Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)
« On ne veut pas être triés », protestent les enfants
Parmi la mobilisation nantaise opposée aux mesures du « choc des savoirs », de nombreux enfants ont soutenu leurs enseignants contre la mise en place de groupes de niveaux, hier.
Ça faisait longtemps qu’à Nantes on n’avait plus vu une manifestation aussi familiale. Hier, d’après les syndicats ce sont entre 2 500 et 3 000 manifestants, 1 300 d’après la police, dont de nombreux enfants, qui étaient présents pour manifester contre les mesures dites du « choc des savoirs ».
Parmi les mesures dévoilées dans le Journal officiel du 15 mars, figure entre autres l’apparition de groupes de niveaux. Mis en place à compter de la rentrée 2024 en mathématiques et en français, c’est un projet qui cristallise les tensions des élèves interrogés.
Au miroir d’eau, en attendant le début de la déambulation, Rose, en 4e à Salvador-Allende plaide : «On veut des classes mixtes, on ne veut pas êtres triés ! En tant que bons élè- ves, on peut permettre aux autres de s’améliorer. »
Solidarité et empathie
Un peu plus loin, pancarte à la main, Côme, en 6e à Bellestre, explique tenir à pouvoir aider ses camarades de classe : « Je suis là parce qu’il ne faut pas que l’école devienne de la concurrence, sinon les moins bons vont se décourager. » C’est un discours de solidarité et d’empathie qui sera tenu par tous les élèves questionnés ce jour-là.
À quelques banderoles de là, un 5e de Sophie-Germain présente sa situation comme un exemple de mixité de niveaux qui fonctionne : «Je suis en classe de cycle, les 5es et les 4es sont mélangés, et j’aime bien les différences de niveau qu’il peut y avoir car ça me motive à progresser. On a un peu brisé le mur de l’âge, chacun apporte ses connaissances. »
L’une des craintes de ces jeunes est que les élèves placés dans les groupes les plus faibles perdent confiance en eux, avec toutes les conséquences que ça peut engendrer. «En se retrouvant dans des groupes moins bons, ceux qui ont des parents stricts peuvent se décourager et abandonner l’école », regrette Ambre, en 3e à Marie-Marvingt.
« Si les nuls sont avec les nuls, ils n’auront pas envie d’avancer », estime Salomon, en 5e à Sophie-Germain.
Le terme « nul » est également utilisé par Camille, un CM2, qui ira à Stendhal l’année prochaine : «Ilvay avoir les forts avec les forts, les nuls avec nuls… », avant de se reprendre : « les faibles avec les faibles. Ça va les décourager, ils vont se dire’’je suis nul !’’ » Malgré eux et leurs bonnes intentions, le groupe des faibles est déjà largement négativement connoté pour ces élèves.