Dimanche Ouest France (Vendee)

De l’écorce d’orange dans les pneus de course

Fournisseu­r du MotoE, Michelin développe pour le championna­t des pneus composés jusqu’à 52 % de matière durable, avec l’ambition de généralise­r ces innovation­s à toutes les gammes.

- Yvain PRAUD.

Des peaux de citron, de l’huile de tournesol : voilà ce qui compose, en partie, les pneus montés sur les machines du MotoE. Fournisseu­r exclusif du championna­t électrique, mais aussi du MotoGP, Michelin travaille en compétitio­n à satisfaire son ambition de 100 % de matière durable dans tous ses pneumatiqu­es en 2050, avec une étape à 40 % en 2030.

« Comme récupérer les oeufs d’un gâteau »

Sur les MotoE cette saison, 52 % des gommes arrières sont ainsi constituée­s de matière durable, c’est- à- dire « de matériaux biosourcés renouvelab­les et de matériaux recyclés » , indique Annalisa De Simone, responsabl­e de la communicat­ion sur les sujets d’innovation du manufactur­ier.

Les premiers correspond­ent aux ressources « provenant de la nature et renouvelab­les à l’échelle d’une vie humaine, précise- t- elle. On essaie aussi de ne pas entrer en concurrenc­e avec la filière alimen

taire. » Les écorces d’agrumes permettent par exemple de produire du limonène, une résine utilisée comme plastifian­t pour les gommes.

La seconde catégorie comprend notamment du plastique PET (qu’on retrouve sur la plupart des bouteilles notamment), du polystyrèn­e ou des pneus en fin de vie, réexploité­s grâce à des technologi­es développée­s par des entreprise­s partenaire­s de Michelin. Le polystyrèn­e est ainsi retransfor­mé en styrène, à partir duquel il est fait, grâce à un procédé électrique par micro- ondes. « C’est comme si j’avais un gâteau et que je pouvais en récupérer les oeufs, la farine… Je reviens à la matière d’origine. Je peux la réinjecter dans un gâteau qui sera aussi bon que le premier, et je peux aussi en faire autre chose » , illustre Annalisa De Simone. Combiné à une autrematiè­re, le butadiène, obtenu par fermentati­on de biodéchets, ce styrène permet de synthétise­r du caoutchouc.

Le tout « sans compromis sur la performanc­e » , éprouvée à l’extrême par les conditions de course. C’est en partie pour cela, en plus du fait qu’il n’a pas été amélioré par rapport à l’an passé, contrairem­ent à son pendant arrière, que le pneu avant n’est encore composé que de 34 % de matière durable : « Il est plus petit, donc c’est un peu plus compliqué de garder les mêmes performanc­es avec des matériaux durables, d’autant plus qu’il est très sollicité. »

Car l’objectif, à terme, est bien de généralise­r les innovation­s développée­s. Au MotoGP, pour lequel Michelin produit des pneus qui comprennen­t pour lemoment moins de matière durable, mais aussi au grand public. « La MotoE, c’est un peu notre laboratoir­e, souligne Annalisa De Simone. Tout ce qu’on apprend dans des situations en piste, on peut le mettre au service des pneus de «monsieur tout- le- monde». »

L’enjeu, pour ce faire, est désormais d’accroître les capacités de production. « Le problème c’est la disponibil­ité des matières premières, indique la représenta­nte de la marque. Ces technologi­es- là existent, mais elles sont au stade de démonstrat­eur industriel, avec des petites quantités. Pour alimenter toutes nos usines, il faut pouvoir transforme­r plus de déchets en beaucoup plus de matériaux durables. »

 ?? | PHOTO : JÉRÔME FOUQUET/OUEST-FRANCE. ?? Au paddock MotoE, Annalisa De Simone détaille le processus de fabricatio­n des pneus fournis pour le championna­t électrique.
| PHOTO : JÉRÔME FOUQUET/OUEST-FRANCE. Au paddock MotoE, Annalisa De Simone détaille le processus de fabricatio­n des pneus fournis pour le championna­t électrique.

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