Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)
Loire Sentinelle : premières remontées de la descente
Julien Chapuis et Barbara Réthoré sont partis de la source du fleuve, le 1er mai, pour une descente en canoë de trois mois. Objectif : étudier sa pollution en microplastiques et y recenser le vivant.
Ce lundi 23 mai, Barbara Réthoré et Julien Chapuis sont contraints à la pause. Dans l’Allier, à la confluence de la Besbre, le temps est à l’orage et empêche la navigation. Depuis le 1er mai, ces scientifiques descendent la Loire en canoë. Ils ont pris le départ là où le fleuve prend sa source, au Mont-Gerbier-de-Jonc, en Ardèche. Ils prévoient une arrivée fin juillet, dans l’estuaire, à Saint-Nazaire (LoireAtlantique).
En trois semaines, ce duo de biologistes, médiateurs scientifiques et chargés d’enseignement, a déjà envoyé quatorze prélèvements vers les laboratoires partenaires de l’expédition baptisée Loire Sentinelle. Barbara et Julien, qui ont fondé la structure d’exploration scientifique Natexplorers, veulent recenser les vivants de Loire, en prélevant de l’ADN environnemental (ADNe) , et révéler la pollution en microplastiques dans l’eau et le sédiment.
Alors que Barbara poursuit le récit de l’exploration sur un microblog dédié, Julien rapporte les moments forts de ces premières semaines.
Face aux barrages
Les passages de barrage ont été éprouvants, physiquement et moralement. Cela nous oblige à des portages conséquents, à des contournements qui nous demandent de charioter le canoë. Heureusement, il y a toujours des âmes charitables pour nous aider. Mais se confronter à ces grands murs de béton, qui bloquent le passage des êtres vivants, de manière perceptive, affective, ce n’est pas la même chose que d’en parler… Le vivre, cela fait mal au coeur.
Le festival sarthois Europajazz a démarré, hier, son final. Un joli plateau de musiques du monde a fait danser le soleil, au pied de la cathédrale du Mans. Place maintenant à une belle série de concerts, à l’abbaye de l’Épau, du 1er juin au 5 juin. Le nouveau concept du festival : inviter des têtes d’affiche à faire
Un festival d’oiseaux
En ce moment, nous sommes au royaume des Charolaises. Nous naviguons à travers de grandes prairies pâturées, là encore décapées par l’Homme. Mais nous assistons à un formidable festival d’oiseaux qui rompt un peu cette monotonie. Il y a beaucoup de cigognes blanches et de guêpiers d’Europe, ces oiseaux aux couleurs arc-en-ciel et aux vocalisations un peu rieuses, narquoises, qui profitent des berges pour y creuser leurs nids, et qui voisinent avec les hirondelles de rivage. Nous avons aussi observé les habituels aigrettes garzettes, hérons cendrés et martinspêcheurs. Je retiens une magnifique rencontre : la loutre. Ses traces et empreintes sont très nombreuses. Celles du castor sont aussi visibles. Une bonne nouvelle car, bloqués par les barrages, l’animal n’était plus présent dans la partie haute de la Loire. Il semblerait qu’il y soit revenu par l’un de ses affluents, le Lignon du Velay.
Avec SOS Loire Vivante
Ce n’est pas anodin qu’on ait retrouvé quelques membres de SOS Loire Vivante, aux sources de la Loire. Ils nous ont accompagnés lors de la phase pédestre. C’était important que l’on partage cela ensemble. Ils nous ont beaucoup appris sur l’histoire des lieux, eux qui ont été les premiers à s’opposer aux édifications. On devrait les retrouver au fil de la Sèvre nantaise, lors de notre arrivée.
Premiers échantillonnages et fragments de Loire
On a vu beaucoup de déchets, notamment dans des zones où les crues sont importantes. Parfois des chacune son programme. Le 1er juin : Louis Sclavis, puis Erik Truffaz ; le 2 juin : Géraldine Laurent ; le 3 juin : Sylvain Rifflet ; le 4 juin : Dhafer Youssef et le 5 juin : Airelle Besson. Avec aussi Médéric Collignon, Paul Lay Trio, Jowee Omicil et une cinquantaine d’autres artistes.
Contact : emansjazz.com. dépôts perchés à deux ou trois mètres dans les arbres. On va donc certainement retrouver des microplastiques dans nos échantillons car la grande majorité de ceux-ci sont le résultat de macro-déchets dégradés. On devrait d’ailleurs en retrouver dès les eaux qui sourdent au Mont-Gerbier. On sait que les micro et nanoplastiques ont intégré le cycle de l’eau.
Ces moments d’échantillonnage, filets à microplastiques et préleveurs d’ADNe en main, amènent souvent des discussions intéressantes avec les pêcheurs par exemple, principaux usagers du fleuve que nous croisons.
Ils sont curieux de l’étude, du mode opératoire et de l’approche expérimentale, surpris de notre descente intégrale. Ils nous confient leur relation avec le fleuve. Leur affect, leurs souvenirs. Ces fragments de Loire, je les collecte dans un petit carnet. Ils disent beaucoup…
«
»
À suivre dans cette série : une couverture artistique du projet ; reportage sur l’animation Dans les coulisses de l’exposition, à Chalonnes ; Paimboeuf, fin du périple, bilan et perspectives.