Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)
À la recherche d’émotions fortes
Psycho. Regarder des films d’horreur, sauter en parachute… Jouer avec le danger permet de transformer sa peur pour tester ses capacités et ses limites.
Reprendre le contrôle
Pourquoi désire-t-on tant frayer avec la peur, dans un grand huit ou au cinéma, alors que c’est une émotion plutôt désagréable ? « La peur est connotée négativement, mais c’est une émotion vitale, car elle nous donne des informations sur notre environnement », commence par recadrer Marine Colombel (1), psychiatre et autrice d’Écoute tes émotions pour te libérer (Marabout).
De là à la rechercher ? « Ce qui est traumatisant avec la peur, c’est qu’on perd le contrôle. On est victime, on n’a plus de pouvoir. Jouer avec sa peur est un moyen de reprendre la main. On n’est plus passif, dominé. On transforme la peur en objet. »
Tester ses capacités
Une fois la peur réduite à l’état d’objet, on peut l’affronter et même s’en servir pour tester ses qualités et ses limites. C’est pour cela que les adolescents sont particulièrement friands d’émotions fortes.
« La société leur demande de passer du statut d’enfant sans responsabilité à celui d’adulte autonome qui gère seul, poursuit Marine
Colombel. Se faire peur devient un rite initiatique pour qu’ils se testent et renforcent leur confiance en eux. Et pour qu’ils convainquent leur communauté de leur force. D’ailleurs, ils ne vont pas seuls ni avec leurs parents à la fête foraine.
Ils y vont entre eux. »
Sentir son corps
Se mettre en danger crée des sensations corporelles fortes et inhabituelles : « Le coeur qui bat vite, les jambes qui se dérobent, le souffle
Reconnaître ses émotions
Marine Colombel ne croit pas au risque addictif d’une recherche d’émotions de plus en plus intenses : « En ce cas, il faudrait se poser une question intime : qu’est-ce que je cherche ? Quel élément de mon passé m’y pousse ? »
La psychiatre pense plutôt que, plus on s’expose volontairement à la peur, plus on apprend à en repérer les signaux corporels : « La capacité à vivre et reconnaître les émotions est innée chez l’humain. Mais en la travaillant, on devient plus subtil. D’une part, on a de moins en moins besoin d’événements intenses pour ressentir des émotions. D’autre part, on reconnaît les endroits du corps où les émotions s’expriment et on est davantage capable d’écouter leur message. » (1) www.marinecolombel.fr