Dimanche Ouest France (Vendee)

Enquête sur les suprémacis­tes « blancs »

En France, comme en Allemagne, le regain d’activité de l’ultradroit­e et de ses quelque 3 000 « guerriers blancs » est sous surveillan­ce.

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Étienne Huver, coauteur de « Ultradroit­e et groupes néo- nazis : la nouvelle menace terroriste » ( Enquête exclusive).

Qu’est- ce qui a déclenché cette enquête ?

La mouvance de l’ultradroit­e est devenue plus active en ligne durant le confinemen­t. Ces « apôtres » de la « race blanche » se radicalise­nt et recrutent sur les forums et les messagerie­s chiffrées de type Telegram. Un regain observé par les services de sécurité et des chercheurs spécialisé­s. En France, le nombre d’activistes, surnommés les « guerriers blancs » par le ministre délégué des Outre- mer, Jean- François Carenco, est estimé à 3 000, dont 1 300 fichés « S », particuliè­rement surveillés par les services de renseignem­ent.

Qui sont ces su pré ma cistes blancs?

Ils se qualifient eux-mêmes de racistes, racialiste­s ou suprémacis­tes, cultivent la haine des « étrangers », des migrants, diffusent la théorie du « grand remplaceme­nt » et appellent sur les réseaux à la « guerre civile raciale ». Membres de différents groupes, anciens (GUD, Identitair­es) ou récents (Uniter, Braves…), ils entendent agir en dehors du champ politique. Les juifs ou homosexuel­s sont aussi ciblés. Ceux qui ont

accepté de témoigner, parfois à visage découvert, donnent une image lissée, plus présentabl­e. D’autres, qui se disent repentis, expliquent qu’ils étaient prêts à tuer.

La nation et la religion passent au second plan ?

Leur enjeu est la « race blanche », avant le drapeau national ou la chrétienté. Certains s’installent en Roumanie, Hongrie, Pologne ou en Ukraine, avant la guerre : des pays qu’ils estiment « encore blancs ». Nous avons tourné en France, en Allemagne et en Roumanie. Ce type de groupuscul­es existe aussi en Grande- Bretagne, Italie, Espagne…

L’idéologie nazie du IIIe Reich est-elle centrale ?

Certains préfèrent s’appuyer sur la peur du déclasseme­nt et du « remplaceme­nt ». Mais le culte du régime hitlérien est toujours très présent. Commémorat­ions, défilés paramilita­ires, cérémonies nocturnes en famille avec croix gammées et flambeaux, circulatio­n d’oeuvres, souvenirs de l’Allemagne nazie...

Vous avez choisi de ne pas diffuser les propos les plus choquants ?

Nous avons été très attentifs à ne pas relayer ces appels à la haine, parfois extrêmemen­t violents. Et nous avons flouté le nom des sites.

Dans quelle mesure craint-on l’infiltrati­on de la police et de l’armée ?

C’est une stratégie revendiqué­e. En Allemagne, cette crainte a été exprimée publiqueme­nt en 2020 par le ministre de l’Intérieur. En décembre 2022, plusieurs officiers d’élite allemands ont été arrêtés lors d’un coup de filet contre un complot qui visait le gouverneme­nt. En France, Mediapart a révélé des dizaines de cas de militaires français qui affichaien­t leur nostalgie du IIIe Reich.

Comment est évalué le risque de passage à l’acte ?

Nous évoquons certains crimes commis en 2022, commele meurtre du rugbyman Federico Aramburu, le 19 mars 2022, par deux anciens militaires membres duGUD. Ou la fusillade devant le bar LGBTQ à Bratislava, en Slovaquie, dont le jeune auteur s’est ensuite suicidé. La menace terroriste d’extrême droite a fait l’objet d’un débat le 3 avril à l’Assemblée nationale.

M6, 23 h 15.

Propos recueillis par

Sonia LABESSE.

 ?? | PHOTO : CAPTURE D’ÉCRANM6 ?? Les suprémacis­tes néo-nazis diffusent des images de propagande sur Facebook.
| PHOTO : CAPTURE D’ÉCRANM6 Les suprémacis­tes néo-nazis diffusent des images de propagande sur Facebook.

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