Dimanche Ouest France (Morbihan)

« Il faut remettre les pêcheurs au centre du débat »

À Lorient, hier, durant plus de deux heures, les représenta­nts de la filière pêche se sont réunis. Ils travaillen­t à coordonner une action pour alerter sur la situation des pêcheurs.

- Delphine LANDAY.

« Ce qui a mis le feu aux poudres c’est que la commission européenne s’essuie les pieds sur les vingtcinq ans de travail engagé avec la filière et les pêcheurs pour préserver la ressource. »

Hier, 11 h, réunion de crise au port de Keroman à Lorient. Le comité départemen­tal des pêches, présidé par Olivier Le Nézet, tente d’apaiser les colères des marins après plusieurs actions coup de poing dans la semaine, à Rennes et à Lorient. Il veut aussi trouver avec eux un autre chemin pour que cette colère soit visible.

« Les pêcheurs ne sont pas les criminels de leur propre environnem­ent marin, ils cohabitent avec lui. » La décision du conseil d’État concernant la capture accidentel­le de dauphins est également la cause de cet embrasemen­t.

« Y’a du chinchard en pagaille ! »

Les discussion­s ont duré jusqu’à 13 h, perdant parfois au passage quelques-uns des profession­nels.

« Ça ne sert à rien d’écouter ça ! S’il y a un plan de casse, je mettrai mon bateau… », lâche l’un des pêcheurs en tournant les talons. « À la vitesse où ça va, on va tous y aller au plan de casse », grince un collègue qui préfère rester débattre.

Le temps d’une pause cigarette, les gars échangent sur leurs pratiques, l’histoire de la profession, leurs connaissan­ces de la mer. « Y’a du chinchard, des sardines en pagaille, dit l’un d’eux, c’est pour ça qu’on a autant de dauphins dans nos zones de pêche. Qu’ils nous laissent la possibilit­é de pêcher le poisson bleu et les dauphins iront plus loin. » De quoi éviter des captures involontai­res. « Le thon rouge, c’est pareil, il

y en a plein, alors que l’eau est à 9°. » À l’issue de la réunion, certains pêcheurs étaient sceptiques à l’idée de faire route pêche.

Plus globalemen­t, les pêcheurs dénoncent le poids des associatio­ns environnem­entales. « Elles ne sont pas pour la défense d’une pêche durable, elles militent pour un arrêt de la pêche, clashe Olivier Le Nézet. Il faut prendre conscience qu’il faut protéger les pêcheurs. Nous avons la ressource la mieux gérée au monde. Il faut cesser d’ajouter sans cesse des réglementa­tions et mesurer l’impact socio-économique de ces décisions. » Les pêcheurs pointent l’abandon de l’État, plus « à l’écoute d’associatio­ns environnem­entales à la vision souvent caricatura­le ».

Une action nationale

Et pour parvenir à être entendu, la filière, dans son ensemble, se prépare à au moins une journée « Filière morte », une action nationale. « L’initiative est partie du comité des pêches de Loire-Atlantique, explique Olivier Le Nézet. L’idée c’est que tout soit à l’arrêt, pas de bateau en mer, pas de criée, pas de revente, pas de mareyeurs… jusqu’aux étals de poissonner­ie, y compris dans les grandes et moyennes surfaces. »

« Il faut remettre les pêcheurs au centre du débat et qu’on mette en place, dans la durée, un plan de développem­ent économique de la filière halieutiqu­e. » Tous les comités de pêche régionaux de France se réunissent, ce lundi 25 mars, à ce sujet. « Nous allons également monter cette opération de filière à l’arrêt pour montrer l’impact économique que cela représente. »

Un marin en mer c’est quatre emplois à terre, aiment à rappeler les pêcheurs.

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| PHOTO : OUEST-FRANCE Les pêcheurs de Lorient ne sont pas repartis en mer hier, et plusieurs d’entre eux n’étaient pas décidés à reprendre le travail.

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