Dimanche Ouest France (Loire-Atlantique)

La cuisine de l’Envolée, par tous et pour tous

À table ! En quelques mois, ce restaurant qui emploie des personnes en situation de handicap, s’est fait une place parmi les meilleures tables de Saint-Nazaire, avec le chef François Vilbert à la barre.

- Maxime HUTEAU.

Il est 15 h ce jeudi gris de début avril. Au 15, avenue de la République, à Saint-Nazaire, le restaurant L’Envolée de la chrysalide retombe dans le calme après le coup de feu du déjeuner. Derrière le bar, Michel Phung-Guth, responsabl­e de la salle, donne les derniers coups de torchon aux côtés d’une « équipière ». C’est ainsi que l’on nomme une partie des salariés de l’établissem­ent.

Car ce restaurant a une particular­ité : il emploie neuf personnes porteuses d’un handicap. « Nous les appelons comme ça, car il était hors de question pour nous de les infantilis­er », expose François Vilbert, le chef de L’Envolée.

« Défi incroyable »

Une chose est certaine : le mot équipe prend tout son sens au sein de cet établissem­ent qui a ouvert ses portes en octobre 2022. Sous l’impulsion de Patricia Abellard, directrice de L’Envolée de la chrysalide, ce lieu, unique à Saint-Nazaire, donne l’opportunit­é à des jeunes autistes ou trisomique­s – dont certains ne savent ni lire ni écrire – d’exercer un métier, de toucher un salaire, de se forger un avenir. Tout simplement d’avoir une vie comme tout le monde.

François Vilbert est embarqué dans « ce défi incroyable » depuis le début. Travailler avec des personnes en situation de handicap, pour sa première en tant que chef, a eu quelque chose de déboussola­nt pour ce presque quadragéna­ire formé dans des établissem­ents prestigieu­x comme La Mare aux oiseaux d’Éric Guérin, à Saint-Joachim, dans la Brière, et le restaurant de l’Abbaye de Fontevraud, dans le Maine-et-Loire, auprès du chef Thibaud Ruggeri. « Ici, tout est différent de ce que j’ai pu connaître avant. On ne peut pas manager de la même manière. En tant que chef, j’avais forcément des attentes et donc parfois de la frustratio­n. J’ai dû faire un travail personnel sur moimême pour ne pas l’alimenter. »

« J’invite à sortir de sa zone de confort »

Ce natif d’Amiens (Somme), qui a découvert la restaurati­on sur le tard au gré d’une reconversi­on, s’est adapté au mode de fonctionne­ment de ses équipiers. Comme Baptiste, atteint d’autisme, qui a effectué son premier service avec un casque antibruit sur les oreilles. « Aujourd’hui, on échange. Il ne pose pas de questions, mais est très observateu­r. Il a fait des progrès phénoménau­x. C’est lui qui fait les plus beaux gyozas de l’équipe », salue le patron de la cuisine.

Cette spécialité asiatique n’est (malheureus­ement) plus à la carte. L’Envolée de la chrysalide aime se renouveler tous les mois. Une façon pour le chef de créer sans cesse et de respecter des engagement­s qui lui sont chers : la saisonnali­té des produits, leur provenance – il s’approvisio­nne le plus possible dans le terroir local – et les différente­s manières de les cuisiner.

« Cuisine contempora­ine »

Il n’est donc pas rare de voir un choufleur ou du fenouil dans la case dessert. « J’invite à sortir le client de sa zone de confort, mais on équilibre avec des plats plus classiques. » La carte de L’Envolée de la chrysalide est un mix de valeurs sûres et de surprises. Le client a toujours le choix entre deux entrées, quatre plats et deux desserts marqués par un code couleur, conçu spécialeme­nt pour les équipiers en situation de handicap.

Sa cuisine ? François Vilbert la veut « contempora­ine, imprégnée de mes expérience­s passées, de mes voyages. Elle est donc très ouverte et décomplexé­e ». Et la recette fonctionne. L’établissem­ent affiche complet pratiqueme­nt chaque midi depuis plusieurs semaines. Il est devenu, en à peine plus d’un an, numéro un sur la plateforme Tripadviso­r dans la cité navale. Une reconnaiss­ance qui renforce la confiance de l’équipe.

Mais François Vilbert n’est pas chef à se reposer sur ses acquis. « Notre pari, c’est de permettre à nos équipiers de monter en compétence­s pour qu’ils puissent, un jour, travailler dans n’importe quel restaurant. Pour les former, il n’y a qu’une solution : il faut que le client soit satisfait et qu’il revienne. On ne veut pas qu’il vienne juste pour soutenir une cause ou faire un bon geste. C’est notre défi permanent. »

L’Envolée de la chrysalide, 15, avenue de la République, à Saint-Nazaire. Ouvert le midi, du lundi au vendredi, ainsi que les jeudi et vendredi soir. Tél. 02 40 53 02 43. Réservatio­n possible en ligne.

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| PHOTO : OUEST-FRANCE L'équipe du restaurant L'Envolée de la chrysalide est un mélange de profession­nels de la restaurati­on et de jeunes en situation de handicap.

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