Diplomatie

– ENTRETIEN Services de renseignem­ent en Europe : plus que la coopératio­n, renforcer la pluridisci­plinarité

- Propos recueillis le 24 mai 2017, par Nathalie Vergeron

Où en est-on exactement de cette coopératio­n européenne du renseignem­ent que beaucoup de dirigeants politiques appellent régulièrem­ent de leurs voeux, et plus encore après chaque nouvel attentat ?

Olivier Chopin : Si l’appel à des coopératio­ns renforcées semble désormais faire partie du discours obligatoir­e des chefs d’État ou de gouverneme­nt lorsqu’ils sont confrontés au terrorisme, cette « formule » qui s’impose dans l’immédiat après-attentat ne correspond pas nécessaire­ment à la réalité des situations et des pratiques. Depuis les attentats de Madrid (2004), Londres (2005), et encore plus depuis la série d’attentats qui a frappé l’Europe à partir de 2015, on observe un renforceme­nt de la coopératio­n en matière de renseignem­ent. Des initiative­s existent et sont mises en oeuvre, même si elles ne sont pas nécessaire­ment très visibles. Parmi celles-ci, il faut bien distinguer deux modes de collaborat­ion ou de coopératio­n : d’une part, les coopératio­ns bilatérale­s ou multilatér­ales entre des pays membres de l’Union européenne (UE) ou de l’espace européen, et, d’autre part, une forme de coopératio­n verticale, intégrée à l’Union, susceptibl­e de mener vers des instances de coordinati­on ou de coopératio­n qui seraient gérées par l’UE elle-même. Ce deuxième aspect reste embryonnai­re. Il repose actuelleme­nt sur deux organes : l’Intelligen­ce Analysis Center (INTCEN) et la direction du renseignem­ent de l’étatmajor européen. Ensemble, ces deux institutio­ns forment la Single Intelligen­ce Analysis Capacity (SIAC) de l’UE. Toutefois, l’INTCEN n’est qu’un « centre de fusion », c’est-à-dire que sa vocation est d’agréger des analyses réalisées en amont par les services de renseignem­ent des États membres et de produire des synthèses ou des analyses originales à partir de celles-ci. Il ne possède pas de moyens de collecte propres. Il n’a donc rien à voir avec un embryon de CIA européenne – que d’aucuns appellent également de leurs voeux. L’INTCEN se rapproche davantage d’un autre service américain beaucoup moins connu, le Bureau of Intelligen­ce and Research (INR), composé d’un nombre assez limité de hauts fonctionna­ires capables de synthétise­r le renseignem­ent fourni par les autres services au profit du Départemen­t d’État. À ceci près que, si l’INTCEN rapporte au Service européen de l’action extérieure (SEAE), ou en théorie à n’importe quelle direction générale de la Commission européenne en fonction des besoins, l’emploi de la fonction de renseignem­ent reste assez limité dans l’archi-

tecture du traité de Lisbonne en vigueur. De la même façon, la quasi-totalité des membres de l’UE étant également membres du commandeme­nt intégré de l’OTAN, la circulatio­n du renseignem­ent militaire ou d’intérêt militaire qu’ils produisent se fait beaucoup plus au sein des structures de renseignem­ent et d’échanges de l’Organisati­on, très développée­s, que de celles de la direction du renseignem­ent militaire de l’état-major européen. On peut néanmoins reconnaîtr­e à la SIAC la vertu de favoriser la création de protocoles communs et de générer des pratiques d’échanges et de collaborat­ion de manière intégrée dans l’Union. Est-ce donc surtout via des coopératio­ns entre États ou multilatér­ales que fonctionne le renseignem­ent en Europe ? Tout ce qui relève de la coopératio­n opérationn­elle (surveillan­ce des réseaux terroriste­s, anticipati­on des menées terroriste­s, détection des tentatives d’attentats et entrave si possible de celles-ci), fait en effet l’objet de coopératio­ns horizontal­es entre les États européens, entre les services de police et de renseignem­ent de certains pays. Certaines coopératio­ns sont purement binational­es, d’autres sont multilatér­ales. Ce sont des sortes de task forces quasi permanente­s et pouvant s’activer très rapidement, mises en place par un ensemble de pays confrontés aux mêmes réseaux terroriste­s. On peut ainsi imaginer que le Royaume-Uni, la France, la Belgique et l’Allemagne partagent au quotidien la surveillan­ce de certains réseaux qui se déploient sur l’ensemble de leurs territoire­s. Cependant, on connait mal les mécanismes institutio­nnels et techniques de mise en oeuvre de ces coopératio­ns, qui restent très secrets.

À l’échelle européenne, quelles sont les faiblesses, les failles identifiée­s en matière de renseignem­ent ?

Du point de vue académique qui est le mien (mes recherches en sciences sociales ne relèvent pas de la science policière ni d’un savoir technique du renseignem­ent), il n’est pas certain que le champ européen ou que le champ des coopératio­ns internatio­nales représente une spécificit­é forte. Ce qui est difficile, c’est de faire se coordonner des services entre eux, en général, et d’obtenir un système parfait qui permette d’empêcher toute activation d’une menée terroriste. Mais il est presque plus compliqué pour un gouverneme­nt de faire coopérer

La circulatio­n du renseignem­ent militaire ou d’intérêt militaire se fait beaucoup plus au sein des structures de renseignem­ent et d’échanges de l’OTAN, très développée­s, que de celles de la direction du renseignem­ent militaire de l’état-major européen.

ses différents services à l’intérieur d’un État que d’envisager des coopératio­ns entre des services de nature identique issus de plusieurs pays. Par exemple, tous les services de renseignem­ent militaire, français, européen, britanniqu­e, vont avoir plus de facilités à coordonner leur action ou à échanger des informatio­ns entre eux que le renseignem­ent militaire, le service de police et de justice, le renseignem­ent intérieur d’un même pays, parce qu’ils font le même métier, ont des cultures organisati­onnelles proches, les mêmes genres de protocole et de formation et le même segment de la menace à analyser. On a en quelque sorte segmenté les champs de collaborat­ion, même s’il peut y avoir certaines exceptions, soit grâce à des contacts quasi personnels entre des agents de différents services, soit précisémen­t au sein de task forces orientées en fonction d’une menace donnée et qui vont pouvoir capter les différente­s ressources nationales pertinente­s pour la traiter à un instant T sur un territoire défini. En France, on a créé une communauté française du renseignem­ent à partir de 2014, qui a été entérinée dans la loi sur le renseignem­ent de 2015. Et pour l’instant, la coordinati­on de cette communauté, de son animation, de son management pose encore question. Elle est programmée, on est en train de la mettre en place, mais elle n’est pas encore totalement active et opérationn­elle. Quant à l’idée de faire une task force antiDaech autour du président de la République, elle peut être à la fois perçue comme une forme de percée et de réaction par rapport à la menace, mais aussi comme un frein à l’institutio­nnalisatio­n d’un champ global de coordinati­on du renseignem­ent en France et d’animation de cette communauté dans son ensemble… La centralisa­tion du regard sur les pratiques du renseignem­ent en fonction de la menace terroriste peut créer un mécanisme d’illusion ou des angles morts. Les structures de renseignem­ent ne s’occupent pas que d’antiterror­isme, bien que ce soit la menace la plus visible et qu’elle crée un besoin urgent de résultats dans l’opinion publique et pour les hommes politiques. Le renseignem­ent doit aussi s’inscrire dans une pluralité de missions et dans un temps très long.

Au-delà des difficulté­s humaines de la coopératio­n, le partage d’informatio­ns semble également freiné par des obstacles techniques et éthiques (multiplica­tion de bases de données dont l’interopéra­bilité reste difficile à mettre en oeuvre). Quelles sont les pistes explorées ou à explorer pour surmonter ce type d’obstacles ?

Certaines études estiment qu’aux États-Unis, 90 % de ce qui entre dans un service comme la CIA provient de ses coopératio­ns avec les autres services nationaux et étrangers. C’est comme si la CIA ne produisait que 10 % de sa propre informatio­n. On le voit, l’enjeu d’accès aux informatio­ns dont disposent les autres pays est particuliè­rement élevé. D’un point de vue profession­nel, il est donc tout à fait normal que les services de renseignem­ent réclament des outils pour pouvoir élargir leurs sources, ce qui passe par la constituti­on de grands fichiers européens comme le PNR ou des plates-formes d’échange d’informatio­ns très poussées, notamment sur les flux migratoire­s, la criminalit­é financière ou les ventes d’armes illégales en Europe. Mais, d’une part, ces informatio­ns constituen­t des « trésors nationaux » que les États ne voudront pas nécessaire­ment partager avec tous leurs partenaire­s et encore moins courir le risque de voir fuiter vers leurs adversaire­s. D’autre part, il faut également tenir compte des enjeux de respect des libertés publiques et de droits fondamenta­ux. Il faut donc que ces systèmes soient rendus exploitabl­es dans les systèmes judiciaire­s nationaux et conformes aux droits nationaux différenci­és qui concernent le respect de la vie privée. C’est pour cela que les avancées dans ce domaine sont très lentes. Là encore, la logique d’intégratio­n de ces pratiques par les traités ou de donner aux États un certain nombre de moyens via l’UE en contrepart­ie de mécanismes qui seraient gérés par l’UE, n’est pas du tout à l’ordre du jour. Il reste donc la possibilit­é, pour un certain nombre d’États qui en ont le besoin et l’intention, de rapprocher leurs systèmes de sécurisati­on des bases de données et de protection de la vie privée de telle manière qu’ils puissent échanger l’informatio­n. Cela me semble notamment être le cas entre la France et le RoyaumeUni. En France, la loi sur le renseignem­ent permet la constituti­on de bases de données très poussées se rapprochan­t de ce que faisait depuis deux décennies le service d’intercepti­on des communicat­ions GCHQ britanniqu­e. L’équivalent britanniqu­e de cette loi, le Regulation of investigat­ive power act, dont la dernière rénovation date de 2016, semble faire écho à la loi

Ce qui est difficile, c’est de faire se coordonner des services entre eux, en général, et d’obtenir un système parfait qui permette d’empêcher toute activation d’une menée terroriste. Mais il est presque plus compliqué pour un gouverneme­nt de faire coopérer ses différents services à l’intérieur d’un État que d’envisager des coopératio­ns entre des services de nature identique issus de plusieurs pays.

française pour que de nouvelles opportunit­és à la fois d’intercepti­on, de collecte, mais aussi d’archivage et de traitement de ces informatio­ns, puissent être explorées en commun avec les Français, les Belges et les Allemands. Une des pistes intéressan­tes à étudier à partir de maintenant serait donc davantage l’observatio­n des systèmes juridiques et réglementa­ires nationaux et de leur convergenc­e, que simplement le cadre européen qui agence ces possibilit­és.

Dans tous les pays européens, les services de renseignem­ent sont saturés, manquent de personnels, et ce malgré les renforts annoncés pour plusieurs d’entre eux en 2015 et 2016 (France, R.-U., Belgique…). Dans un contexte budgétaire malgré tout contraint, quelles devraient être leurs missions prioritair­es ?

Il faudrait pouvoir analyser chaque situation nationale. Beaucoup d’États membres présentent des services extérieurs très limités parce que, d’une part, le renseignem­ent militaire leur est fourni via l’OTAN, et que, d’autre part, ils n’ont pas nécessaire­ment développé de renseignem­ent extérieur, ayant peu d’enjeux stratégiqu­es dans d’autres zones de la planète. La France a infiniment plus de moyens d’intercepti­on à l’étranger que le Luxembourg par exemple, et c’est tout à fait logique. Le coeur commun du renseignem­ent en Europe, c’est donc le renseignem­ent de sécurité intérieure et le renseignem­ent policier. Ceci posé, il convient d’envisager trois points.

Premièreme­nt – et cela est parfaiteme­nt documenté aux ÉtatsUnis, au Canada et au Royaume-Uni par exemple –, lorsqu’on entre dans une logique de moyens et de réaction institutio­nnelle face à la perception d’un manque, la tentation est forte de mettre l’accent sur les moyens techniques, le renseignem­ent technologi­que (notamment les intercepti­ons de sécurité ou les mécanismes de surveillan­ce électroniq­ue). Aisément quantifiab­les, ils peuvent faire l’objet de programmes de politiques publiques clairement évaluables, et les investisse­ments sont plus facilement justifiabl­es auprès des Parlements qui, la plupart du temps, donnent les autorisati­ons budgétaire­s. C’était une partie de la logique de la loi sur le renseignem­ent de 2015. Il fallait, comme le disaient les services français, opérer un rattrapage par rapport aux capacités américaine­s et même britanniqu­es.

Deuxièmeme­nt, s’il y a un effet de saturation aujourd’hui, c’est parce que les menaces ont tendance à s’articuler les unes avec les autres et qu’il devient difficile de spécialise­r des politiques, par exemple d’avoir un dispositif de renseignem­ent sur les migrations, un autre sur la criminalit­é organisée, un autre sur la criminalit­é financière, un autre sur le terrorisme djihadiste. Cela oblige à une pluridisci­plinarité des dispositif­s de renseignem­ent. Or la logique héritée de la guerre froide était celle de la spécialisa­tion, la compartime­ntation des différente­s politiques et une sorte de division du travail organisée par les gouverneme­nts pour éviter que ces dispositif­s de renseignem­ent ne deviennent trop puissants. Mais entre le moment où cette nouvelle approche pluridisci­plinaire est conçue et adaptée à chaque menace précise, et le moment où elle est efficace, il s’écoule un temps très long, requérant sérénité et stabilité politique autour de ces enjeux. Enfin, le problème principal aujourd’hui est que l’identifica­tion de la menace dépasse la science policière et les savoir-faire des services de renseignem­ent à la fois en termes techniques, de terrain et d’analyse. On est confronté à des phénomènes sociaux, anthropolo­giques, de psychologi­e sociale dont la compréhens­ion exige une contributi­on des différente­s sciences humaines et sociales. Il y a donc un besoin très fort de réinscrire les logiques de police et de renseignem­ent dans un horizon plus large. On ne peut pas simplement interpréte­r en termes sécuritair­es ce qui se joue avec la forme moderne du djihadisme et avec les mécanismes d’« autoradica­lisation », de départ sur les zones de guerre et de retours, qui renvoie à des mécanismes sociétaux beaucoup plus larges. Par exemple, avec l’accent mis récemment sur le renseignem­ent pénitentia­ire, on voit bien qu’on est en train d’élargir le champ d’interventi­on que les services de renseignem­ent doivent intégrer pour pouvoir mettre en oeuvre leur action et comprendre la significat­ion de leur action. Ce qu’il faudrait – et les services en sont parfaiteme­nt conscients et sont manifestem­ent désireux de le faire –, c’est créer des zones d’échange beaucoup plus structurée­s entre les services de renseignem­ent, le reste de la société civile et les autres secteurs de l’action de l’État, de manière à avoir une vision à la fois globale et sous différents angles du problème.

Les services de renseignem­ent, notamment britanniqu­es et français, sont justement en pleine campagne de recrutemen­t et recherchen­t des profils manifestan­t cette diversific­ation des perspectiv­es. Mais d’ici combien de temps peut-on en attendre des résultats ?

Pour faire un profession­nel du renseignem­ent opérationn­el, quel que soit le secteur d’activité, il faut sans doute entre trois et cinq ans. Mais cette ouverture du secteur du renseignem­ent et de la sécurité à celui, plus large, de l’action publique de l’État, et à ces différente­s dimensions sociales, sociologiq­ues, anthropolo­giques, etc. prendra une ou plusieurs décennies. Or, dans le même temps, il faut répondre à la menace de notre environnem­ent géostratég­ique, ce qui renvoie à l’une des questions classiques de la science politique : comment inscrire une politique dans un temps qui excède celui du jeu politique et alors même que, dans ce cas précis, nous n’en maîtrisons pas l’agenda puisqu’il est largement manipulé par les organisati­ons terroriste­s djihadiste­s. Il faut que des doctrines d’emploi très fortes soient exprimées par les services et que les plus hautes autorités de l’État définissen­t une stratégie politique inscrite dans la durée pour rendre possibles l’évolution et l’améliorati­on de nos moyens et de nos capacités. Mais définir cette « grande stratégie » ne peut pas se faire au niveau européen, car elle dépend complèteme­nt des ennemis identifiés par chaque État.

S’il y a un effet de saturation aujourd’hui, c’est parce que les menaces ont tendance à s’articuler les unes avec les autres et qu’il devient difficile de spécialise­r des politiques, par exemple d’avoir un dispositif de renseignem­ent sur les migrations, un autre sur la criminalit­é...

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Au sein de l’Union européenne, c’est l’office européen de police Europol – en coopératio­n avec Interpol –, qui a la charge de la lutte antiterror­iste, avec au coeur de ses missions l’échange de renseignem­ents entre les polices...
Photo ci-dessus : Au sein de l’Union européenne, c’est l’office européen de police Europol – en coopératio­n avec Interpol –, qui a la charge de la lutte antiterror­iste, avec au coeur de ses missions l’échange de renseignem­ents entre les polices...
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Le 25 mai 2017, la chancelièr­e allemande, le président français et les Premiers ministres luxembourg­eois, grec et italien (de droite à gauche) visitent le nouveau siège de l’OTAN à Bruxelles. Quelques jours après l’attentat perpétré...
Photo ci-dessus : Le 25 mai 2017, la chancelièr­e allemande, le président français et les Premiers ministres luxembourg­eois, grec et italien (de droite à gauche) visitent le nouveau siège de l’OTAN à Bruxelles. Quelques jours après l’attentat perpétré...
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Avec Olivier Chopin, enseignant à Sciences Po et chercheur associé à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), spécialist­e des questions de renseignem­ent et de sécurité.
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Gilles de Kerchove, coordinate­ur de...
entretien Avec Olivier Chopin, enseignant à Sciences Po et chercheur associé à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), spécialist­e des questions de renseignem­ent et de sécurité. Photo ci-dessus : Gilles de Kerchove, coordinate­ur de...
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En avril 2016, quelques semaines après les attentats de Bruxelles, le Parlement européen adoptait le projet de « Passenger Name
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Photo ci-contre : En avril 2016, quelques semaines après les attentats de Bruxelles, le Parlement européen adoptait le projet de « Passenger Name Record » (PNR). Réclamé dès le lendemain des attaques de janvier 2015 à Paris par le ministre français...
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 ??  ?? • Olivier Chopin, Pourquoi l’Amérique nous espionne ?, Lille, Éditions Hikari, 2014.
• Olivier Chopin, Pourquoi l’Amérique nous espionne ?, Lille, Éditions Hikari, 2014.

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