Dimanche Ouest France (Morbihan)

Historique et grandiose

Angleterre - France : 10-53. À Twickenham, les Bleus ont surclassé le XV de la Rose, au terme d’une rencontre qui restera dans les annales. Ils sont toujours en course pour le titre.

- Londres (Angleterre). De notre envoyé spécial Ewen RENOU.

18 ans, c’est long. En février 2005, Antoine Dupont n’avait pas encore de poils au menton. Romain Ntamack siégeait dans les tribunes pour assister aux exploits de son père Émile. Fabien Galthié, lui, avait raccroché les crampons depuis quelques mois afin d’embrasser une carrière d’entraîneur, au Stade Français pour commencer.

Hier, ces hommes-là ont mis fin à cette longue disette tricolore sur le sol anglais dans le Tournoi. Ils ont aussi, une fois de plus, laissé leur trace dans le livre d’or des plus belles performanc­es du XV de France.

À tête reposée, quand la fièvre du samedi soir sera retombée, il faudra prendre le recul nécessaire et se demander quelle place tient cet exploit au panthéon du rugby tricolore ? À coup sûr, il devrait se classer dans le haut de la pile.

« On voulait sortir le match parfait »

Dans un Twickenham éberlué - où la Marseillai­se et les Allez les Bleus ont vite dépassé les Swing Low, Sweet Chariot à l’audiomètre - les Français ont passé la bagatelle de 53 points à leurs chers ennemis, qui n’en finissaien­t plus de ramasser le ballon dans leur en-but. Ne vous pincez pas, vous ne rêvez pas. Il s’agit du plus large succès des Bleus à Londres. Une terre où ils n’avaient jusqu’ici levé les bras qu’à onze reprises - la dernière en 2005 - en 117 ans de rivalité.

Pas de quoi donner le vertige à Antoine Dupont, le capitaine français, qui avait conservé son flegme britanniqu­e après la rencontre : « On réalisera quand on aura arrêté notre carrière. On parlera de notre vieille gloire, entre nous, autour d’une bière. Cette victoire est une étape importante dans notre projet. »

Le demi de mêlée reconnaiss­ait tout de même : « On peut être fiers de nous quand on voit le score. »

Son sélectionn­eur, un brin ému, était plus dithyrambi­que sur la performanc­e de ses ouailles. « On voulait

sortir le match parfait, livrait-il. Ona été braves, engagés, déterminés et conquérant­s. C’est une journée par

faite à Twickenham, c’est rare. »

Pour gifler les Anglais, qui n’avaient jamais encaissé autant de points dans leur antre adoré, la bande de Jonthan Danty est revenue à ses origines dans le temple du rugby. Cet ADN, balbutiant depuis le début du Tournoi, a de nouveau éclaté, hier, sous la pluie londonienn­e.

Sept essais géniaux

Après une entame parfaite et un premier essai de Thomas Ramos, les Français se sont appuyés sur ces préceptes qui les ont rendus invincible­s durant quatorze matches de rang (de novembre 2021 à février 2023) : du jeu à une passe, frontal, une défense de fer, de la densité dans les rucks et de l’efficacité dans le camp adverse.

Hier, tous les ingrédient­s étaient réunis, face à des Anglais peu inspirés et sans saveur. Avec la touche du chef : des essais géniaux et créatifs. Les Bleus, qui ont tous élevé leur curseur individuel, ont sublimé la recette. Avec sept essais inscrits, ils ont sans doute livré le plus beau récital offensif depuis l’arrivée de Fabien Galthié.

Dans l’euphorie, on pourrait presque oublier de parler du côté pratique. Grâce à ce succès bonifié, les Français, qui ont longtemps communié avec leurs supporters après le coup de sifflet final, sont toujours en vie dans la course au titre.

Pour cela, après avoir enterré les Anglais, ils devront venir à bout des Gallois, un autre animal blessé, et croiser les doigts pour que l’Irlande fasse un faux pas.

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| PHOTO : AFP Les Bleus célèbrent le deuxième essai de Damian Penaud.

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