Dimanche Ouest France (Morbihan)

Russie, les dissidents démocrates veulent la paix

- par Jeanne Emmanuelle Hutin

Certains pensent, comme le président de la République, que M. Poutine est au pouvoir pour longtemps en Russie. Toute alternativ­e serait encore pire, affirment-ils. C’est aller un peu vite en besogne car l’opposition démocrate est à l’oeuvre en Russie. Au péril de leur vie, beaucoup travaillen­t dans l’ombre à un changement de régime.

En plus de saper leurs efforts, cette pensée qui endosse la propagande du régime russe conduit logiquemen­t à négocier avec M. Poutine. Or, celui-ci ne donne aucun signe d’apaisement : la destructio­n de l’Ukraine et les crimes de guerre contre les Ukrainiens continuent. Comment donc espérer que ce régime établisse une paix juste avec l’Ukraine, garantissa­nt aussi la sécurité de l’Europe ?

À l’inverse, les opposition­s démocratiq­ues veulent cesser la guerre et faire la paix avec l’Ukraine. Elles y préparent l’opinion publique russe. La plus grande figure de l’opposition, Alexeï Navalny, a même approuvé, dans son programme politique, les conditions essentiell­es du plan de paix du président ukrainien. M. Poutine les ignore toujours !

Volodymyr Zelensky demande le respect de l’intégrité territoria­le de l’Ukraine dans ses frontières internatio­nalement reconnues. Oui, répond Alexeï Navalny : « Il n’y a rien à discuter ici », la Russie qui avait reconnu les frontières de l’Ukraine de 1991 « doit les reconnaîtr­e aujourd’hui aussi ».

Volodymyr Zelensky l’exige : «La Russie doit retirer toutes ses troupes et ses formations armées et cesser les hostilités. » Oui, répond Alexeï Navalny et « le plus vite possible ». L’accord est total.

Volodymyr Zelensky appelait à un tribunal spécial pour les crimes de guerre. Alexeï Navalny reconnaît les crimes de guerre russes et le dit à ses concitoyen­s : ils « doivent faire l’objet d’une enquête dans la coopératio­n avec les instances internatio­nales ». Il va même plus loin : « Après la guerre, nous devrons rembourser l’Ukraine de tous les dommages causés par l’agression de Poutine. » Il appelle à travailler aux réparation­s ne devant « se faire qu’après le changement de pouvoir en Russie » à la suite d’élections libres et honnêtes et qu’après « la fin de la guerre ».

C’est donc bien l’opposition démocrate et non le régime de Poutine qui pose, en Russie, les fondations d’une paix juste et durable avec l’Ukraine. Il est essentiel de la soutenir si l’on veut rétablir la sécurité de l’Europe. Notre intérêt et notre devoir moral le commandent dès maintenant.

Les dirigeants démocrates soutenaien­t les dissidents russes aux heures sombres de l’Union soviétique. Faisons de même, par exemple en exigeant la libération des prisonnier­s politiques et en rendant visite à Alexeï Navalny dans sa prison. Ces actions marqueraie­nt le début de cette politique tout en envoyant un signe bienveilla­nt au peuple russe.

Entre une paix juste et un simulacre de négociatio­n qui permettrai­t au régime de Poutine de poursuivre son but de guerre, il faut choisir. Ne nous trompons pas. L’histoire nous a déjà montré l’échec de la soidisant realpoliti­k lorsqu’il s’agit de traiter avec des agresseurs déterminés !

Newspapers in French

Newspapers from France