Dimanche Ouest France (Morbihan)

« Pour bien manger, c’est simple, il faut cuisiner »

La cuisine a la cote, les Français en raffolent. Mais au quotidien, pas facile d’allier nourriture saine, écologique et économique. Laurent Mariotte, cuisinier militant du « bien manger », livre ses conseils.

- Propos recueillis par Camille DA SILVA.

La cuisine cartonne à la télévision, sur les réseaux sociaux, dans les libraires… Comment expliquez-vous cet engouement ?

La cuisine, c’est intime. C’est se faire plaisir, faire plaisir aux autres, il y a un acte de générosité derrière. Et puis, faire à manger est valorisant, donne confiance en soi, c’est une bulle, une valeur refuge. La France est le premier pays en termes de temps passé à table. Ça témoigne de notre amour pour l’assiette mais aussi pour notre terroir. Car la cuisine, c’est bien plus que des recettes, comme disait le chef Alain Chapel : elle convoque l’agricultur­e, la géographie, l’histoire, le patrimoine, la culture…

Vous vous décrivez comme un cuisinier respectueu­x de l’environnem­ent. Comment manger de façon écologique ?

Il faut suivre les saisons, manger bio quand on peut, mais avant tout local. Il faut revoir notre rapport à la terre, parce que la grande distributi­on nous a donné la mauvaise habitude d’avoir de tout, tout le temps. C’est aussi donner plus de place aux légumes, aux céréales et aux légumineus­es dans l’assiette, qui permettent pas mal de combinaiso­ns. Et manger moins de viande, mais mieux. Il faut sortir de l’élevage intensif, revenir à des exploitati­ons à taille humaine. On s’est tourné vers

l’intensif parce que c’était une volonté du général de Gaulle, pour nourrir la France après la Seconde Guerre mondiale. Mais on est allé trop loin.

Comment manger correcteme­nt, au quotidien, en cette période d’inflation ?

Faire ses courses en pensant à chacun des repas de la semaine permet de ne pas acheter ce dont on n’a pas besoin. Il faut être curieux, changer ses habitudes, et oser aller vers des morceaux qu’on ne connaît pas, des poissons de saison, des viandes moins populaires et donc moins chères. Faire des bocaux, des conserves, utiliser la congélatio­n sont aussi de bonnes pratiques pour limiter le gaspillage. Enfin, la vente en direct à la ferme permet, parfois, d’acheter moins cher. Mais de façon générale, le low cost a ses limites dans l’alimentati­on. Les choses ont une valeur et un juste prix pour être de qualité.

Bien manger passe par l’éducation des jeunes palais ?

Évidemment ! La gastronomi­e doit être une matière vivante enseignée dès l’école primaire, plusieurs fois par semaine, avec de vrais travaux pratiques, des déplacemen­ts dans les fermes. Dans plein de pays d’Europe du Nord, c’est une matière obligatoir­e comme les autres et certaines écoles ont même leur potager. C’est un pari payant sur le long terme car, qui dit des élèves qui connaissen­t les produits, dit des adultes qui auront le plaisir de cuisiner, moins concernés par la malbouffe, et donc en meilleure santé.

Justement, quels sont vos conseils pour une cuisine saine ?

Pour bien manger, il n’y a pas trentesix solutions, il faut cuisiner. Tous les plats préparés sont saturés en gras, en sel et en sucre. On peut faire des repas simples, trente minutes par jour suffisent déjà à cuisiner plein de choses ! L’important est de varier son alimentati­on, manger un peu de tout, tous les jours. Et c’est doublement gagnant, car ce qui est bon pour notre santé, est aussi bon pour la planète.

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| PHOTO : MARC OLLIVIER, OUEST-FRANCE Laurent Mariotte est l’invité de la rédaction.

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