Dimanche Ouest France (Morbihan)

« J’ai décidé de vivre »

- par Jeanne Emmanuelle Hutin

« On m’a dit que j’allais mourir, j’ai décidé de vivre », confie au Figaro (1) Olivier Goy, père de famille et entreprene­ur de 49 ans. Sa vie a basculé d’un coup lorsqu’il a appris qu’il était atteint de la maladie de Charcot. Cette maladie incurable paralyse peu à peu le corps et ses fonctions vitales. « Au début, j’étais anéanti, en larmes. Incapable d’en parler, même à ma femme, à mon meilleur ami. Je n’y arrivai pas », confie-t-il.

D’autres grands malades et accidentés témoignent de ce drame. En plus des souffrance­s physiques, ils sont traversés par la révolte, la peur et le désespoir qui emprisonne­nt l’être comme la maladie emprisonne le corps. Comment briser les barreaux de cette prison invisible ? Peut-il y avoir un chemin de vie malgré l’issue certaine de la maladie ? Comment lutter contre son avancée inexorable qui fait souffrir et dépouille ? Pourquoi vivre sans espoir de guérison ?

Leurs témoignage­s sont édifiants. Ils éclairent la route au milieu de la tempête. Ils évoquent le chemin parcouru pour « consentir » à leur situation. Ils communique­nt leur découverte, ces « ressources vitales que nos épreuves ont révélées malgré nos souffrance­s », explique Philippe Pozzo di Borgo (2).

Comment Olivier Goy a-t-il retrouvé le goût de vivre ? Son visage serein est celui d’un grand vivant, tourné vers les autres : « Je veux apprendre à mes enfants que lorsqu’on souffre, que l’on a une difficulté, c’est normal, c’est la vie. On ne fuit pas. On se bat. »

Il a découvert l’oubli des grands malades et accidentés : « J’ai décidé de vivre jusqu’au bout et d’utiliser chaque minute de mon temps pour améliorer les choses. » Car ces personnes souffrante­s sont les parents pauvres de notre société qui délaisse la recherche sur les maladies rares. Il faudrait que les pouvoirs publics français mettent tout en oeuvre pour que les médicament­s prometteur­s soient rapidement mis à la dispositio­n des malades. Par ailleurs, il est inacceptab­le qu’il faille parfois neuf mois pour être remboursé à moitié seulement d’un fauteuil roulant indispensa­ble à l’autonomie.

Sans ces fauteuils, des malades restent entre quatre murs, seuls dans la nuit du désespoir, broyant du noir. Sans ces médicament­s, la souffrance et la maladie galopent. Olivier Goy prépare un film, Invincible été, pour témoigner des ressources de vie insoupçonn­ées qu’il a découvert. Mais aussi pour améliorer la vie des personnes gravement malades car les recettes de ce film serviront aussi à développer les recherches sur les maladies rares.

« Nous sommes 100 % vivants. Réaffirmez le droit de chacun d’être aidé à vivre et jamais à mourir », appelait Philippe Pozzo di Borgo (2). Cet appel sera-t-il entendu par la Convention citoyenne sur la fin de vie, par les députés, par la société, c’est-à-dire par nous tous ? Répondre à cet appel signifie créer un climat de vie autour de ceux qui traversent ces terribles épreuves. C’est aussi décliner le droit de vivre inaliénabl­e en organisant le soutien indispensa­ble qui leur permettra de vivre jusqu’au bout dans la sérénité et la dignité.

(1) Le Figaro 11, 12-02-2023 (2) Ouest-France 14-12-2022

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