Dimanche Ouest France (Morbihan)
Du harcèlement scolaire
« Le rôle des adultes est central, il faut agir rapidement »
Qu’est-ce que le harcèlement ?
Il se définit par des actes agressifs qui durent, se répètent et finissent par établir une relation d’emprise dont la victime ne peut pas sortir seule. Ça regroupe tous les agissements, dans tous les domaines, qui visent à nuire, à faire du mal à l’autre : isoler, humilier, insulter, lancer des rumeurs, donner des coups… Dans le cadre scolaire, la dimension de groupe est particulièrement importante, car le besoin d’appartenance est très fort au début de l’adolescence, ce qui nourrit le harcèlement.
Pour les parents, quels sont les signes que son enfant est harcelé ?
Tout changement de comportement doit vous alerter. Si votre enfant rentre grognon de l’école, dort mal, a des problèmes d’alimentation… Ce n’est peut-être pas du harcèlement, mais il ne faut pas le prendre à la légère et intervenir rapidement pour que, si c’est le cas, ça ne s’installe pas. Il est essentiel de parler avec l’enfant, lui poser des questions, sans y aller frontalement. Pensez à le rassurer, en expliquant que vous prendrez toutes
les décisions avec lui. Car généralement, si les enfants ne parlent pas, c’est qu’ils craignent que les parents n’aggravent la situation.
Vers qui se tourner ensuite ?
La première chose à faire est d’aller voir l’enseignant principal, le CPE ou un responsable de l’établissement. Ils sont, normalement, formés à ces situations. Si vous sentez d’emblée une mauvaise écoute, n’insistez pas. Tournez-vous directement vers le référent académique spécialisé dans le harcèlement. Il est dans l’obligation d’agir. Si vous avez encore des questions ou besoin d’aide, appelez le 3020, numéro gratuit et anonyme dédié au harcèlement, ou le 3018, pour le cyberharcèlement.
Quelles sont les conséquences pour un enfant harcelé ?
À court terme, le harcèlement déclenche de l’angoisse, véritable poison pour l’apprentissage. En découlent une chute des résultats scolaires, des troubles de l’alimentation ou du sommeil et, assez vite, une perte de l’estime de soi qui peut conduire à un sentiment dépressif et un risque suicidaire. À plus long terme, ça va laisser des traces et limiter considérablement les ambitions, l’ouverture aux autres, la vie sociale comme professionnelle…
Comment réagir lorsque son enfant est harceleur ?
Il faut rassurer les parents en leur disant qu’ils n’ont pas enfanté un monstre. Mais il y a sans doute des raisons pour lesquelles l’enfant est devenu harceleur, il y a quelque chose qui doit l’angoisser, qu’il n’arrive pas à dire. Sans attendre, il faut travailler là-dessus, ne pas hésiter à consulter. On doit considérer les harceleurs, eux aussi, comme des enfants qui souffrent de quelque chose et qu’on doit accompagner.
Pourquoi, de génération en génération, le harcèlement se reproduit-il ?
Parce que c’est développemental. Les enfants ne se rendent absolument pas compte des conséquences de leur comportement. Il ne faut pas leur attribuer une maturité, ça reste des enfants, très autocentrés, qui agissent en fonction de ce qu’ils ressentent avant tout. La seule solution, c’est que les adultes – parents comme professeurs – soient sensibilisés et interviennent rapidement. Leur rôle est central. Autrefois, le harcèlement était quelque chose qu’on prenait à la légère, voire qu’on encourageait, pour forger le caractère, comme un rituel de passage. Mais aujourd’hui, on connaît les conséquences psychologiques la vie durant. (1) Autrice d’Enseignants et élèves en souffrance (éditions ESF Sciences humaines).