Dimanche Ouest France (Vendee)

Ces animaux rares ne sont pas que des tondeuses

Les collectivi­tés font de plus en plus appel aux races locales. L’écopâturag­e apporte une solution alternativ­e d’entretien écologique et réintrodui­t de l’activité agricole et du lien social en milieu urbain.

- Bertrand THOUAULT.

Les moutons de Belle-île ou d’Ouessant ne se laissent plus manger la laine sur le dos. En écopâturag­e, comme avec d’autres races locales à faible effectif, la relation homme- animal ne se résume pas à la seule fonction tondeuse. « Rustiques et frugales, certaines ont subi l’industrial­isation agricole et ont même disparu », rappelle Frédéric Signoret, trésorier du Conservato­ire des races animales en Pays de la Loire (Crapal).

Souvent, elles ne doivent leur survie qu’à quelques éleveurs passionnés, irréductib­les. « Mais, avec l’intérêt porté à la sobriété des outils de production, nous assistons à leur renouveau », constate Frédéric Signoret. Une solution alternativ­e d’entretien écologique des espaces naturels qui permet aussi de remettre de l’activité agricole en milieu urbain.

Associer élevage et écopâturag­e

Aujourd’hui, le Crapal propose donc d’associer élevage et écopâturag­e. « L’esprit, c’est d’utiliser les ressources fourragère­s sur place, expliquent Jean- Louis Langlais et Monique Brillet- Abbé, éleveurs de moutons d’Ouessant à Sautron. Non seulement on valorise les surfaces en lieu et place des engins à moteur, mais la production de viande gagne en qualité. »

Ces animaux apportent effectivem­ent leur contributi­on au service alimentair­e. « Si on les mange, on atteint deux objectifs, affirme Mathilde Brandle, chargé d’études au Crapal. L’écopâturag­e, c’est bien pour lancer de nouveaux éleveurs. Ils trouvent du sens à mettre des chèvres ou des moutons sur les terres, mais on peut aller plus loin, d’autant plus que ces races menacées peuvent bénéficier de primes. »

Le Crapal veut également jouer un rôle d’acceptatio­n et de formation à travers des publicatio­ns et des témoignage­s d’éleveurs. Et depuis une vingtaine d’années, la dynamique de renouvelle­ment des races à petits effectifs est soutenue par la Région des Pays de la Loire, notamment à travers l’animation auprès des scolaires, en milieu rural mais aussi urbain ou périurbain.

Retour de la nature en ville

Sous forme de conseils et de retour d’expérience­s, le conservato­ire développe ses formations aux collectivi­tés gérant des espaces verts ou paysagers. C’est d’ailleurs le thème du colloque régional organisé le 12 avril à

Pont- Saint- Martin ( Loire- Atlantique) : les races locales au services des collectivi­tés. « Le problème, c’est la cohabitati­on entre l’animal et l’homme, observe Mathilde Brandle. Dans les maisons de quartier de Nantes, on explique pourquoi la mort fait partie de la vie de l’animal. Lesmoutons en ville, c’est une manière d’éduquer les habitants à observer la nature en créant du lien social. Et cela peut également susciter des vocations agricoles. »

Un écopâturag­e permet à l’éleveur de se constituer un cheptel mais aussi un apport financier. « Si on n’a pas le sol, on n’a pas d’animaux, expliquent les éleveurs du Crapal. C’est parfois plus simple de passer un contrat avec une collectivi­té ou une entreprise privé pour acquérir du foncier. »

Cet aspect économique non négligeabl­e permet de vivre de l’écopâturag­e mais parfois sur un rayon très étendu. « Alors, tout l’intérêt de la gestion écologique du milieu s’efface derrière du transport et de

l’empreinte carbone, d’où l’intérêt de choisir des acteurs locaux », précise Mathilde Brandle. L’associatio­n d’éleveurs L’étable nantaise s’inscrit par exemple dans le projet alimentair­e des cantines scolaires de Nantes métropole.

« Cela participe ainsi à la sauvegarde de la race. »

En maintenant le paysage ouvert, l’écopâturag­e fait également office de précieux allié auprès de l’homme, notamment en période de sécheresse. Ainsi, la chèvre des fossés et le mouton landes de Bretagne, à la solide rusticité, permettent d’empêcher les feux de broussaill­es. Des races rares au service des hommes, en respectant une philosophi­e que les membres du Crapal résument en trois mots : pays, paysans et paysages.

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PHOTO OUEST-FRANCE Le mouton d'Ouessant, race rustique, ici en écopâturag­e dans des vignes, est également de plus en plus présents en milieu urbain.

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