Dimanche Ouest France (Morbihan)
La Quiberonnaise est sirène professionnelle
Elle a grandi à Quiberon, a vécu deux ans en Chine, suivi une formation d’apnée et d’instructrice en plongée. À 29 ans, Floriane Auffret est sirène professionnelle. Rencontre.
Si l’on se réfère aux héros de Disney, elle a davantage le physique de Cendrillon que d’Ariel, dont une nouvelle adaptation est sortie au cinéma, fin mai. Blonde, yeux bleus, regard souriant, Floriane Auffret nous accueille à Quiberon. Là où elle a grandi. Avec un papa, Jean-Luc, ancien sauveteur en mer, ancien cuisinier à la thalassothérapie ; une famille de pêcheurs ; une grand-mère, Lucienne, qui a travaillé à la conserverie La Belliloise, autant dire qu’elle a, depuis l’enfance, le regard tourné vers l’océan. « J’ai appris à nager en pleine mer, ici, à la petite plage à Port-Maria. » Est-ce là qu’elle prend le virus, à devenir Floria Mermaid, sirène de profession, dont l’activité est portée et valorisée sur les réseaux sociaux ? « J’avais une idée floue de ce que je souhaitais faire. Je voulais travailler dans le milieu de la mode et de la création. »
Au lycée Saint-Louis, à Lorient, elle prend des spécialisations en japonais et en audiovisuel. Interne, elle profite des activités comme comédie musicale. Avec l’association Presqu’île danse, Floriane Auffret étaie son « goût pour le monde du spectacle. Le fait de porter des costumes, d’évoluer dans un milieu artistique, me plaisait. »
« Je voulais voir le monde »
À un moment, le « caillou » devient trop petit et, étudiante, elle a envie d’aller voir ailleurs : « Je voulais voir le monde. » Quinze jours après sa majorité, Floriane s’envole vers la Chine et va passer deux années universitaires à Canton, à la Guangdong University of Foreign Studies. « Je suis passée d’une ville de 4 000 à quatorze millions d’habitants. » Elle découvre les cultures asiatiques, apprend le mandarin. À son retour en France, – tout un symbole –, elle s’installe dans le 13e arrondissement de Paris. Dans le quartier chinois. Elle exerce différents métiers, sans finalement se trouver : « Le déclic, je l’ai le 28 octobre 2018. Je suis en vacances à Fort-Lauderdale, en Floride. J’assiste à un spectacle de sirènes au Wreck bar, un ballet aquatique, où des nageuses performent sous l’eau, avec leurs propres costumes. Et elles en vivent. » On est si loin et si proche en même temps de l’idée de la petite sirène, du conte d’Hans Christian Andersen, de l’univers du Disney. «Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à imaginer. »
En France, le « business » du mermaiding, – c’est ainsi qu’on l’appelle – est déjà lancé. Claire Baudet, artiste résidente à l’Aquarium de Paris, qui « est devenue une amie proche », fait figure de pionnière dans le milieu. Elle y a consacré un livre, une thèse universitaire. « Je fais partie, continue Floria Mermaid, de la seconde génération des sirènes professionnelles. Beaucoup de femmes avaient défriché le terrain avant moi. Et le plus dur était alors de faire comprendre que cela était un métier. »
Par conviction, Floria Mermaid ne nagera jamais en aquarium. Elle se spécialise dans ses premiers amours, la mode, à travers la « création de tops de sirènes, de serre-tête pour les enfants », de plastron pour les tritons, avec une coquille SaintJacques sur le torse.
En 2019, la jeune Morbihannaise monte ainsi son autoentreprise Floria’s Lagoon. Cette même année, elle participe au concours de Miss Mermaid France, où elle termine première dauphine : « Cela a été un tremplin pour lancer les activités dans le milieu. » C’est aussi l’heure des premiers shootings photos, évidemment à Quiberon. « Pour ne pas se marcher sur les nageoires, j’ai toujours voulu cibler l’artisanat, la création d’objets. »
« En accord avec mes valeurs »
Les réseaux sociaux, – toutes plateformes confondues –, sont un révélateur. Assez pour que son travail soit repéré. Ainsi, depuis 2020, Floria Mermaid est ambassadrice de la marque Capecali, basée en Californie, concevant des nageoires en lycra et tissus. « J’ai accepté car je suis en accord avec cette marque responsable écologiquement et socialement. »
Floria Mermaid connaît la volatilité d’une telle activité, la crise Covid aurait pu la décourager. Mais le fait d’exister, d’apparaître conjugué aux débuts de Tik Tok, qui « m’a fait exploser », a été salvateur. Une vidéo atteint le chiffre de 12,5 millions de vues : Floriane, qui a une formation d’apnéiste (elle reste trois minutes et demie en statique sous l’eau), évolue à l’école de plongée d’Isanthea : «La vidéo montre la découverte de la fosse de profondeur où je m’entraîne. » Les reels, de 15 secondes à une minute, boostent son univers. Les différents comptes sur la toile, qu’elle gère elle-même, sont monétisés.
Avec un diplôme d’instructrice en poche, elle devient ambassadrice sirène pour le centre Padi, organisation internationale de formation à la plongée sous-marine de loisir. « Mon père, mes trois soeurs, sont très bienveillants. Les critiques ou les commentaires, quand ils viennent, naissent de l’ignorance. »
Ses projets ? Continuer l’activité de sa boutique en ligne. Une nouvelle collection sort. Et tant qu’à être de passage à Quiberon, autant profiter de la beauté de la baie, pour allier plaisir et séances professionnelles.