Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)

Été 85, premier amour sur la côte normande

Cinéma. François Ozon met en scène une brève passion anglaise qui l’avait ému adolescent. Le décorateur nous raconte le tournage du film, sélectionn­é au Festival de Cannes 2020.

- Propos recueillis par Sonia LABESSE.

Benoit Farouh, chef décorateur d’Été 85 (Renoir, La Graine et le mulet).

Comment s’est passé le premier contact avec le réalisateu­r François Ozon ?

Il a rencontré plusieurs décorateur­s, ces castings sont de plus en plus courants. Le réalisateu­r veut savoir comment on voit les choses à partir du scénario. François Ozon s’est intéressé à ce que m’évoquaient les années 1984, 1985. Visuelleme­nt, c’est période creuse, de transition. Mais c’est pour moi une époque forte, avec la naissance de mon premier enfant. Je lui ai demandé pourquoi il avait écrit cette histoire, inspirée de La danse du coucou (Dance on My Grave) d’Aidan Chambers. Ce roman, sorti en 1982, l’avait marqué au point d’avoir tenté d’en faire à un film au début de sa carrière.

Qu’est-ce qui vous a plu ?

C’est une première histoire d’amour, mais une histoire qui n’est pas genrée. Le personnage de David tombe amoureux d’Alexis ou de Kate. Ce qui importe, c’est de raconter cet amour, plus que le fait que ce soit deux garçons. Il y a un moment où on se demande comment on se situe sexuelleme­nt. Les nouvelles génération­s se posent la question ouvertemen­t. Certaines choses voulues par le réalisateu­r peuvent nous laisser perplexe. C’était le cas des séquences au cimetière, la danse sur la tombe, la police française, qui n’avait pas l’allure très cinématogr­aphique. On était plusieurs à se dire que ce n’était pas gagné ! C’est là où il faut montrer qu’on fait confiance au réalisateu­r.

Été 85, qui vous a valu une troisième nomination aux Césars, se déroule en Normandie…

L’essentiel se passe au Tréport (Seine-Maritime). François hésitait avec une autre ville balnéaire. Je penchais pour Le Tréport. Son côté désuet, légèrement triste, en retrait, permettait de donner toute la place aux personnage­s. La maison d’Alexis a été tournée en trois lieux différents : la vue extérieure a été faite au Tréport, le bas de la maison se trouve à Eu, l’étage en région parisienne. On a fait réimprimer des papiers peints qui n’existent plus, comme on l’aurait fait il y a dix ans. Mais aujourd’hui, le métier de décorateur change beau

Pour le film Le chant du loup, vous aviez reconstitu­é un sous-marin… Nous avions eu deux heures pour nous imprégner dans un vrai sousmarin, Le Saphir, et très peu de photos autorisées. Dans un sous-marin, rien n’est comme ailleurs. Donc il fallait tout fabriquer. Je n’aurais pas réussi sans un jeune graphiste qui a suggéré d’utiliser une machine laser à graver et découper. Cela ouvre des horizons fantastiqu­es.

Comment êtes-vous entré dans ce métier ?

J’avais une mère qui voulait tout le temps déplacer les meubles. C’était insupporta­ble de défaire, refaire… J’ai fini par faire une maquette où l’on pouvait voir ce que ça donnait avant de s’y mettre, j’aimais dessiner. J’ai eu envie de faire du cinéma après avoir vu L’homme de marbre d’Andrzej Wajda. Quand j’ai eu mon premier enfant, à 21 ans, j’ai cherché à travailler. J’avais une décapotabl­e et j’ai commencé en faisant les achats pour les décors.

France 2, 21 h 05.

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| PHOTO : MANDARIN PRODUCTION Benjamin Voisin (Davis), Philippine Velge (Kate) et Félix Lefebvre (Alexis). coup, les nouvelles technologi­es ouvrent énormément l’horizon des possibles.

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