Dimanche Ouest France (Morbihan)

L’ingénieuse technique de la couche chaude

Aussi économique­s qu’écologique­s, les couches chaudes permettent de semer au chaud. Et de récolter plus tôt. Une technique ancestrale, qui a fait ses preuves.

- Ch. T. Se nourrir de son jardin, Charles Hervé-Gruyer, Collection Résilience­s, Éditions Ulmer, 16 €.

À la tête de la Ferme du Bec Hellouin, en Normandie, Charles Hervé-Gruyer l’assure : lorsque vous aurez testé les couches chaudes, vous abandonner­ez sans regret nappes chauffante­s électrique­s et autres poêles à pétrole pour serre. Pourquoi ? « Parce que cette méthode est tout à la fois plus économique, plus écologique et plus efficace. »

De fait, pour gagner en températur­e sans consommer d’énergie, on n’a pas trouvé mieux que la couche chaude. Une technique héritée des maraîchers du XIXe siècle, qui consiste à tirer parti de la chaleur que produisent certaines bactéries en dégradant la matière organique. En l’état, les bactéries présentes dans le fumier.

Comment ça marche ?

Charles Hervé-Gruyer explique : «Le principe est simple, il s’agit de créer un microclima­t qui permettra aux végétaux de démarrer leur cycle plus tôt dans la saison. Concrèteme­nt, on façonne un lit de fumier de 60 à 70 cm d’épaisseur sur lequel on viendra disposer ses semis (en godets ou directemen­t dans des bacs sans fond, emplis de terreau). En deux à trois jours, grâce au travail des bactéries, la couche monte

ra en températur­e pour dépasser 50° C. »

Le bénéfice est double puisque la technique permet non seulement de récolter avec environ deux mois d’avance mais aussi d’obtenir, à terme, un beau compost. « Bénéfice double, voire triple, renchérit Charles

Hervé-Gruyer. Au Bec Helloin, nous posons nos couches chaudes en janvier sur une partie de la surface de notre serre, pour y démarrer les tomates, les petits pois, les aubergines… Et elles chauffent l’ensemble de la serre, ce qui profite à nos autres cultures. »

Bon à savoir

Plus la couche sera importante, plus le réchaud durera dans le temps. « Un volume minimal d’1 m3 est nécessaire pour une montée en températur­e suffisante. Partez sur une couche d’au moins 4 m² au sol, idéalement en mélangeant un vieux fumier avec du fumier frais. Vous aurez un peu moins de degrés, mais la chauffe sera prolongée. »

Arrosez sans détremper, tassez sans compacter – pour une décomposit­ion sans putréfacti­on, les bactéries auront autant besoin d’eau que d’air – et rechargez en fumier frais quand la couche aura perdu un tiers de son volume, la températur­e diminuant progressiv­ement sur quatre à six semaines.

Vous doutez encore de l’efficacité de l’opération ? Charles HervéGruye­r se souvient : « Par une nuit d’hiver à – 12° C, je suis allé vérifier la températur­e dans la serre. À 2 h du matin, l’air ambiant affichait – 2° C et la terre de mes couches chaudes, couverte d’un voile de forçage, était à 28° C… »

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| PHOTO : FERMEDUBEC.COM Avec une couche chaude bien menée, pas de problèmes de mauvaises odeurs. Seulement un doux parfum d’étable.

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