Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)
Une nouvelle étoile, verte, veille sur la gastronomie
Créée en 2020 par le guide Michelin, cette distinction récompense la démarche des restaurateurs en faveur d’une gastronomie durable. En France, 87 établissements l’ont reçue cette année.
Elle est cheffe végane sur le bassin d’Arcachon ; il est chef en Alsace et a conforté la production locale de foie gras d’oie. Et pourtant, Claire Vallée et Thierry Schwartz ont un point commun. Outre l’étoile rouge au Michelin – qui distingue la qualité de la table –, tous deux arborent l’étoile verte, qui récompense les efforts d’un restaurant en faveur d’une gastronomie dite « durable ». Impensable ?
« La gastronomie durable, ça n’existe pas », rétorque, un brin provoc’, Hervé Bourdon. Le chef du Petit hôtel du grand large à Portivy (Morbihan) faisait partie des invités du Guide rouge à une conversation entre pairs organisée lundi à l’Abbaye de Fontevraud (Maine-et-Loire).
Pour obtenir l’étoile verte, il ne suffit pas de faire pousser ses légumes dans son propre potager. À Vendôme – qu’il vient de quitter pour un nouveau projet à Chaumont-sur-Loire (Loir-et-Cher) – Guillaume Foucault avait contribué à relancer une race de vache locale. À Paris, Thibaut Spiwack « interdit à ses équipes de jeter quoi que ce soit de cru à la poubelle ». Depuis la salle de son restaurant à L’Herbaudière (Vendée), Alexandre Couillon peut montrer à ses clients
« le bateau rouge qui a pêché le matin le merlan qu’ils ont dans l’assiette à midi ». Des écueils, quand même
De cinquante à sa création en 2020, ils sont aujourd’hui 87 chefs français à arborer cette étoile verte. « 363 dans le monde, sur 15 000 établissements sélectionnés dans nos guides », complète Gwendal Poullennec. Avec presque autant de questions à la clé, estime le directeur international des Guides Michelin : «La seule chose dont je suis convaincu, c’est qu’il n’y a pas qu’une seule voie pour rendre la gastronomie durable. »
Il estime que Michelin, en créant cette distinction, a « semé une graine. La France a quelque chose à dire sur le sujet, assure Gwendal Poullennec. L’étoile verte s’inscrit dans les terroirs, dans les pratiques professionnelles. »
C’est ce que démontre Catherine Bourdon, l’épouse d’Hervé, le chef du Petit hôtel du grand large. Elle s’est lancée dans la viticulture en presqu’île de Quiberon, avec l’aide de Bertrand Jousset, vigneron à Montlouis-sur-Loire (Indre-et-Loire). Le duo espère bien produire « quelques litres dès cette année » , en attendant mieux. En sachant qu’il doit aussi se préparer au pire…
Tous le disent, la gastronomie durable est soumise à des écueils et des vents contraires. Le plus prégnant : l’aléa climatique, avec des épisodes de gel inédits et de sécheresse qui se multiplient, s’allongent, s’intensifient… « Quand les clients iront dans un restaurant à l’étoile verte, j’espère qu’ils en prendront conscience », glisse Niel, l’un des mystérieux inspecteurs Michelin.