Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)

Gare à l’utilisatio­n des données de votre ADN

Documentai­re. Depuis 2018, la généalogie génétique a permis d’identifier de nombreux criminels aux États-Unis. Mais cette révolution fascinante inquiète aussi.

- Propos recueillis par Sonia LABESSE.

Gabrielle Dréan, réalisatri­ce de ADN, la fin du crime ?

Comment, en 2018, la généalogie génétique a-t-elle révolution­né l’enquête criminelle ?

Dans les années 2010, une Américaine passionnée de généalogie, CeCe Moore, a mis au point une méthode de recherche d’une efficacité fascinante à partir de profils génétiques. Elle l’a d’abord utilisée bénévoleme­nt pour retrouver les parents biologique­s d’enfants adoptés. En 2018, inspiré par cette technique, un policier de formation scientifiq­ue, à quelques semaines de la retraite, Paul Holes, a tenté un dernier coup pour identifier le « golden state killer » : le tueur et violeur en série qui avait terrorisé la Californie de 1976 à 1986.

Depuis, la méthode a fait arrêter de nombreux criminels…

Paul Holes a envoyé un échantillo­n d’ADN (acide désoxyribo­nucléique dans nos cellules) à une société de recherches généalogiq­ues. Il a reçu une liste de cousins du tueur en série californie­n. Il s’agissait ensuite de trouver leur ascendant commun et de reconstitu­er un arbre généalogiq­ue aussi grand que nécessaire. En quatre mois, le tueur a été identifié, confirmé par un nouveau test ADN et arrêté. Selon CeCe Moore, il est possible de retrouver n’importe quel criminel avec 3 % des profils génétiques. Plus il y a de profils ADN disponible­s, comme aux États-Unis, en Chine, plus l’identifica­tion est facile.

Quelles informatio­ns livre notre ADN ?

L’ADN contient des milliards d’informatio­ns. La couleur des yeux est l’une des caractéris­tiques les plus faciles à déterminer. D’autres sont plus complexes. Mais les progrès sont très rapides dans ce domaine.

L’ADN peut renseigner sur l’alimentati­on, une carence en vitamine, la personnali­té, en partie déterminée par nos gènes. Une start-up américaine propose de détecter des capacités intellectu­elles, la propension à l’agressivit­é, à l’addiction, à la dépression ou au burn-out.

Où en est-on en Europe ?

En France, la loi limite strictemen­t le prélèvemen­t et l’utilisatio­n de données génétiques. Seule la police criminelle peut effectuer des « recherches en parentèle », sur autorisati­on d’un magistrat, au sein du Fichier

Aux États-Unis, l’ADN est utilisé pour identifier des femmes accusées d’avortement ?

Plusieurs États américains (Texas, Géorgie…) où l’avortement est interdit, ont identifié des mères par l’ADN de foetus. En Virginie, des poursuites ont été abandonnée­s dans un cas de fausse couche.

À Hong Kong, des portraits-robots « génétiques » ont été affichés dans le métro…

Une organisati­on non gouverneme­ntale est à l’origine de cette campagne visant à dénoncer publiqueme­nt ceux qui jettent papiers ou canettes par terre. À partir de traces d’ADN prélevées sur les détritus, l’ONG a réalisé des portraits-robots génétiques et les a affichés dans le métro. L’ADN est un outil puissant, à utiliser avec précaution. Il n’empêche pas les erreurs judiciaire­s – des personnes autres que le ou les criminels pouvant avoir laissé des traces. Et son utilisatio­n comporte des risques d’atteinte aux libertés et aux fondements de la société. Ce n’est plus de la sciencefic­tion.

France 5 ,20h55.

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| PHOTO : NOVA PRODUCTION En recourant à la généalogie génétique pour identifier le « golden state killer », Paul Holes a révolution­né l’enquête criminelle. national des empreintes génétiques. Les données utilisées par la recherche médicale sont « anonymisée­s ».

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