siège de Marioupol est pire que celui de Leningrad » en1941, se souvient Elvira Borts, âgée de 87 ans.

Pour la seconde fois, sa ville, Marioupol, est assiégée. Pour la seconde fois, à quatre-vingts ans de distance, Elvira a échappé à la mort : rescapée de l’Holocauste, elle s’est enfuie avec son mari de l’enfer de Marioupol. Mais cette ville qu’elle avait contribué à reconstrui­re est à nouveau détruite, bombardée sans relâche. Combien d’hommes, de femmes, d’enfants agonisent dans ses décombres ? Combien de civils torturés, violés déportés en Sibérie ? Ces crimes ont un but : anéantir le peuple ukrainien. La Russie qui s’apprête à commémorer la victoire de 1945 envisage de parader à Marioupol. Ce serait une mascarade. Recouvrir les crimes de guerre en Ukraine du manteau de la victoire de 1945 est une falsificat­ion grossière. M. Poutine veut faire croire que les Ukrainiens sont des nazis alors que c’est son armée qui commet des crimes qui s’apparenten­t à un génocide ! La victoire de 1945 est celle de tous les peuples ayant combattu le nazisme, y compris celle des Ukrainiens.

Le régime russe foule aux pieds l’honneur de la Russie. Membre du Conseil de sécurité des Nations unies, elle a « la responsabi­lité […] du maintien de la paix et de la sécurité internatio­nale ». Cela signifie respecter les convention­s internatio­nales que ce régime ne cesse de violer… En bombardant Kiev le jour de la visite du chef de l’ONU, il s’exclut de fait de cette assemblée conçue pour construire la coopératio­n et la paix entre les nations. En décorant les bourreaux de Boutcha, il encourage les crimes de l’armée russe.

Refuser toute remise en cause des frontières

C’est maintenant qu’il faut arrêter son offensive. Nous devons protéger les Ukrainiens en les équipant davantage et plus vite. Nous devons défendre les piliers de la paix que sont l’ordre internatio­nal et les valeurs qui le soutiennen­t. Cela signifie refuser toute remise en cause des frontières.

Le 9 mai, nous célébreron­s la fête de l’Europe fondée pour la paix voici soixante- douze ans. L’honneur et le courage des Européens d’aujourd’hui commandent de cesser de financer cette guerre en décrétant immédiatem­ent un embargo sur le gaz et le pétrole de Russie. Depuis le début de la guerre, nous lui avons déjà versé 44 milliards d’euros !

Pays fondateur de l’Europe, la France a une grande responsabi­lité. Elle doit l’assumer à l’heure où le président de la République vient d’être investi et où les Français s’apprêtent à élire leurs députés.

En ce moment crucial, il est essentiel de renforcer l’Union européenne. Or, rechercher la paix au prix d’accepter l’occupation­d’une partiede l’Ukraine par la Russie ou désobéir aux traités européens – ce que prône la Nouvelle union populaire écologique et sociale – ne peut qu’engendrer des divisions au sein de l’Europe et l’affaiblir dangereuse­ment. Cela encourager­ait la Russie à poursuivre ses crimes en Ukraine et à étendre son agression à d’autres pays. Alors, nous aurions perdu et la paix et l’honneur.

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